Faute de majorité en France, Bruno Le Maire peut se dire qu’il en trouverait une en Allemagne<!-- --> | Atlantico.fr
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Bruno Le Maire (à droite) accompagné des ministre allemands des Finances Christian Lindner (à gauche) et de l'Economie et du climat Robert Habeck (au centre), lors d'une conférence à Berlin, le 13 septembre 2023.
Bruno Le Maire (à droite) accompagné des ministre allemands des Finances Christian Lindner (à gauche) et de l'Economie et du climat Robert Habeck (au centre), lors d'une conférence à Berlin, le 13 septembre 2023.
©John MACDOUGALL / AFP

Atlantico Business

À l'heure où le ministre de l'Economie prépare un budget qui aura du mal à trouver une majorité au Parlement, il est adoubé par la presse allemande et approuvé par la présidente de la Commission de Bruxelles, et même envié par les Anglais.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Quand il se regarde à Paris, il se désole ; quand il se compare à ses voisins, il se console. Il y a des jours où le ministre de l'Economie doit se dire qu’il pourrait plus facilement faire de la politique en Allemagne. Invité hier à Berlin, la presse allemande n'a pas tari d'éloges pour la politique française, et notamment sa politique économique. Faut dire que la situation en Allemagne n’est pas brillante puisque le pays est plombé par une consommation en berne, des exportations en Chine en chute libre, plombé aussi par l'arrêt forcé des livraisons de gaz et la difficulté de trouver une alternative aussi abordable que l'était le gaz russe...

Résultats : une récession assez humiliante pour les élites dirigeantes de Berlin. Parce que de ce côté-ci du Rhin, la croissance française a été relevée à plus de 1% par les institutions européennes et françaises, soit une amélioration de la situation de l'emploi, une inflation élevée mais contenue. La comparaison entre les deux partenaires leaders en Europe a permis à la presse allemande de nous tresser des couronnes, ce qui outre-Rhin est extrêmement rare. À noter d’ailleurs que ces commentaires laudatifs sont repris par les Italiens et les Espagnols qui comprennent que la pression mise par les autorités allemandes sur la nécessité de respecter les règlements de Maastricht va sans doute un peu baisser... grâce à la position française.

Quant au même moment, Ursula von der Leyen lance une campagne anti-subventions contre la Chine dans le domaine automobile, elle fait suite à la découverte par Bruno Le Maire la semaine dernière à Shenzhen que dans moins de six mois, les voitures électriques chinoises vont arriver par bateau et par train entier en Europe et qu’elles seront vendues deux fois moins chères que les modèles identiques fabriqués en Europe. Même les Allemands ont du mal à avaler la pilule alors qu'ils sont eux-mêmes exportateurs en Chine.

Restent les Anglais où la City déplore avoir perdu beaucoup de ses forces vives au profit de Paris et où l'opinion publique réalise quatre ans après le Brexit que le gouvernement n'a pas réussi à se débarrasser des lourdeurs administratives et réglementaires alors que les Anglais avaient voté pour justement échapper à cette bureaucratie.

En France, le petit monde un peu guindé de Bercy reconnaît que la France n'a pas été aussi bien traitée par ses voisins et surtout ses partenaires de l'Union européenne depuis des lustres et des lustres. Au Moyen-Âge, sait-on que le lustre signifiait une éternité.

Cela étant, si le ministre ne boude pas son plaisir, il n’est pas pour autant naïf. Il sait très bien que la France n’a pas gagné la bataille. Son potentiel industriel est à reconstruire...

L'Allemagne a une industrie proche des 25 % de son PIB, ce qui lui donne les moyens et le temps de retrouver la compétitivité perdue depuis la guerre en Ukraine et la fin du gaz facile et pas cher. L’Allemagne a des ressources que la France n’a pas. La France doit plus de 3000 milliards de dettes, soit 120 % de son PIB. Deux fois la dette allemande. C’est considérable. D’autant plus considérable que le gouvernement de Paris doit assumer une administration qui fait eau de toutes parts. Les factures du secteur public sont d’autant plus lourdes que l'État ne pourra pas ne pas augmenter encore la pression fiscale puisqu’il ne peut pas baisser les dépenses publiques.

Contrairement à la presse allemande, la presse française attaque le ministre de l'Economie parce qu'il refuse de subventionner le prix de l'essence et se demande tous les jours comment il va financer la transition écologique. La France de Bercy est une terre de contradictions. Bruno Le Maire peut jouir d'une situation très confortable quand il va à Berlin ou à Londres. Mais quand il rentre à Paris, il est bien obligé de compter sur les 49.3 pour faire passer son budget. Et tant qu'il n'aura pas trouvé les moyens de faire une coalition avec ses anciens amis, il en sera ainsi. La France sera difficile à gouverner. Il n'y a qu'en Allemagne où la classe politique a le talent où la culture de faire des coalitions.

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