"Dissoudre la droite populaire ? Il faut vraiment que la gauche n'ait rien à dire"<!-- --> | Atlantico.fr
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"J’adore le vin rouge et le saucisson, mais on sait très bien qu’avec les « lois médiatiques » et le « terrorisme » de certains, quand on parle d’apéro saucisson vin rouge, on sera immanquablement caricaturé".
"J’adore le vin rouge et le saucisson, mais on sait très bien qu’avec les « lois médiatiques » et le « terrorisme » de certains, quand on parle d’apéro saucisson vin rouge, on sera immanquablement caricaturé".
©Reuters

Voix du peuple ?

Le Premier secrétaire du PS, Harlem Désir, a demandé ce jeudi la dissolution de la droite populaire. L'un de ses fondateurs, Thierry Mariani, ministre chargé des transports, lui répond et explique les motivations de ce collectif politique souvent accusé de braconner sur les terres du FN.

Thierry Mariani

Thierry Mariani

Thierry Mariani a créé, en 2010, avec notamment les parlementaires Christian Vanneste et Lionnel Luca, le collectif de la Droite Populaire.

Il a été ministre chargé des transports dans le dernier gouvernement de Nicolas Sarkozy. 

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Atlantico : Harlem Désir demande la dissolution de la droite populaire. Votre réaction ?

Thierry Mariani : C’est vraiment le symbole d’une gauche qui n’a rien à dire, au moment où l’on s’apprête à avoir un débat fondamental pour notre pays. Dissoudre la droite populaire ? Je rappelle à Harlem Désir que la droite populaire n’a pas de statut, pas de chef, qu’elle correspond simplement à des élus qui ont en commun une charte, une sorte de label, qui définit les valeurs partagées par ses membres.

Demander cela pour quelqu’un comme Harlem Désir qui a longtemps défendu, lorsqu’il était à la tête de SOS Racisme, le respect des différences et des opinions, c’est étrange…

Mais Harlem Désir c’est quoi ? C’est le parti de la génération Mitterrand. Et quand on voit les propositions du programme de la gauche aujourd’hui… Finalement, c’est la marque d’un parti qui n’a pas compris que la France évolue et est resté bloquée vingt ans en arrière.

La droite populaire est toutefois aussi critiquée au sein même de l’UMP…

On respecte les centristes et les radicaux qui sont utiles à la majorité. Mais dans la majorité, il y a aussi un programme de droite ! Le paradoxe c’est qu’au sein de l’UMP, celui-ci n’était pas identifié.

L’UMP a été créée en 2002. Quasiment dix ans plus tard, on continue à parler des libéraux, des centristes et des gaullistes. Cela correspond à l’histoire personnelle de chacun de ses membres : je suis très fier d’avoir été RPR. Mais les courants évoluent. Aujourd’hui, une partie de l’électorat de Nicolas Sarkozy se revendique clairement à droite - elle se reconnait, par exemple, dans le discours de Grenoble dont c’est aujourd’hui le premier anniversaire - et a envie d’être reconnue comme telle au sein de l’UMP. Voilà la raison d’être de la droite populaire.

Donc, quand vous êtes critiqué au sein de votre propre camp, cela vous agace ?

Cela montre qu’il faut passer à la deuxième étape. La première étape, celle de la notoriété, la droite populaire l’a réussie. Il faut réussir maintenant le défi de la crédibilité. Je reprendrais donc une phrase d’un des députés de la droite populaire, Patrice Verchère, qui a dit « la droite populaire doit être un plus et pas un poids ». Nous devons donc éviter de tomber dans la caricature.

Précisément, vous pensez à quoi ? A la proposition d’apéro vin rouge saucisson du 14 juillet dernier d'une partie des membres de la droite populaire ?

J’adore le vin rouge et le saucisson, mais on sait très bien qu’avec les « lois médiatiques » et le « terrorisme » de certains, quand on parle d’apéro saucisson vin rouge, on sera immanquablement caricaturé.

Vous mettez dans le même lot les déclarations de Christian Vanneste ou de Brigitte Barèges sur le mariage homosexuel (Christian Vanneste l'avait défini, entre autres, comme "une aberration anthropologique", Brigitte Barèges avait déclaré à son propos : "et pourquoi pas des unions avec des animaux ? ou la polygamie ?") ?  

Je dis qu’il faut éviter de tomber dans des positions caricaturales et avoir une certaine crédibilité. La crédibilité passe notamment par une coordination et une organisation.

A son origine, la droite populaire avait un principe simple : pas de chef. C’est pourquoi on l’appelle « collectif de la droite populaire » et tous les communiqués sont publiés par ordre alphabétique. Autre principe : la droite populaire est engagée lorsqu’au moins la moitié des députés qui la compose ont signé le communiqué.

Aujourd’hui, les membres de la droite populaire ont une liberté d’expression à laquelle je suis attaché. Mais certaines de leurs positions ne doivent pas engager tout le groupe. L’étape de la crédibilité c’est aussi d’avoir des positions communes sur certains sujets, des propositions estampillées « droite populaire ». Sans empêcher par ailleurs chaque député d’avoir des positions personnelles qui n’engage que lui sur d’autres sujets. Par exemple, quand Lionnel Luca demande la suppression de la bi-nationalité, c’est sa position et il l’argumente très bien, mais ce n’est pas la position de tout le monde au sein de la droite populaire.

Quand certains au sein du groupe se définissent comme un collectif « anarchiste et bordélique », c’est peut-être sympathique. Mais l’anarchie n’a jamais rien construit. (NDLR : c’est Lionnel Luca qui la définissait début juillet : comme une « organisation anarchiste - de droite certes -, folklorique, bordélique »).

Je suis attaché à l’efficacité en politique. La politique ce n’est pas simplement se faire plaisir en ayant trois lignes dans la presse parce qu’on a fait un communiqué au vitriol sur tel ou tel sujet.

Vous ne condamnez donc aucun propos tenu par des membres de la droite populaire ?

Non. Parce qu’ils sont parlementaires et que je ne condamne aucun propos de parlementaire. Je ne partage pas certaines de leurs positions, mais je ne les condamne pas. Mes adversaires politiques ne sont pas à droite.

Une alliance avec l’extrême droite est-elle prévue ?

C’est une question à laquelle on a répondu 100 000 fois : le passé politique de tous – en particulier du mien - montre qu’on a aucune envie, aucune intention, aucun projet d’alliance avec l’extrême droite.

Quand je dis qu’il ne faut pas tomber dans la caricature, c’est justement pour éviter de prêter le flan à cette caricature dont Monsieur Harlem Désir, par manque d’imagination, a montré qu’elle risquait d’être fréquente.

Mais puisque la droite populaire n’a pas de chef, comment réagiriez-vous si l’un de ses membres se prononçait pour une alliance avec l’extrême droite ?

C’est ce que je vous indiquais tout à l’heure : il faut respecter le principe où la droite populaire n’est engagée que si la majorité de ses membres prend position sur un sujet.

Comment Nicolas Sarkozy perçoit-il la droite populaire ?

Il ne m’a jamais découragé. Au contraire, à partir du moment où il s’agit de quelque chose de constructif, je pense que pour Nicolas Sarkozy c’est un élément de liberté d’expression et de pluralité d’opinions au sein de la majorité. A condition d’être très clairs sur certains principes, comme par exemple celui de ne pas faire d’alliance avec le Front national. J’ai toujours été élu contre le Front national, vous savez. S’il fallait faire la liste du nombre de procès que j’ai eu avec eux…

La différence entre la droite populaire et le Front national finalement est que le FN et Marine Le Pen sont dans l’incantation et la dénonciation, alors que nous préférons être dans la proposition et dans l’action. Notre défi pour demain, c’est que les gens disent de nous : « ils sont contre cela, parce qu’ils proposent ceci ».

Quand je vois comment, à gauche comme à droite, certains lancent leur campagne présidentielle en prenant des agences de com’ etc. Nous, le budget de départ de la droite populaire est de 2000 euros : 400 pour le dépôt de la marque, 1600 pour le site Internet. Quand on voit l’écho qu’on a, y compris sur notre site Internet, je me dis que cela est dû à notre électorat.

Finalement, vous êtes un peu dans la même logique que Jean-Luc Mélenchon… Vous défendez le peuple…

Non, selon moi, c’est Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon qui ont la même logique : ce sont deux démagogues – de talent, certes – qui savent très bien qu’ils peuvent proposer n’importe quoi parce qu’ils savent très bien qu’ils n’accèderont jamais au pouvoir en France. Nous, notre but consiste à influer sur les choix de la majorité.

Mais au-delà, notez-vous un problème dans la capacité des hommes politiques à s’adresser au peuple ?

Tous les hommes politiques devraient être populaires. On estime qu’on doit être à l’écoute de ce que les gens nous disent et de ce que l’on entend. « Populaire » ne veut pas dire « populiste ».

Mais de toutes façons, pour reprendre l’expression de Philippe Muray : « populiste, c’est le qualificatif que donne la gauche quand le peuple lui échappe ». Donc j’ignore ce qu’est être populiste, mais je sais ce que signifie être proche des préoccupations de ses électeurs et d’être responsable.

Et si je vous dis que la droite populaire n’existe que par pur intérêt politique ?

Vous savez, en général, l’intérêt de tous les hommes politiques est de gagner les élections. Le masochisme électoral n’est pas forcément une vertu politique !

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