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Covid-19 : les marchés financiers n’aiment pas que le Président de la Banque Centrale américaine leur disent de ne pas rêver et c’est en Amérique Latine que le virus se répand
©ADRIANA THOMASA CARBALLO / AFP

Quel futur ?

Jean-Paul Betbeze analyse et décrypte l'impact de la pandémie de coronavirus sur les marchés financiers, sur l'économie et les principales devises. Il évoque également la situation en Amérique Latine.

UE Bruxelles AFP

Jean-Paul Betbeze

Jean-Paul Betbeze est président de Betbeze Conseil SAS. Il a également  été Chef économiste et directeur des études économiques de Crédit Agricole SA jusqu'en 2012.

Il a notamment publié Crise une chance pour la France ; Crise : par ici la sortie ; 2012 : 100 jours pour défaire ou refaire la France, et en mars 2013 Si ça nous arrivait demain... (Plon). En 2016, il publie La Guerre des Mondialisations, aux éditions Economica et en 2017 "La France, ce malade imaginaire" chez le même éditeur.

Son site internet est le suivant : www.betbezeconseil.com

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140 000 nouveaux cas par jour dans le monde, en hausse constante. Bientôt 8 millions de cas et 450 000 morts. Chacun attend le calme, sinon l’arrêt de cette catastrophe humaine. Mais il ne faut pas rêver : le retour à la croissance antérieure n’aura pas lieu de sitôt en termes quantitatifs : la pandémie va peser longtemps sur l’activité et l’emploi, et moins encore en termes qualitatifs : le contenu des productions, donc des métiers, va changer.

1 - Quel futur ?

Pas de « rêve » ni de « croissance retrouvée », tout faire pour éviter de « dérailler », mais ne pas exclure une « croissance rabotée » : voilà ce qui entre, peu à peu, dans les esprits. Mais ce n’est pas facile. C’est bien pourquoi, aux États-Unis, la réduction violente et inattendue du chômage, à la fin du mois dernier, a d’abord été saluée par les marchés, sinon comme la fin de la pandémie, en tout cas comme l’idée que le pire était passé et qu’un retour à la normale se préparait. C’était entre « rêve » et « croissance retrouvée ». Ensuite les chiffres ont été analysés, montrant que la réduction du chômage avait surtout concerné les salariés peu payés de la restauration et de l’hôtellerie. C’était en fait, seulement, la conséquence mécanique des réouvertures, dans un pays qui ne connaît pas le chômage partiel. On a un emploi si le restaurant est ouvert, s’il ferme, on est licencié.

Le 10 juin, pour dissiper les illusions qui pouvaient demeurer, le Président Powell de la Banque Centrale Américaine (la Fed), a précisé la situation qu’il envisageait dans les mois à venir. D’un côté, il a bien dit que la FED achèterait sans limite les bons du trésor pour financer ainsi, sans problème, le déficit budgétaire, ensuite qu’il interviendrait davantage, pour que les banques fassent plus aisément crédit aux PME. Inutile donc de rêver à une reprise forte qui ramènerait l’économie américaine à la situation pré-COVID 19. Le taux de chômage à 3,5 % était la conséquence de 128 mois de reprise américaine continue, ce qui ne se reproduira pas de sitôt. L’emploi va repartir peu à peu, quand les entreprises verront leur situation s’améliorer, si et seulement si la demande et la confiance reviennent. Les emplois perdus ne seront pas tous retrouvés, en tout cas pas tout de suite, sachant que les entreprises vont changer leurs organisations. Il est vraisemblable qu’elles vont se simplifier, réduire leurs frais généraux et veiller à moins embaucher de cadres à salaires élevés.

Pas de rêve donc : penser plutôt « à une croissance rabotée ». Les bourses se sont donc reprises à penser aussi que la pandémie pouvait s’étendre, comme on le voit en Amérique Latine dans le graphique ci-dessous et/ou revenir de Chine, comme le message nous vient actuellement.

2 – Chercher le changement

Mais, avec l’idée que la croissance future sera durablement plus lente, vient celle que le NASDAQ est le vrai refuge économique. Les nouvelles technologies, l’Intelligence Artificielle et les distributions directes seront les gagnants de cette crise, plus réactifs, moins risqués.

3 – Ne pas dérailler

Dans cette perspective, les Banques Centrales sont là pour éviter que l’économie ne déraille. La FED achète toujours une part significative, de l’ordre du tiers, de la dette publique américaine, comme les autres Banques Centrales d’ailleurs, au Japon ou en zone euro. Partout, les taux d’intérêt à long terme sont donc très bas, sachant que l’inflation est partout, elle aussi, très basse. Ainsi les taux d’intérêt réels sont négatifs en zone euro, proches de zéro au Japon, mais de l’ordre de 0,6 % aux États-Unis et toujours élevés en Italie, malgré tout.


Les politiques monétaires rencontrent leurs limites face aux déficits budgétaires : il faut quand même offrir une rémunération positive aux Etats-Unis, la BCE en zone euro ne peut acheter plus qu’elle ne fait de dette italienne. Reconnaissons que l’Allemagne bénéficie aujourd’hui des efforts qu’elle a faits pour assainir depuis des années sa situation et de la qualité de son système productif. Et la France profite de sa position de deuxième économie de la zone pour « faire passer » le déficit de sa troisième loi de finance à 222 milliards d’euros, ce qui lui fera chercher de l’ordre de 360 milliards d’euros sur les marchés financiers.

4 – L’or, encore

Dans cette économie mondiale qui se fait dorénavant à l’idée que la reprise sera lente dans les pays les plus avancés et que des difficultés, voire pire, vont apparaître dans les pays émergents (pétroliers ou non), l’or continue d’être la valeur refuge. Les autres matières premières alimentaires sont toujours à la baisse et le pétrole ne parvient toujours pas à remonter. Même si l’OPEP+ (avec la Russie) s’engage à réduire encore plus, pendant un mois ou deux supplémentaires, sa production, c’est bien la faible demande de pétrole qui pèse, dans une économie mondiale convaincue qu’elle repartira plus lentement, en plus par ce temps de décarbonisation.

5 – Le dollar toujours, mais l’inquiétude est là, avec le Franc suisse (comme avec l’or)

Pas de surprise donc si le dollar est toujours la référence. L’idée d’une croissance plus lente, moins inflationniste, plus tendue, est partout. La livre souffre : chute d’activité, beaucoup de cas de virus, tensions politiques, Brexit...

Nasdaq et dollar côté reprise, or et Franc suisse côté sécurité : voilà le quatuor de ce temps.

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