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Quand la Caisse des dépôts était accusée de fournir un soutien logistique... aux djiha­distes en Syrie
©REUTERS/Stringer

Bonnes feuilles

C'est votre argent. Des dizaines de milliards d'euros qu'ils gèrent avec le souci constant... de leur propre intérêt. Notes de frais, voitures de fonction, salaires ahurissants, primes en tous genres, honoraires mirobolants... Et quand ce n'est pas directement eux, ce sont les amis du régime qui en profitent. Eux, ce sont les responsables de la Caisse des Dépôts et Consignations, le dernier trésor de la République. Extrait de "La Caisse. Enquête sur le coffre-fort des Français" de Sophie Coignard et Romain Gubert, aux Editions du Seuil (2/2).

Sophie Coignard

Sophie Coignard

Sophie Coignard, journaliste au Point, est l'auteur de nombreux ouvrages dont L'omerta française ou Michelle Obama, l'icône fragile.

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Romain Gubert

Romain Gubert

Romain Gubart est journaliste au Point, et l'auteur de nombreux ouvrages dont L'omerta française ou Michelle Obama, l'icône fragile.

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À la Caisse des dépôts, ce n’est pas tous les jours que l’on a les honneurs du Spiegel. Mais ce 4 décembre 2015, Pierre-René Lemas aurait préféré se passer de la lecture de ce très sérieux magazine allemand. Car ce n’est pas pour les belles performances économiques que sa vénérable maison y est citée. L’article est consacré aux entreprises européennes qui aident… Daech. La Caisse est accusée de fournir un soutien logistique – certes indirectement ! – aux djiha­distes en Syrie via Eutelsat, une entreprise spécialisée dans les transmissions satellites dont elle possède un peu plus de 25 % du capital. Les journalistes du Spiegel racontent comment les plus hauts responsables de l’État islamique utilisent les services d’Eutelsat (ainsi que ceux d’autres fournisseurs de téléphones satellites occidentaux) pour leurs communications grâce à plusieurs revendeurs de matériel installés en Turquie, de l’autre côté de la frontière syrienne.

Daech, Kadhafi et Bachar

Deux phrases des journalistes sont particulièrement embarrassantes. « Si elles le voulaient, les compagnies de  téléphone satellitaires pourraient couper à tout moment les services utilisés par Daech. » Cette situation est « particulièrement inconfortable pour le gouvernement français qui détient un quart de l’opérateur à travers la Caisse des dépôts, un établissement public ». Trois semaines après les attentats du Bataclan, ces accusations sont rapidement relayées par des centaines de sites internet dans le monde entier. Quant aux dénégations des responsables d’Eutelsat, qui expliquent qu’ils n’ont évidemment jamais fourni sciemment d’abonnement à des cadres de Daech, elles sont presque inaudibles.

Ce n’est pas la première fois que la CDC se retrouve indirectement éclaboussée par les agissements d’entre­prises dont elle détient des actions ou qu’elle aide finan­cièrement. Au début des révolutions arabes de 2011, elle a été pointée du doigt pour ses participations dans des PME qui ont fait quelques bonnes affaires avec les pires dictatures. Qosmos et Amesys, sociétés dans lesquelles le FSI (Fonds stratégique d’investissement), filiale de la CDC, était entré au capital, fournissaient des logiciels permettant de surveiller les contenus internet et les mails d’opposants à la Syrie de Bachar el-Assad, ainsi qu’à la Libye de Mouammar Kadhafi, et de tout connaître de leurs faits et gestes. Comme dans l’« affaire Eutelsat », la presse n’a pas manqué de souligner la présence du coffre-fort des Français dans le tour de table de ces start-up.

Voilà qui fait un peu désordre dans les couloirs de la rue de Lille où, jusque-là, on se flattait de bien connaître Kadhafi, mais seulement pour de nobles motifs. En 2004, la Caisse a en effet détaché l’un de ses cadres les plus brillants à Tripoli pour mettre au point le protocole d’accord entre la fondation du dictateur libyen et les familles des victimes de l’attentat contre le vol UTA de septembre 1989 (il avait fait 170 morts dont 54 Français). La Caisse des dépôts avait été chargée par Jacques Chirac, alors à l’Élysée, de récupérer un peu plus de 400 millions de dollars de la Fondation Kadhafi pour les redistribuer équitablement aux victimes. Une opération qui a permis au dictateur de mettre fin à l’embargo international contre son pays.

Extrait de La Caisse. Enquête sur le coffre-fort des Français de Sophie Coignard et Romain Gubert, aux Editions du Seuil.

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