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Crise grecque : quand le gendarme du FMI considère que toute solution a été rendue impossible par aveuglement idéologique
©REUTERS/Alkis Konstantinidis

De quoi je me mêle ?

Six ans après son éclatement, la crise grecque n'est toujours pas résolue. Dans un récent rapport de l'Office indépendant d'évaluation du Fonds monétaire international, ce dernier a été pointé du doigt dans sa gestion de la crise grecque, accusé d'être intervenu non pas pour sauver l'économie grecque mais les banques européennes.

Guillaume Duval

Guillaume Duval

Guillaume Duval est rédacteur en chef du mensuel Alternatives économiques, auteur de La France ne sera plus jamais une grande puissance ? Tant mieux ! aux éditions La Découverte (2015) et de Made in Germanyle modèle allemand au-delà des mythes aux éditions du Seuil et de Marre de cette Europe-là ? Moi aussi... Conversations avec Régis Meyrand, Éditions Textuel, 2015.

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Atlantico : Un rapport de l’OIE (Office indépendant d’évaluation du Fonds monétaire international) pointe du doigt les erreurs commises par le FMI depuis six ans dans la gestion de la crise grecque. Quelles sont précisément ces erreurs  ?

Guillaume Duval : Ce rapport pointe surtout les erreurs commises au départ de l'action. Le FMI n'aurait pas dû s'engager dans cette affaire, essentiellement parce que la situation de la Grèce n'appelait pas les types de mesures proposées. Les règles du Fonds rendent normalement impossible son intervention compte tenu du fait que la dette grecque était trop importante; l'argent prêté n'aurait pas pu être remboursé. Or l'une des règles les plus strictes du FMI réside dans l'obligation pour les Etats de toujours rembourser le Fonds. Dans le cas de la Grèce, on peut dire que le FMI a commis une faute grave. A l'époque, DSK qui était directeur du Fonds, a fait modifié les critères d'intervention du FMI pour pouvoir prendre part à la gestion de la crise grecque. Il l'a fait d'une manière détournée auprès du Conseil d'administration du Fonds. 

Dans ce rapport, le FMI est non seulement accusé d’avoir commis une "erreur de jugement" mais également d’avoir cédé aux pressions européennes. L’ex-ministre des Finances grec, Yanis Varoufakis, a déclaré après avoir pris compte du rapport : "le FMI confesse avoir immolé la Grèce pour le compte de l’Eurogroupe". Dans quelle mesure cette déclaration est-elle vraie ? Les politiques d’austérité répondaient-elles à d’autres intérêts que le sauvetage de la Grèce ?

Le FMI est normalement réputé pour intervenir dans la gestion de crise financière dans les pays du Sud, notamment en Asie et en Afrique. L'intervention dans la crise grecque est donc particulière et répond à une forte pression qui a été exercée par les Européens, et plus particulièrement par les Allemands. Ces derniers n'avaient pas confiance dans les institutions européennes pour régler la crise grecque de manière ferme et souhaitaient donc avoir le Fonds à bord compte tenu de son savoir-faire. 

Le FMI est une instance internationale gérée depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale par des Européens, tandis que la direction de la Banque mondiale est constamment confiée depuis la même période à un Américain. Ces derniers temps d'ailleurs, en plus d'être Européens, les directeurs du FMI ont été des Français. Ils ont donc été particulièrement sensibles aux pressions des autres Européens. Avant même la crise grecque, cette domination européenne était remise en cause par les autres actionnaires du Fonds, et notamment les pays du Sud. La gestion de la crise grecque n'a fait que renforcer cette remise en cause. Ainsi, Varoufakis a raison dans sa déclaration : le Fonds était là pour aider les banques européennes à ne pas faire faillite du fait de ce qu'elles avaient prêté à la Grèce. 

Aujourd’hui, une majorité s’accorde pour dire que la crise grecque a été mal gérée. Est-il encore possible de résorber la situation ?

La mauvaise gestion de la crise grecque n'est pas imputable seulement au FMI, mais également et surtout à la BCE et à la Commission européenne, les deux autres partenaires de la Troïka. Le FMI, au contraire et malgré son implication, a tiré la sonnette d'alarme à plusieurs reprises comme on a pu le voir encore au printemps dernier. 

Pour rectifier le tir, il est urgent d'alléger de manière significative la dette grecque afin de la rendre soutenable. Jusqu'à présent, cela a été impossible à faire accepter à l'Allemagne, mais aussi aux autres pays d'Europe du Nord. Or tout le monde sait que c'est la seule issue possible. Mais plus on tarde à mettre en oeuvre cette solution, plus on aggrave les difficultés économiques de la Grèce et politiques au sein de la zone euro. 

Propos recueillis par Thomas Sila

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