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Entre les Français et la fonction publique, une histoire d'amour compliquée
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Je t'aime, moi non plus

Marylise Lebranchu, la ministre de la Réforme de l'État, rencontre les syndicats pour discuter des conditions de travail des fonctionnaires.

Jean-Paul  Delevoye

Jean-Paul Delevoye

Jean-Paul Delevoye a été médiateur de la République de 2004 à 2011. Il préside depuis 2010, le Conseil économique, social et environnemental.

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Atlantico : Alors que les Français sont prompts à se plaindre de la qualité des services publics, plusieurs sondages montrent leur attachement à la fonction publique. Comment expliquer ce paradoxe ? Peut-on parler de sacralisation ?

Jean-Paul Delevoye : Les Français sont particulièrement attachés, presque affectivement, à un espace d'écoute, et de traitement de leurs dossiers de façon individuelle, personnalisée et neutre. Ils sont épris de liberté, d'équité et souhaitent que le service public soit cet espace qui, hors de tout calculs de pouvoir et d'intérêts particuliers, puisse les considérer de façon égale.

Beaucoup de Français veulent également une proximité qu'ils peuvent avoir, par exemple, avec les nouveaux outils de télécommunication, notamment lors de la déclaration d'impôts. Sur ce volet, il y a une très forte approbation du service rendu. En revanche, en cas de dysfonctionnement, les Français passe d'une humanité de traitement à un rapport extrêmement difficile : répondeurs téléphoniques en chaîne, renvoi systématique vers d'autres administrations... Ce rapport du "fort" au "faible" devient pénible pour les citoyens qui éprouvent alors un sentiment de révolte et d'exaspération vers ce même service public.

Schématiquement, le service public traite la "masse" d'une manière assez remarquable, mais le traitement des réclamations est négligé. Ce conflit existe d'ailleurs aussi en interne puisque l'administration centrale n'a pas toujours confiance en l'administration locale. Il est donc important de retrouver un contrat de confiance associé à une responsabilisation partagée car notre société à de plus en plus besoin de régulation publique.

Beaucoup de Français sont-ils exclus des services publics du fait de la complexité administrative ?

Effectivement, il existe des situations de non droits où certaines personnes, de par leurs statuts, peuvent prétendre à des droits qu'ils ne peuvent exercer soit parce qu'ils sont trop éloignés ou parce que les démarches administratives sont telles que la complexité requise ne justifie pas le "retour sur investissement" de l'accès aux droits. C'est vrai pour les particuliers mais également pour des entreprises en ce qui concerne les subventions ou même les agriculteurs pour l'accès aux fonds européens.

Nous sommes en pleine situation paradoxale : la loi, censée protéger nos citoyens et les traiter de façon égalitaire, donne un privilège à ceux qui ont du temps, de l'argent et des relations. Il s'agit d'une rupture d'égalité contraire à l'esprit des services publics.

Est-il possible de réformer les services publics sans embaucher davantage de fonctionnaire, ni même heurter les Français ?

Il faut mener deux combats principaux :

  • lutter contre les tensions entre ceux qui travaillent dans la fonction publique et ceux étant dans le secteur privé. En effet, la réalité des fonctionnaires est parfois loin de l'image de "privilégiée" qui lui est si souvent attribuée : il suffit de voir les conditions de travail de certains professeurs, universitaires ou policiers. Nous n'accepterions pas dans le privé ce que l'on impose parfois aux fonctionnaires.
  • l'apport du numérique peut aider à la réorganisation du service public en améliorant l'égalité d'accès au service public - la proximité physique laissant place à la proximité télématique - et l'égal qualité dans les réponses apportées.

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