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Comment la courbe du chômage vient de se ré-inverser à la hausse et pourquoi ça risque de durer
©Reuters

Ça va pas mieux

Le nombre de demandeurs d’emploi toutes catégories confondues s’établit à 5.428.300 personnes en métropole, soit 31.300 inscrits supplémentaires par rapport au mois précédent (+0,56%), et 22.000 personnes de plus sur un an (+0,4%). Une hausse après deux mois de baisse qui n'annonce rien de bon.

Pierre-François Gouiffès

Pierre-François Gouiffès

Pierre-François Gouiffès est maître de conférences à Sciences Po (gestion publique & économie politique). Il a notamment publié Réformes: mission impossible ? (Documentation française, 2010), L’âge d’or des déficits, 40 ans de politique budgétaire française (Documentation française, 2013). et récemment Le Logement en France (Economica, 2017). Il tient un blog sur pfgouiffes.net.
 

Vous pouvez également suivre Pierre-François Gouiffès sur Twitter

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Atlantico :  Selon les données publiées ce vendredi 24 juin, le chômage est reparti à la hausse pour le mois de mai 2016, avec un total de 9 200 chômeurs de plus en catégorie A, ou de 54 300 chômeurs de plus toutes catégories confondues. Quelles sont les causes de cette hausse ?

Pierre-François Gouiffès : Le mois de mai 2016 brise la tendance baissière observée en mars et avril avec une augmentation de 9 200 demandeurs d’emploi en fin de mois sans aucune activité (DEFM A, +0,3 % en un mois) et de 31 300 demandeurs d’emploi avec activité réduite (DEFM ABC, +0,6 %). Il n’y aura donc pas à fin mai trois mois consécutifs de baisse, une situation qui ne s’est pas produite en France depuis plus de huit ans et la crise financière de l’automne 2008 : février 2008 pour les DEFM A et avril 2008 pour les ABC. Depuis cette date le nombre de chômeurs a été multiplié par 1,7 dans notre pays ! Depuis le début du quinquennat de François Hollande, on est dans une hausse à +20/25 %.

La période actuelle n’est donc pas celle d’une inversion claire et indiscutable du chômage mais encore celle de la stabilisation du chômage à un niveau très élevé, puisque sur un an et depuis mai 2015, on se situe dans une zone -1 %/+ 1 % en fonction des différentes catégories de demandeurs d’emploi.

Une explication de la hausse de mai concerne un niveau élevé de réinscriptions sur les listes de Pôle Emploi à la suite du niveau particulièrement important des sorties pour défauts d’actualisation constaté le mois précédent. Il y aurait donc un effet de vases communicants entre les mois de mai et avril.

La question qui vient ensuite au regard de la politisation extrême des chiffres du chômage concerne l’impact ou non pour ces chiffres décevants pour l’exécutif des perturbations de la société et de l’économie du fait des blocages et grèves en lien avec le projet de loi travail.

Rappelons toutefois qu’Il y a un certain niveau de risque à commenter les statistiques mensuelles et de toute façon c’est la tendance de moyen terme qui compte.

Malgré une baisse très forte des cessations d'inscription pour défaut d'actualisation, les sorties constatées des chiffres de pôle emploi font état d'une hausse de plus de 32 % d'entrées en stage (77 900), alors que le mois précédent affichait déjà un seuil record. Comment expliquer un tel nombre de sorties au travers de "stages" ? Peut on constater d'autres anomalies dans les chiffres publiés ?

La proportion d’entrées en stages est en effet particulièrement élevée sur les deux derniers mois avec un plus haut historique constatée en mai. Ils représentent en effet 12 % des sorties contre 8% par exemple en moyenne sur l’année 2012, une augmentation de 50 %.

On retrouve un effet corrélatif avec l’augmentation de la catégorie D (demandeurs d’emploi non tenus de rechercher un emploi en raison d’une formation, d’une maladie…) dont le nombre a augmenté de 8% depuis le début de l’année et de 5% sur le seul mois de mai. Il y a un lien avec le « plan 500.000 formations pour les chômeurs » décidé en janvier par François Hollande.

Cette catégorie D représente l’avantage de fixe moins le regard médiatique que la catégorie A ou la somme A+B+C. La question de fond posée par les entrées en stage ou l’augmentation de la catégorie D tient à savoir si le passage en stage conduit à un retour durable vers l’emploi ou le retour vers le chômage et pose donc la question du traitement statistiques du chômage.

Au regard de ces résultats, comment interpréter le "ça va mieux" de François Hollande ? Est il remis en cause ? Le 23 juin, l'INSEE, mais également l'institut Markit, pointaient une "rechute" de l'économie française pour le mois de juin. Peut on en déduire que l'inversion de la courbe du chômage s'est à nouveau renversée ?

Les chiffres de mai ne valident pas le discours de l’exécutif sur l'amélioration de la situation économique à la base de sa communication politique. La situation a certes clairement arrêté de se dégrader mais on n’a pas encore une tendance claire pour l’avenir.

D’un côté l’INSEE prévoit une légère baisse du taux de chômage (9,5% fin 2016 contre 9,9% aujourd’hui) avec – enfin - des créations nettes d’emplois dans le secteur marchand. De l’autre le moral des entrepreneurs repart à la baisse en juin selon les deux études convergentes (INSEE et Markit).

On reste donc dans un champ de reprise économique modérée faisant suite à une période particulièrement longue de quasi-stagnation économique pour la France (0,4% de croissance moyenne en volume depuis 2008, avant le 1,5 prévue cette année) dont on peut espérer une amélioration de la situation de l’emploi mais probablement pas une inflexion majeure.

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