État d’urgence : peut-on tenir des élections dans une période qualifiée de guerre ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Les Françaises et les Français appelés aux urnes les 6 et 13 décembre auront-ils l’esprit libre ?
Les Françaises et les Français appelés aux urnes les 6 et 13 décembre auront-ils l’esprit libre ?
©Reuters

Mauvais timing

Les 6 et 13 décembre, les Français sont invités à se prononcer aux urnes, dans le cadre des élections régionales. Bien que prévues de longues dates, ces élections sont néanmoins occultées par un contexte national et international particulier. Entre les attentats du 13 novembre et la COP21, il paraît déraisonnable de les maintenir.

Michel Guénaire

Michel Guénaire est avocat et écrivain. Il est l’auteur du Génie français (Grasset, 2006) et Après la mondialisation. Le retour à la nation (Les Presses de la Cité, 2022). Vous pouvez retrouver Michel Guénaire sur Twitter : @michelguenaire

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Les Françaises et les Français appelés aux urnes les 6 et 13 décembre auront-ils l’esprit libre ? Un pays en guerre, comme se sont plu à le répéter nos dirigeants depuis les attentats du 13 novembre, peut-il être un pays en élections ? L’hypothèse d’un report des élections régionales est loin d’être absurde.

Il y a d’abord l’argument de la compatibilité avec l’état d’urgence. Déclaré par le décret du 14 novembre 2015 en application de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence, puis prorogé par la loi du 20 novembre 2015 pour une durée de trois mois à compter du 26 novembre, l’état d’urgence permet au ministre de l’Intérieur et aux préfets de prendre des mesures restrictives des libertés fondamentales comme l’interdiction de la circulation des personnes et des véhicules ou l’interdiction de toute réunion pouvant provoquer le désordre.

>>>>> A lire aussi : Pourquoi un état d’urgence qui dure se révélera vite un piège politique redoutable

En élargissant les pouvoirs de police administrative de l’Etat, il autorise un contrôle des moyens d’expression de la pensée. La tenue d’élections, avec le débat, les polémiques voire les agissements les plus divers sur le corps électoral qui peuvent naître de la compétition entre les candidats, est-elle possible dans une telle situation juridique ? 

D’aucuns répondront qu’il ne faut pas croire que le pouvoir en place va utiliser les pouvoirs élargis de police qui lui sont conférés par l’état d’urgence pour limiter la liberté des candidats. Par-delà la compatibilité juridique, il y a l’assise psychologique. Peut-on surtout tenir des élections dans une période qualifiée de guerre ?

Les élections ont pour but de désigner les assemblées et les exécutifs des treize nouvelles régions, dont on souhaite qu’elles forment l’ossature de la décentralisation de demain. L’attention des électrices et des électeurs devait être appelée dans de meilleures conditions. Il faut craindre au contraire que les élections régionales se disputant après les attentats du 13 novembre ne viennent contraindre les électeurs, qui auront peur de se déplacer dans des lieux publics, et limiter les débats, en les réduisant à la seule question sécuritaire.

Il est trop tard pour les reporter, mais les tenir dans ce contexte est une preuve supplémentaire de l’irresponsabilité de nos gouvernants. Ceux-ci avaient déjà programmé l’organisation de ces élections capitales pour les libertés locales en pleine COP 21, en mêlant leur enjeu à d’autres préoccupations. Ils les maintiennent moins de trois semaines après une vague d’attentats qui restera marquer un cap supplémentaire dans la guerre que nous déclare l’organisation Etat islamique. Les élections régionales sont les élections volées.

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