Corbeille empoisonnée : les fruits les plus susceptibles de contenir le plus de pesticides <!-- --> | Atlantico.fr
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Les fraises font partie des fuits les plus traités.
Les fraises font partie des fuits les plus traités.
©Reuters

Comme un goût de...

Tous les fruits et légumes ne sont pas logés à la même enseigne lorsque vient le moment de les traiter aux pesticides. Voici ceux qui en contiennent le plus.

Jean-François Narbonne

Jean-François Narbonne

Jean-François Narbonne est l'un des experts de l'ANSES, l'Agence nationale de sécurité sanitaire, professeur de Toxicologie, expert pour l’affaire du Chlordécone.

Il est par ailleurs professeur à l'Université de Bordeaux 1 et docteur en nutrition.

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Atlantico : L'Environmental Working Group, un groupe de recherche environnementale américain, vient de publier sa liste annuelle des douze fruits et légumes qui contiennent le plus de pesticides. En tête se trouve la pomme. En va-t-il de même en France ? Quel est le produit le plus saturé chez nous, et pour quelles raisons ?

Jean-François Narbonne :  La pomme est le végétal qui nécessite le plus de traitements, au moins une vingtaine. En général c’est l’arboriculture qui en nécessite le plus ; et on trouve aussi le raisin d’importation. De plus, les pommes subissent des traitements de conservation post récolte. Cependant il ne faut pas confondre les végétaux où on retrouve le plus grand nombre de résidus (dû au nombre de traitements) et ceux qui ont des niveaux élevés de résidus avec des probabilités de dépassement des limites maximales de résidus (LMR).

De manière générale, comment expliquer que certains fruits et légumes soient plus contaminés que d'autres ? Quels sont les critères qui entrent en jeu ?

Comme indiqué plus haut ce sont les végétaux qui subissent le plus de traitements (en général les fruits comme les fraises, les cerises ou les raisins, en plus des pommes et des poires). Pour les dépassements de LMR en France on trouve historiquement les salades sous serre, et en termes de présence on trouve d’autres produits sous serre : tomates et carottes. Peuvent se rajouter les produits de conservation post récolte.

Certains pesticides, en France et dans les pays d'import, bien qu'interdits se retrouvent-ils tout de même dans nos fruits et légumes ? Les contrôles en la matière sont-ils suffisants ?

Comme indiqué dans les plans de contrôle et de surveillance les produits d’importation non conformes sont plus présents que les végétaux cultivés en France. Ces produits non conformes se trouvent souvent dans les produits d’importation bas de gamme. Aujourd’hui la grande distribution impose à ses fournisseurs étrangers des cahiers des charges limitant l’usage des pesticides dans des conditions correspondants à la réglementation européenne. Par exemple au Maroc, les tomates sont produites spécifiquement pour l’Europe ou pour la Russie, les produits non conformes ne sont pas exportés et sont vendus sur le marché local !

Evidemment les contrôles sont insuffisants pour les importations hors cahier des charges où les contrôles sont faits par le donneur d’ordre (par exemple en grande distribution). Il faut savoir que la réduction des fonctionnaires a entraîné la fermeture de la majorité des laboratoires de contrôle public et que dans les labos restants le département pesticide a pu être supprimé (par exemple à Bordeaux, où le département pesticides a été supprimé pour économiser 2 postes de fonctionnaires).

Enfin on peut retrouver des produits non autorisés ou non homologués pour la culture concernée. Il s’agit souvent de dérogations (une cinquantaine par an) données par le Ministère pour des situations d’urgence pour sauver les récoltes du fait d’attaques de parasites particulièrement intenses (des aléas climatiques, par exemple) ou du fait d’une absence de traitements autorisés vu la restriction drastique des traitements autorisés au cours des 10 dernières années (on est passé de 1300 substances actives à 450 au niveau européen).

 Quels sont les risques pour le consommateur liés à un excès de pesticides ? 

Pour les consommateurs il n’y a pas de risques long terme (dépassement de la dose journalière tolérable). Même s’il peut y avoir un faible pourcentage de dépassement de l’ARfD (limite de sécurité à court terme) les dépassements sont de faible intensité et peu susceptibles d’induire des troubles. Ces troubles cliniques sont apparus en cas de consommation de lots très contaminés dus à des usages relevant de la fraude caractérisée ou comme ce fut le cas au Maroc il y a quelques années, de consommation clandestine de lots qui avaient été mis sous séquestre pour forte contamination. Dans ce cas les troubles sont essentiellement des troubles neurotoxiques avec maux de tête, vomissements, crampes... En fait, les troubles notés chez les agriculteurs en cas de forte exposition.

Existe-t-il un moyen de savoir si le fruit ou le légume que l'on s'apprête à manger est infesté de pesticides ? Quelles sont vos recommandations ? 

Les produits ne sont pas infestés (terme réservé aux risques biologiques). Ils peuvent être contaminés. S’ils sont sur le marché, ils sont à priori conformes et donc sans risques pour le consommateur. Les probabilités de non conformités sont plus élevées pour les produits low cost, les produits de saison et de proximité ont moins, ou pas du tout de traitements post récolte de conservation. Et enfin, les produits bio ont beaucoup moins de résidus, et leur consommation  peut réduire d’un facteur de 6 à 10 l’exposition. Par contre ils sont plus fragiles et doivent être consommés rapidement et peuvent contenir plus de mycotoxines.

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