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Emmanuel Macron entre autorité et autoritarisme : pas si facile d'être Jupiter...
©SEBASTIEN BOZON / AFP

Bayrou la provoc'

Bien que le chef de l'Etat Emmanuel Macron a veillé à restaurer l'image du président de la République dès le début de son mandat avec des déclarations ou des actes qui peuvent sembler jupitériens, les écarts de conduite de François Bayrou montrent que l'autorité n'est pas encore complètement établie.

Jacques Charles-Gaffiot

Jacques Charles-Gaffiot

Jacques Charles-Gaffiot est l'auteur de Trônes en majesté, l’Autorité et son symbole (Édition du Cerf), et commissaire de l'exposition Trésors du Saint-Sépulcre. Présents des cours royales européennes qui fut présentée au château de Versailles jusqu’au 14 juillet 2013.

 

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Atlantico : Volonté d'évaluer les hauts fonctionnaires des administrations centrales d'ici à la fin de l'année, des candidats En Marche étrangement silencieux pendant la campagne électorale, entraînant une suspicion de consignes de silence, fonctionnement très vertical du pouvoir, en quoi les actions, l'organisation d’Emmanuel Macron peut-elle s’assimiler à des actes "d'autoritarisme", et comment comprendre, dès lors, la liberté de parole de François Bayrou, ou celle d'Edouard Philippe ? Symboliquement, en quoi les actes apparaissant comme "autoritaires" se démarquent ils de l'autorité elle même ?

Jacques Charles-Gaffiot : S’assurer de la fidélité des hauts fonctionnaires envers le chef de l’Etat ne semble pas en soi une exigence extravagante. Aux Etats-Unis, le renouvellement de l’administration fédérale après l’élection du président est un procédé inscrit dans les mœurs politiques. En France, on a pu malheureusement souvent le constater, de hauts responsables n’ont pas hésité à faire prévaloir des vues partisanes et parfois même un intérêt personnel au détriment de l’intérêt public, en s’affranchissant allégrement de toute discipline. Le « deux poids deux mesures » a ainsi fait son chemin dans la pratique politique pour apparaître désormais insupportable aux yeux du citoyen lambda.

Un double écueil est cependant à redouter lorsqu’on se propose de « laver plus blanc que blanc » comme disait Coluche. Le premier des risques, en effet, est de favoriser la propagation de la crainte du soupçon et de voir rapidement dénoncé l’excès d’autoritarisme ; le second est de ne pas être entendu par les intéressés eux-mêmes et encourager parmi les plus velléitaires et ambitieux d’entre eux roueries et félonies les plus secrètes.

Le remède peut ainsi devenir pire que le mal à extirper.

En fait, ces difficultés s’évanouissent d’elles-mêmes lorsque l’autorité reconnue au chef de l’Etat est suffisante pour favoriser naturellement l’autodiscipline. Un avertissement solennel lancé à la cantonade n’est sans doute le procédé le plus expédient. Dans ce domaine, les vieilles méthodes sont sans doute plus efficaces : il est préférable, lorsque la ligne rouge est franchie, de faire un exemple… tout le monde restera alors plus facilement dans le rang. Qu’on se souvienne du malheureux Fouquet !

Toutefois, Emmanuel Macron est-il revêtu de l’autorité suffisante ? Il faut tout d’abord rendre au Président de la République cette justice : Dès les premières heures de son quinquennat, il a su entreprendre, non sans un certain succès, une restauration de l’image du chef de l’Etat. Mais pour autant qu’en est-il de son autorité ?

En tout cas, François Bayrou s’en affranchit et, sans un véritable souci de la vérité et de la transparence dont il se réclame, semble prêt à la surenchère. Dans ce contexte singulier, l’autorité d’Emmanuel Macron est loin d’atteindre son zénit et semble alors bien fragile !

Ce paradoxe ne peut il pas traduire un manque d'autorité ? Quels sont les moyens de parvenir à cette autorité, celle qui aboutira à ne plus avoir besoin d'en arriver à des actes "autoritaires" ? Doit on en passer par un "exemple" pour y parvenir ?

Michel Onfray, dans une récente interview donné au lendemain du premier tour des législatives n’a sans doute pas tord quand il fait remarquer que le raz de marée d’En Marche est davantage une vue de l’esprit des commentateurs politiques plutôt qu’un examen clairvoyant de la réalité. Rapporté au nombre des citoyens inscrits sur les listes électorales, En Marche ne totalise pas 32,32 % mais seulement 13,4 %, c’est à dire une adhésion ultra minoritaire parmi les Français. Or l’élection au suffrage universel, introduite dans les institutions de la Ve République, confère au chef de l’Etat comme aux élus non seulement l’exercice des pouvoirs exécutif ou législatif mais également une autorité reconnue par l’ensemble des électeurs.

Avec 13,4 % des suffrages, le processus habituel ne fonctionne pas.

La désaffection du corps électoral dans le processus électoral est lourd de conséquence. Cette constatation s’amplifie encore en considérant que ces 13,4 % pourront se traduire par une levée, au sein de l’Assemblée, de 70 à 80 % des sièges.

Au terme de quelques semaines passées à l’Elysée, Emmanuel Macron ne saurait apporter un remède miracle à cette situation. S’il hérite d’un système qui montre à présent ses limites et s’il souhaite renforcer son autorité, un « exemple » fera comprendre à chacun qu’il reste au-dessus de la mêlée et qu’il peut être le président idoine pour apporter les « vraies » solutions que le pays attend depuis plus de 10 ans.

Comment les anciens Présidents peuvent ils se mesurer sur cette échelle entre actes autoritaires et autorité naturelle ?

Qu’on se rappelle de l’attitude du général De Gaulle à la fin du mois de mai 1968.  On le croit parti en hélicoptère pour Colombey mais il se rend à Baden Baden pour s’entretenir avec le général Massu. Sans claironner ses intentions et dans la solitude de l’exercice du pouvoir, le fondateur de la Ve République retourne ainsi à son profit en quelques heures une situation politique pourtant bien confuse.

A l’opposé, François Hollande, très satisfait de son mandat si performant, s’est joué, avec une constance chevaleresque et ses propos tous azimuts, de la retenue qu’impose l’exercice de la fonction. Ayant souvent érigé le mensonge en vertu, il s’est définitivement déconsidéré aux yeux des Français. Il est curieux de constater combien certains socialistes apparaissent sans aucun scrupule. Ainsi, Paris est sans doute devenu l’une des métropoles les plus sales de France voire même d’Europe, seule la Maire de Paris continue à s’évertuer à prétendre le contraire !

Mais taisons-nous, elle nous enverrait à la Bastille ! 

Georges Pompidou, successeur direct du général, a fait preuve d’une autorité naturelle. Avec un regard qui pouvait être glacial, François Mitterrand pouvait être craint. On découvre aujourd’hui qu’il ne répugnait pas à des méthodes un peu radicales. Nicolas Sarkozy est entré bien trop régulièrement dans la mêlée pour ne pas voir se dissoudre rapidement son autorité.

Si l’autorité naturelle rend stable l’exercice du pouvoir, elle exige de son titulaire des talents d’équilibriste. Ne rien forcer, ne dévoiler qu’à bon escient et savoir se contenir devant le vertige que procure la solitude du pouvoir ; voici peut-être réunis les trois ingrédients indispensables à l’exercice de l’autorité.

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