Coronavirus : la Chine en profite pour donner des leçons d’efficacité au monde occidental <!-- --> | Atlantico.fr
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©NICOLAS ASFOURI / AFP

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Depuis quelques semaines, l'épidémie de coronavirus chinois prend de l'ampleur. Pour éradiquer ce fléau, la Chine a décidé de sortir les grands moyens. Le pays fait-il aussi cela pour montrer qu'il est en mesure de gérer les contraintes de la mondialisation ?

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Le président chinois a réagi fort pour enrayer les risques de contagion du Coronavirus. Objectif : montrer à l’Occident que Pékin est à la hauteur des contraintes de la mondialisation et saura assumer ses responsabilités. De là à faire l’éloge des régimes autoritaires pour gérer les catastrophes naturelles... il ne faut pas exagérer ! 

La vitesse et la puissance des réactions du gouvernement chinois ont sans doute rassuré les opinions publiques mais les ont aussi confortées dans l’idée qu’on était sans doute au bord d’une catastrophe mondiale. D‘où la situation extrêmement compliquée dans laquelle se retrouvent tous les gouvernements, sans exception. 

1er point : La planète des scientifiques ne sait pas grand chose du coronavirus. Sur son origine, sa vitesse de contamination, sa dangerosité... Ce qui explique grandement cette angoisse qui a envahi une grande partie de la population mondiale. On ne connaît très bien que la sévérité des mesures d’ordre public prises par le gouvernement pour empêcher ou freiner la contamination. On pourra toujours reprocher au gouvernement chinois de s‘être réveillé un peu tard, mais on ne pourra pas lui reprocher l’ampleur des mesures prises pour protéger la population et confiner les zones à risques. Les dirigeants chinois ont quand même décidé de mettre en quarantaine plus de 55 millions d’habitants, ce qui ne s’était jamais vu. Sans parler des travaux immédiatement engagés pour construire des hôpitaux et désenclaver le système de santé chinois complètement asphyxié. 

2e point : la planète économique et les marchés ont immédiatement considéré que cette épidémie aurait des effets économiques extrêmement graves sur l’activité chinoise et au delà, sur la croissance mondiale. Le dernier exemple mondial remonte à 2004 avec l‘épidémie de SRAS. A l’époque, ce virus grippal a bloqué l’activité économique chinoise mais le PIB chinois ne représentait que 1300 milliards de dollars. La croissance de 10% était impressionnante mais le poids de la chine restait marginal. Aujourd’hui, le PIB chinois dépasse les 14 milliards de dollars avec une croissance ralentie certes à 6 %, mais cette croissance représente près de 60 % de la croissance mondiale. La Chine est donc la locomotive du monde. Le coronavirus est arrivé en pleines festivités du nouvel an chinois, une période qui, en Chine représente pour les Chinois la période de consommation la plus frénétique. C’est l’époque où les ateliers tournent à plein régime et où les magasins, les avions et les hôtels ne désemplissent pas. 

Pas étonnant que l’activité touristique, le transport aérien, le secteur du luxe, l’automobile et tous les services de logistique internationale se sont retrouvés à l’arrêt ou presque. D’où la chute du prix mondial du pétrole, et la baisse brutale des grands marchés financiers. 

La Chine était déjà en difficulté pour cause de coup de frein sur le commerce mondial, elle va se retrouver à l’arrêt à ce moment là, l’onde de choc va toucher tous les continents. 

3e point, la planète politique a compris très vite quels pouvaient être les effets de cette catastrophe naturelle sur les rapports de force géopolitique. Donald Trump, qui a avait déjà décidé de négocier un armistice avec la Chine sur le front de la guerre commerciale, a très vite compris que l’économie américaine n’était pas immunisée contre l’impact d’un effondrement de l’économie chinoise. Il a donc très vite assuré le gouvernement chinois de son soutien. Les Tweets ont changé de ton. 

Ce qui est intéressant, c’est que le président chinois a compris tout le parti qu’il pouvait en tirer. Sa communication est étonnante. Il a repris tous les codes de la communication occidentale en marquant sa volonté de garantir la transparence la plus grande avec ce qui se passe chez lui. Il détaille donc tous les jours l’état des lieux, il détaille les mesures prises et comme toutes ces mesures sont spectaculaires, elles sont impressionnantes. Elles sont adressées à l'opinion chinoise mais aussi à l'opinion internationale. Et là, c’est assez nouveau. 

Les sinologues y voient, au moins trois messages qu‘il ne faut pas sous-estimer.

D’abord, le président chinois souligne que la mondialisation est certes fondée sur la concurrence des marchés, mais la mondialisation appelle aussi une coopération et donc une solidarité internationale pour gérer les catastrophes naturelles. Aucun pays ne peut ériger des murs pour se protéger d’un virus mortel d‘où qu’il vienne. 

Ensuite, la mondialisation, la richesse des échanges et la croissance mondiale n’accroissent pas les risques d’épidémie. Il faut reconnaître que le monde a réussi a éradiqué la plus part des grandes épidémies qu‘étaient la peste, le choléra, la grippe espagnole, la variole, la tuberculose. L’enrichissement des nations est le premier remède à la maladie contagieuse. 

Enfin, le troisième message du président Xi Jinping  est sans doute plus subliminal mais on le bien décode dans toutes les grandes chancelleries. Le soin avec lequel le président chinois a détaillé les réponses qu’il faire au risque de pandémie, l’ampleur du confinement qui concerne une population de 55 millions d’habitants, l’ampleur des travaux d’équipements hospitaliers, cette inflation d’informations est évidemment destinée à montrer l’efficience chinoise, démontrer son efficacité dans la mise en œuvre des décisions techniques. « J‘ai décidé de confiner 55 millions de Chinois et j’ai été immédiatement obéi » dit en substance le prédirent chinois. Personne ne vient critiquer ou contester ces décisions. 

Exposer ainsi la méthode chinoise revient en creux à dire deux choses et cette fois à l’adresse des Occidentaux. D’abord, est-on sur que nous serions capables de mettre œuvre autant d’expertise dans nos systèmes de décision très décentralisés et démocratiques? Ensuite, au regard de la gravité et de l’ampleur du chantier, les Chinois se permettent  de dire à demi mot que les leçons de « droits de l’homme » , les revendications démocratiques qui leur sont faites de temps à autre, ne sont pas forcément les bienvenues dans le contexte actuel. Donald Trump a très bien reçu ce message. 

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