Brexit à J-4 : Boris Johnson doit tout changer pour que rien ne bouge<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Atlantico business
Boris Johnson
Boris Johnson
©Darren Staples / Reuters

Atlantico Business

Vendredi 31 janvier à 23 heures, le Royaume-Uni sera sorti de l’Union européenne. Boris Johnson fêtera une victoire et va entrer en négociation avec l’UE pour tout changer. Un marathon pour éviter les dégâts.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

Voir la bio »

La phase la plus dangereuse du Brexit commence vendredi à 23 heures. Ce jour-là, le gouvernement, après avoir éteint les feux d’artifice qui auront fêté cette victoire historique, s’engagera dans un marathon d’un an  minimum afin de fixer avec l’Union européenne, les modalités concrètes du Brexit. 

Dans les 4 jours qui viennent, le Royaume-Uni ne va pas lésiner sur les festivités du divorce. Dans la plupart des grandes villes britanniques, le gouvernement a suggéré de tirer des feux d’artifice, d’organiser des concerts publics et des réunions qui seront évidemment très arrosées, le vin chaud et la bière vont donc couler à flot. 

A Londres, une énorme horloge lumineuse sera projetée sur Downing Street pour marquer le compte à rebours, avant de passer dans une nouvelle ère de l’histoire. Et partout dans les pubs de la capitale, on devrait faire la fête mais de l’avis de tous ceux qui connaissent bien le moral british, cette fête n’aura pas la chaleur ni même la frénésie d’un nouvel an. On ne s’attend pas sur Piccadilly Circus, à ce que la foule se noie dans une grande liesse populaire. Les uns ont déjà tellement attendu cette heure qu’ils en sont fatigués, les autres sont tellement déçus qu’ils en sont désabusés.

Le Premier ministre lui-même, Boris Johnson qui pourrait être le grand vainqueur de cette opération, a tout fait pour freiner l’enthousiasme de ces amis, les hard Brexiters. Quant aux manifestations publiques, il n’ y aura donc pas de nuit blanche et de débauche de réceptions arrosées aux champagne français qui reste à Londres le symbole absolu de la fête. Les ambassades étrangers ont reçu consigne de célébrer cet évènement de façon la plus soft qu’il soit. Les raisons de cette modestie sont très diverses.

D’abord, parce que Boris Johnson qui s’est pourtant battu pour réaliser le Brexit, en avait surtout fait un levier politique personnel. Il n ‘a jamais fait parti des hard-Brexiters  durs et purs, il doit donc modérer ceux qui veulent couper les ponts complètement.

Ensuite, parce qu‘après avoir réussi à conquérir le pouvoir, Boris Johnson a bien l’intention de le garder et pour le garder, il lui faut négocier un divorce avec l’Union européenne qui préserve l’équilibre et le développement de la Grande Bretagne. 

Boris Johnson sait que la Grande Bretagne avait besoin pour des raisons purement politiques de provoquer ce Brexit, mais il sait aussi que pour des raisons économiques, la Grande Bretagne a besoin de protéger des liens particuliers avec l’Union Européenne. A la limite, le beurre de l’UE et l’argent du beurre, même s’il sait bien que les Européens ne le lui permettront pas, il va essayer. Il n’a pas d’autres solutions. Il pouvait espérer passer un accord avec les Etats-Unis mais il se coupait complètement de l’Europe. Il pouvait aussi comme les milieux financiers le lui suggérait, transformer la Grande Bretagne en un vaste paradis fiscal dédié au blanchiment de l’argent Offshore, bref devenir un Singapour de l’Occident. Le rêve des leaders anglais de la City se transformerait en cauchemar pour les Européens qui auraient refusé violemment la création d’une telle zone franche à leurs portes. 

Boris Johnson va donc lancer le départ d’un grand marathon pour négocier les modalités de la future relation avec l‘Union Européenne. Tout est à faire, parce que rien n’a été fait. Et l’objectif de la négociation est claire: ne rien bouleverser dans un système qui, actuellement et les Anglais le reconnaissent, profite à tout le monde. Dans ces conditions, la configuration des modalités de la future relation  entre la Grande-Bretagne et l’Union européenne  reprendrait les grandes lignes de l’accord qui avait été négocié par Theresa May avec Bruxelles. 

1er point, préserver les conditions du grand marché :  liberté de circulation de produits, des services et des capitaux. 

2e point, respect des conditions d’accès en Europe des produits britanniques dans le domaine des normes sanitaires, sociales et fiscales. Lesquelles normes étant celles de l’Europe. 

3e point, maintien du statut-quo concernant les résidents européens en Grande Bretagne et réciproquement. 

Alors en dehors de ces deux axes, Boris Johnson a évidemment beaucoup d’autres détails à régler comme la question irlandaise ou les conditions de négociations bilatérales de la Grande Bretagne. 
Alors ça ne va pas être facile. L’objectif de Boris Johnson est de maintenir un lien fort avec l’Union européenne pour préserver le volume d’échange parce que la Grande Bretagne est dans beaucoup de secteurs très dépendante de ses fournisseurs européens (dans la pharmacie , la mécanique , l’agro-alimentaire par exemple ).

A la date du 31 janvier, Brexit officiel, les procédures légales permettront d’engager la négociation. La Reine a promulgué le texte qui fait entre dans la loi britannique, l’accord du Brexit conclu en Octobre. Demain, Mercredi, c’est le parlement européen qui va ratifier le traité de Brexit. Et Vendredi 31, ce traité validé à Bruxelles et à Londres entrera en vigueur. Mais rien ne changera concrètement parce que le divorce prévoit une période de transition jusqu’au 31 décembre, période pendant laquelle les relations entre la Grande-Bretagne resteront inchangées. 

En revanche, les représentants britanniques ne pourront plus siéger, dans les institutions européennes, ni intervenir. 

Le 1er février, Boris Johnson affirme qu’il démarre les négociations commerciales. Politiquement il va dire une fois de plus qu’il souhaite aboutir à un accord de libre échange identique à celui qui a été signé entre l’Union européenne et le Canada. Ce qui lui permettrait de dire à ses électeurs qu’il ne s’alignerait pas sur les règles européennes. Sauf que l’accord UE Canada est fondé sur le respect des normes européennes. 

Au delà du commerce, Londres doit aussi se caler sur les normes de sécurité ( défense ), adhérer à la coopération judiciaire, coordonner les systèmes éducatifs et de santé. 

Dans beaucoup de domaines, les négociations seront compliquées. C’est pourquoi, la Grande Bretagne et l'Union européenne peuvent décider de prolonger la période de transition au delà du 31 décembre pour une ou deux années supplémentaires. 

Au 1er juillet 2020, les Anglais peuvent décider de prolonger la période de transition mais ils doivent en informer l’Union Européenne. Boris Johnson a toujours dit qu'il n’utiliserait pas cette liberté d’extension. Mais les Européens estiment aujourd’hui que ce sera sans doute nécessaire. 

Le 31 décembre 2020, la période de transition sera terminée si la Grande Bretagne n’a pas demandé de prolonger cette période, ce qu’elle peut faire et veut faire. 

Ce jour là, le Brexit sera effectif et saura, si au terme du grand changement, tout ce qui avait été construit depuis 47 ans sera bougé ou pas.  

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !