Trump Biden : vers une élection beaucoup plus serrée qu’il n’y paraît ?<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Politique
Donald Trump Joe Biden démocrates républicains débat élection présidentielle américaine
Donald Trump Joe Biden démocrates républicains débat élection présidentielle américaine
©JIM WATSON

Maison Blanche

Les rares instituts de sondage qui avaient vu arriver l’élection de Donald Trump en 2016 prédisent un résultat serré en raison de l’existence d’un vote Trump caché tant la pression sociale est grande contre les électeurs républicains, notamment issus des minorités.

Edouard Husson

Edouard Husson

Universitaire, Edouard Husson a dirigé ESCP Europe Business School de 2012 à 2014 puis a été vice-président de l’Université Paris Sciences & Lettres (PSL). Il est actuellement professeur à l’Institut Franco-Allemand d’Etudes Européennes (à l’Université de Cergy-Pontoise). Spécialiste de l’histoire de l’Allemagne et de l’Europe, il travaille en particulier sur la modernisation politique des sociétés depuis la Révolution française. Il est l’auteur d’ouvrages et de nombreux articles sur l’histoire de l’Allemagne depuis la Révolution française, l’histoire des mondialisations, l’histoire de la monnaie, l’histoire du nazisme et des autres violences de masse au XXème siècle  ou l’histoire des relations internationales et des conflits contemporains. Il écrit en ce moment une biographie de Benjamin Disraëli. 

Voir la bio »

Ces électeurs de Donald Trump qui ne dévoilent pas leur intention aux instituts de sondage

Une élection jouée d’avance? 

A entendre de nombreux commentateurs, le match Biden-Trump est joué d’avance. Nous nous acheminerions vers une large victoire de Joe Biden. Par exemple, le site Real Clear Politics, qui collecte les sondages publiés par Etat et en propose des moyennes, pronostique une victoire sans appel pour le candidat démocrate: 357 grands représentants contre seulement 181 pour Donald Trump. Pas de doute, non plus, apparemment, pour Five Thirty Eight, qui fait basculer sans hésiter la Floride, par exemple, du côté de Biden. Et puis, les experts répètent à longueur de journée que l’écart national entre les deux candidats, d’environ dix points dans la plupart des sondages, rend impossible à Trump de créer la surprise en jouant le collège électoral aux dépens du suffrage populaire.

Bien entendu les sondeurs vous expliquent qu’ils ont pris toutes les précautions. Ils ne veulent pas connaître une mésaventure semblable à celle de 2016. Et d’ailleurs, le site Real Clear Politics nous propose une seconde carte sur laquelle ils créditent certes Biden de 216 suffrages déjà acquis et Trump de seulement 125. Mais cela veut dire qu’il reste 197 grands électeurs non répartis. Et si vous regardez de plus près les cartes, vous vous apercevez qu’en fait Real Clear Politics n’ose pas trancher définitivement sur la Floride, par exemple: l’avance moyenne de Biden selon les sondages n’y est que de 1,8 point, soit moins que la marge d’erreur (3 points). En continuant à regarder les Etats un par un, on s’aperçoit qu’un certain nombre d’Etats sont, dans la moyenne des sondages publiés, très incertains. Prenons par exemple l’Iowa, l’Ohio, la Géorgie: l’avance de Biden y est, dans la moyenne des sondages, inférieure à la marge d’erreur et l’on imagine ce que signifierait pour Donald Trump la victoire des 40 grands électeurs concernés.

Les préférences des sondeurs

La vérité est que tous les sondeurs font des choix. Comment, par exemple, anticiper sur le taux de participation? Beaucoup de sondeurs seront d’accord pour dire qu’une participation très élevée favoriserait le ticket démocrate. La participation avait été de 58% en 2008 pour la première élection de Barack Obama.  Faut-il alors majorer les scores de Biden dans le traitement des résultats bruts? Pourtant, la participation était légèrement plus élevée en 2016 (55,7%) lors de l’élection de Trump, qu’en 2012 (54,9%) lors de la réélection de Barack Obama. Et tout le monde peut remarquer que les meetings de Biden n’attirent personne, alors que les meetings de Trump sont très fréquentés, malgré le COVID 19. Et l’on a vu une poussée des réinscriptions électorales sous l’étiquette républicaine en Floride, en Caroline du Nord et en Pennsylvanie, trois Etats qui seront disputés. En 2007, Trump a emporté la Pennsylvanie avec 0,7 point et la Floride avec 1,2 point d’avance. L’avance que donne la moyenne des sondages à Biden en Caroline du Nord est en deçà de la marge d’erreur. 

Une autre question, qui n’est elle pas assez débattue, est la question de savoir si l’on arrive à saisir par les sondages les électeurs de Trump ou si ceux-ci hésitent à se déclarer. Le climat que font régner les médias, la prédominance du vote démocrate dans les classes sociales les plus diplômées (donc chez les cadres supérieurs et les employeurs) font que beaucoup d’électeurs de Trump restent cachés. Exactement comme les déclarations de vote Le Pen en France ont été, au moins jusqu’à récemment, en-dessous des intentions de vote réelles. On a vu des personnes licenciées pour avoir marqué leur soutien à Trump. Depuis le printemps, le mouvement d’extrême gauche Black Live Matters a fait régner la terreur dans de nombreuses villes, avec la complicité des médias mainstream et du parti démocrate. Il y a par conséquent des instituts de sondage, minoritaires et peu cités, qui donnent des chiffres différents de ce qu’on lit sur Real Clear Politics et Five Thirty Eight. 

Trump augmente son score de 10% chez les Noirs et chez les Hispaniques

Ainsi en est-il du Democracy Institute, qui avait correctement anticipé le vote pro-Brexit au référendum de juin 2016 et le vote en faveur de Donald Trump. Le sondage mensuel donnait, début octobre, un point d’avance à Trump sur Biden (46 contre 45% des intentions de vote). Patrick Basham, directeur de l’Institut, explique dans un entretien accordé à Forbes le 13 octobre 2020 qu’il n’est pas d’accord avec l’hypothèse de beaucoup de ses confrères selon laquelle la participation électorale pourrait augmenter de 25 à 30% par rejet de Trump. Cela voudrait dire une augmentation de 12 à 15 points, ce qui propulserait la participation à un taux jamais atteint depuis 1900 (au-dessus de 70%). Patrick Basham parie sur une participation équivalente à celle de 2016 (relativement élevée pour un contexte américain récent, à 55%). Et il pense que l’on sous-estime, dans la plupart des sondages, le nombre des intentions de vote pour Trump. En se fondant sur l’expérience du Brexit, où le Democracy Institute a correctement pronostiqué le résultat en identifiant le vivier des « shy Brexit voters », des électeurs n’osant pas se déclarer pour le Brexit dans la réponse à un institut de sondage et celle du vote Trump 2016, où ils ont appliquer la même méthodologie, les enquêtes d’opinion 2020 menées par l’Institut leur montrent un nombre plus important qu’en 2016 de « shy Trump voters », d’électeurs de Trump non déclarés. L’équipe de Patrick Basham, en effet, pose systématiquement des questions du genre: « Si vous étiez un électeur de Trump, en parleriez-vous autour de vous? Dans votre famille? A vos amis? A vos collègues de travail? Est-ce que vous mettriez un autocollant Trump sur votre voiture? En 2016, Trump a eu en moyenne 4 points au-dessus des chiffres de Real Clear Politics dans les Etats les plus disputés. Et Patrick Basham estime que le différentiel pourrait être, au niveau national, cette fois, de 5 à 6 points et, sans doute plus dans les Etats les plus disputés. 

« En simplifiant, nous voyons trois types d’électeurs cachés de Trump », explique Patrick Basham. Premièrement le col bleu d'âge intermédiaire, homme et blanc dans le Midwest rural.  Il n’a pas le temps de répondre aux enquêtes d’opinion. Deuxièmement les femmes blanches en banlieue. Troisièmement des électeurs afro-américains et hispaniques ». Le niveau des électeurs noirs qui s’apprête à voter Trump est, selon le Democracy Institute, confirmé par deux autres instituts (Emerson et Zogby), tous effectués début septembre, à 20% environ. Soit le double de 2016. John Zogby commente ce résultat - pas si étonnant vu la violence d’extrême gauche du printemps: « Un démocrate a besoin de 90% ou plus dans l’électorat noir, et d’une forte participation électorale. Doit-on penser que le discours de Trump sur la loi et l’ordre public atteint sa cible chez des électeurs noirs qui se demandent comment reprendre le contrôle sur les manifestations? ». Toujours selon le Democracy Institute, le soutien dans l’électorat hispanique passe de 28% en 2016 à 39% dans les intentions de vote de 2020. Là encore, il faudra expliquer comment certains instituts de sondage donnent à Biden une avance de plus de dix points dans les sondages alors que Trump mène 53 à 45 dans l’électorat blanc (tous ces termes sont utilisés selon la terminologie américaine).

Sommes-nous devant une majorité de sondages qui majoreraient d’environ cinq points les votes Biden en faisant le choix d’une participation très élevée des électeurs démocrates et qui sous-estimeraient Trump d’environ cinq points en ne trouvant pas les « shy Trump voters »? Cela amènerait Biden et Trump au coude à coude. Un tableau sans doute beaucoup plus proche de la réalité.  

Le match est serré. Et Trump a beaucoup de chances de l’emporter

Faire baisser, par rapport au calcul de Real Clear Politics, le score de Biden de 5 points pour l’ensemble des Etats, en tenant compte des sondages, minoritaires en nombre, mais méthodologiquement plus fouillés, amène à pronostiquer que Trump gagne l’Arizona (11 grands électeurs), l’Ohio (18), la Géorgie (16), la Floride (29), la Caroline du Nord (15). Cela fait un déplacement de 89 grands électeurs vers Trump. Cela fait tomber le Minnesota (10 grands électeurs), le Wisconsin (10), le Michigan (16), la Pennsylvanie (20) dans une zone très incertaine pour Biden puisqu’inférieure à la marge d’erreur. Et c’est exactement ce que reflète un autre institut de sondage, plus proche de la réalité que les autres en 2016 déjà, le Trafalgar Institute. Les derniers sondages de cet institut accordent 2,3% d’avance à Trump en Floride et 2,3 points de retard en Pennsylvanie. Le même institut voit le score se resserrer dans le Wisconsin et met Trump légèrement en tête dans le Michigan, tandis qu’il lui accorde plus de trois points d’avance dans l’Arizona et l’Ohio. Robert Cahaly président de l’Institut pronostique par conséquent, actuellement, une victoire serrée de Trump. Le calcul prudent que j’effectue moi-même au vu de toutes ces données me conduit à trouver 278 grands électeurs pour Trump, soit 8 au-dessus de la barre nécessaire. Robert Cahaly pense que le score pourrait être un peu plus élevé car, selon lui, on tend à sous-estimer encore plus en 2020 qu’en 2016 les électeurs non déclarés de Donald Trump (4 ans de Trump-bashing sans interruption dans les médias sont passés par là). 

Ajoutons que les affaires de corruption concernant Hunter Biden et la manière dont il aurait monnayé l’accès à son père quand ce dernier était vice-président, vont sans doute peser lourdement sur la fin de campagne. Il est bien vrai les GAFAM font tout pour contrôler les informations défavorables au parti démocrate et ont tâché de tuer les fils d’information dédiés à la corruption du clan Biden. Mais cela ne fait que renforcer le sentiment que les médias mainstream, beaucoup d’instituts de sondage et les experts refoulent une réalité susceptible de s’imposer. Donald Trump peut gagner l’élection présidentielle américaine en 2020. Sans sous-estimer les attaques quotidiennes contre l’état de droit et l’intimidation que font régner les défenseurs du vieux système Clinton-Bush-Obama, je pense pour ma part qu’il va gagner.  

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !