“Êtes-vous des chrétiens ou bien des mondains ?” Et le pape lança un avertissement au clergé romain et à ceux qui doutaient de sa détermination à réformer la curie<!-- --> | Atlantico.fr
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Le pape François a déclaré qu'il était "triste" de "trouver des chrétiens édulcorés".
Le pape François a déclaré qu'il était "triste" de "trouver des chrétiens édulcorés".
©Reuters

Choisir son camp

La pastorale des bidonvilles d'Amérique du Sud est bien différente du style de vie des prélats de la Curie romaine. Tel est le constat du pape François depuis le début de son pontificat qui a vivement critiqué ces "mondains" éloignés de la valeur de pauvreté de l’Évangile.

Bernard Lecomte

Bernard Lecomte

Ancien grand reporter à La Croix et à L'Express, ancien rédacteur en chef du Figaro Magazine, Bernard Lecomte est un des meilleurs spécialistes du Vatican. Ses livres sur le sujet font autorité, notamment sa biographie de Jean-Paul II qui fut un succès mondial. Il a publié Tous les secrets du Vatican chez Perrin. 

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Atlantico : A l'occasion de sa prière de l'Angélus ce dimanche 31 août place Saint Pierre à Rome, le pape François a déclaré qu'il était "triste" de "trouver des chrétiens édulcorés", ajoutant qu'on "ne sait si ce sont des chrétiens ou des mondains". Qui le pape François désigne-t-il par ce terme ?

Bernard LecomteLe pape François nous a habitués, depuis son élection, à ces formules à l’emporte-pièce souvent exigeantes, quelquefois dérangeantes, qui visent deux cibles. D’abord, les chrétiens dans leur globalité, à qui il demande d’être fiers de leur foi et de ne pas avoir des têtes d’enterrement : soyez les témoins de la joie de croire, leur dit-il. N’oublions pas que le pape François vient d’un continent, l’Amérique du Sud, où la foi se chante et se danse de façon beaucoup plus physique et joyeuse qu’en Europe.

Sa seconde cible, ce sont les clercs, les prélats, voire certains évêques ou cardinaux qui se sont fait une place confortable dans le monde, notamment sur le plan social, au point d’oublier ce qui a fait leur vocation : le pape n’hésite pas, sur ce thème, à fustiger tel évêque qui roule dans une trop belle voiture, ou tel cardinal qui habite dans un appartement trop spacieux… 

Dans quelle mesure peut-on rattacher cette critique au plus vaste mouvement de réforme de la curie initié par le souverain pontife ?

Ce sont deux sujets différents mais on peut, en effet, leur trouver un lien : l’ancien archevêque de Buenos Aires, comme beaucoup d’évêques "de terrain", a toujours été étranger aux mœurs, aux habitudes, au style de vie des prélats travaillant à la Curie, à Rome, qui, il faut le dire, ont peu à voir avec la pastorale dans les bidonvilles sud-américains ! Cela étant dit, ce n’est pas cela qui le pousse à réformer l’administration du Vatican : rappelons-nous qu’un grand nombre de cardinaux, notamment américains, ont posé cette exigence de réforme dans les jours qui ont précédé l’élection du successeur de Benoît XVI. La réforme de la Curie, comme l’assainissement des finances du Vatican, fait partie de son cahier des charges !

Pour autant, critique-t-il seulement le clergé ? Un certain agacement à l'égard de l'ensemble des chrétiens  "pleinement insérés dans la réalité sociale et culturelle de notre temps", semble percer. Là aussi, critique-t-il tous les chrétiens, ou seulement certaines catégories en particulier ?

Le pape François vient d’un continent où les Eglises évangéliques taillent des croupières à la religion catholique, pourtant majoritaire. L’ancien archevêque argentin sait bien que les progrès des évangéliques sont dus, notamment, à une façon de vivre sa foi qui n’a rien à voir avec le style souvent compassé qui est celui des vieilles communautés chrétiennes d’Europe. Dès son élection, le nouveau pape a invité ses ouailles à " sortir des églises " pour aller " évangéliser à la périphérie ". C’est une façon de privilégier la vocation missionnaire de l’Eglise qui, chez nous, est plutôt habituée à gérer, à l’ombre des clochers, son héritage bimillénaire… 

Finalement, pour le clergé comme pour les chrétiens en général, à quel modèle de vie le pape François aspire-t-il ?

Rappelez-vous sa première apparition à la loggia des Bénédictions, place Saint-Pierre, le jeudi 14 mars 2013 : qu’il se soit appelé " François ", en référence à Saint-François d’Assise, était déjà, ce soir-là, une sorte de programme pontifical. François d’Assise, le poverello, l’apôtre de l’humilité et de la simplicité évangélique ! Ce pape jésuite a toujours admiré, en réalité, les franciscains, ces disciples de François d’Assise qui ont choisi de vivre au plus près de la valeur première de l’Evangile : la pauvreté. En voilà qui n’étaient pas des "mondains" et qui contestaient déjà, au Moyen âge, la façon dont beaucoup de responsables d’Eglise vivaient comme des princes ou des notables, et non comme des pasteurs ou des missionnaires. A 800 ans d’écart, la problématique est la même, et le nouveau pape ne se prive pas de le rappeler : si l’Eglise catholique n’est plus l’Eglise des pauvres, elle trahit à la fois ses origines et son message ! 

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