Google soupçonné d’abus de position dominante par Bruxelles : droit et politique, des outils redoutables<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
International
Google est soupçonné d’abus de position dominante par Bruxelles.
Google est soupçonné d’abus de position dominante par Bruxelles.
©Reuters

Contre

Le droit et la politique sont devenus des armes que certaines entreprises manient habilement pour ralentir et contraindre leurs concurrents, plus innovateurs qu'eux.

Jean-Philippe Feldman

Jean-Philippe Feldman

Jean-Philippe Feldman est agrégé des facultés de droit, ancien Professeur des Universités et maître de conférences à SciencesPo, et avocat à la Cour de Paris. Il est vice-président de l’Association pour la liberté économique et le progrès social (A.L.E.P.S.).

Dernier ouvrage publié : Exception française. Histoire d’une société bloquée de l’Ancien Régime à Emmanuel Macron (Odile Jacob, 2020).

Voir la bio »

Le monde des affaires n’est pas tendre et la concurrence peut parfois être rude. La façon la plus saine de l’exercer, c’est par l’innovation et la qualité : pour répondre à ses compétiteurs, chaque opérateur est encouragé à devenir toujours meilleur. Mais il existe d’autres manières, probablement moins nobles, de faire obstacle à ses adversaires : le droit et la politique sont ainsi devenus des armes que certaines entreprises manient habilement pour ralentir et contraindre leurs concurrents. Les acteurs économiques doivent apprendre à jouer, désormais, avec la menace de ces nouveaux outils redoutables, comme vient de le montrer encore le cas Google.

Google est poursuivi par la Commission européenne pour « abus de position dominante » : selon l’administration bruxelloise, le groupe américain aurait profité de son succès pour barrer la route d’autres opérateurs. En apparence, tout est simple… Sauf que l’affaire « Google » dure depuis bientôt six ans !

A l’origine de l’affaire, un couple de britanniques, convaincus que les changements opérés par Google dans son fonctionnement auraient nui à leur activité, en rétrogradant le rang d’apparition de leur site. Imperceptiblement, derrière cette apparente modestie, chacun sentait la main de groupes concurrents de Google.

Le droit européen permettant diverses issues non contentieuses, Google a tenté à plusieurs reprises de trouver un accord avec les autorités de concurrence. L’un d’entre eux a même été annoncé publiquement par le Commissaire Almunia, à l’époque responsable du dossier. C’était sans compter sur l’activisme de quelques groupes déterminés, allemands notamment. Opportunément, le Commissaire allemand Oettinger, en charge de l’environnement, s’est opposé à toute solution : ayant récupéré le portefeuille du numérique depuis, il a fait savoir qu’il voulait même remplacer Google en Europe !

Le premier enseignement de l’affaire Google, c’est que le droit est un outil redoutable d’une compétition qui ne se fonde pas, de façon saine, sur « la concurrence par les mérites », comme le disent les économistes, mais sur une concurrence par les obstacles !

A l’utilisation du droit, les protagonistes ont ensuite ajouté l’ingrédient explosif de la politique. Leur lutte contre le géant de Mountain View n’était plus seulement une compétition privée, ils en ont fait un enjeu politique : désormais, c’était la "souveraineté européenne" qui était en jeu. Dès lors, l’offensive a été massive, faisant feu de tout bois : le Parlement européen, d’abord, le Sénat français ensuite, par exemple, ont pris diverses initiatives anti-Google.

Le second enseignement de l’affaire Google, c’est que la politique est un instrument encore plus menaçant dès lors qu’il est introduit dans la vie des affaires, car il fait appel à l’irrationnel, à l’imaginaire collectif, déchainant les passions.

Google est plébiscité par les consommateurs européens, bien plus, si l’on en croit les parts de marché, qu’aux Etats-Unis (90% en Europe, 75% aux Etats-Unis). Il a révolutionné leurs recherches, leurs vacances, leurs voyages, et plein d’autres éléments de leur quotidien. Demain, une solution plus performante émergera peut-être, qui obligera Google à se réinventer : c’est le sort de la vie économique, qui œuvre à toujours mieux satisfaire la demande. Ce processus vertueux ne sera possible que les opérateurs innovent, créent, agissent librement. Le droit et la politique ne devraient pas venir faire obstacle à cette dynamique positive !

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !