Caries, problèmes de dos... : non, l'évolution n'a pas que du bon<!-- --> | Atlantico.fr
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Les caries sont apparues il y a à peine 6 000 ans.
Les caries sont apparues il y a à peine 6 000 ans.
©Reuters

Evolution perpétuelle

L'homme moderne n'a rien à voir avec l'homme de Neandertal. Dans sa morphologie, au niveau de son intellect et de son comportement, les évolutions sont multiples. Cinquième et dernier volet de notre série "Evolution perpétuelle".

Marie-Antoinette  de Lumley

Marie-Antoinette de Lumley

Marie-Antoinette de Lumley est paléoanthropologue, membre de l’Institut de Paléontologie Humaine.

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Atlantico : L’évolution humaine va-t-elle nécessairement vers un mieux ? Comporte-t-elle des effets pervers, dont l’espèce humaine se serait bien passée ?

Marie-Antoinette de Lumley : L’aspect morphologique de l’homme est très évolutif. Son corps a beaucoup changé au fil du temps, il s'est développé. Cela se constate tout d’abord par une réduction de nos dents. Celles-ci deviennent de moins en moins robustes notamment parce qu’on mastique moins qu’à l'époque préhistorique où les hommes mâchaient même de la viande crue. A mon sens, ce phénomène peut être rangé du côté des aspects négatifs. Les dents deviennent plus petites, la mâchoire devient plus courte, les dents se chevauchent les unes sur les autres… Ces problèmes, les hommes préhistoriques ne les connaissaient pas. Ils avaient des dents de très bonne qualité. Par exemple, les caries sont un phénomène très moderne. Elles sont apparues il y a très peu de temps. A peine 6 000 ans. Au cours des différentes études que j’ai pu mener, je n’ai jamais vu une carie sur un homme préhistorique. C’est au moment où l’homme est devenu sédentaire qu’elles sont apparues. Elles sont la conséquence de l’alimentation humaine. L’homme a commencé à manger des céréales, à avoir une alimentation beaucoup plus sucrée. Dès lors, les caries ont fait leur apparition. Mais l’évolution humaine est telle que désormais les enfants recommencent à avoir de moins en moins de caries.

Une autre partie du corps humain a beaucoup changé à travers les siècles : la colonne vertébrale. On observe actuellement beaucoup de colonnes vertébrales en excroissance ou avec un certain  nombre de traumatismes. Cela peut être la conséquence de l’activité pratiquée. Par exemple, un homme qui travaille sur un chantier et qui se sert régulièrement d’un marteau-piqueur ou d’un engin de ce type aura plus de problème de dos. En effet, les nombreuses secousses et autres vibrations ressenties entraîneront des altérations et une surcroissance osseuse. Alors que l’homme préhistorique marchait sur ses membres inférieurs et n’avait donc pas ce problème-là.

En revanche, côté positif, la mortalité infantile était très importante à l’ère préhistorique. De ce point de vue, l’évolution est incontestable. Chez les hommes préhistoriques, on constate, sans pouvoir encore totalement l’expliquer à l’heure actuelle, que les enfants mouraient beaucoup vers 9-10 ans. En cause, les maladies infantiles comme la rougeole. Un autre taux de mortalité élevé se trouve au niveau de la tranche d’âge de 30-35 ans. Et chez les femmes, on constate une mortalité élevée entre 20 et 30 ans. Ce qui est certainement dû à des problèmes d’accouchement. Chez les Néandertaliens, on vivait en moyenne jusqu’à 40 ans. Désormais on ne compte plus le nombre de centenaires. De ce côté-là aussi le changement est impressionnant.

D’après le généticien Gerald Crabtree, de l’université de Stanford, l’homme aurait atteint son pic d’intelligence il y a plusieurs milliers d’années. Depuis, elle n’aurait fait que décliner. Cette hypothèse se vérifie-t-elle ? Pourquoi ?

L’hypothèse de ce généticien est difficile à démontrer. Tout dépend ce que l’on appelle intelligence. Mais comment peut-il comparer l’intelligence d’un homme de Neandertal avec celle d’un homme moderne ? Les situations sont incomparables, ce n’est pas le même domaine. Les hommes préhistoriques vivaient dans la nature et en harmonie avec celle-ci. Ils étaient obligés de s’organiser, de s’adapter aux conditions extérieures. A n’en pas douter, c’est faire preuve d’une forme d’intelligence. Il fallait qu’ils trouvent des solutions à différents problèmes, qu’ils s’organisent pour survivre. Mais on ne peut pas la comparer avec l'intelligence d'un mathématicien qui va trouver une formule pour résoudre un problème. Ce n'est pas du tout la même chose.

Le fait que les hommes aient segmenté leurs compétences en métiers les a-t-il rendus plus fragiles ? Aujourd'hui, un homme livré à lui-même est-il plus exposé que ne l'étaient ses ancêtres ?

Peut-être. Il y a des hommes qui ont fait l’expérience de vivre comme des hommes préhistoriques et qui s’en sont sortis. Mais en règle générale, je pense que le citadin n’est pas adapté pour vivre dans la nature. Cela demande une certaine forme d’entraînement. Naturellement, nous sommes plus fragiles. Nous sommes moins résistants aux températures extrêmes. A moins de vivre dans des pays où le climat est régulièrement froid ou chaud, l’homme a alors du mal à s’adapter. L’homme moderne à plus de mal à s’adapter à son environnement que l’homme préhistorique.

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