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Prévisions de croissance en baisse
de la BCE : mais où va la zone euro ?
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Europe du futur

Le président de la BCE s'est montré confiant sur la mise en route du Pacte budgétaire européen dans une conférence de presse donnée jeudi. Le même jour, la BCE a abaissé une nouvelle fois sa prévision de croissance pour 2012. A quel saint se vouer pour l'avenir européen ?

Frédéric Bonnevay

Frédéric Bonnevay

Frédéric Bonnevay est Associé d’Anthera Partners. Il conseille des institutions financières en Europe et au Moyen-Orient.

Il est notamment l'auteur de l'étude Pour un Eurobond - Une stratégie coordonnée pour sortir de la crise (Février 2010, Institut Montaigne).

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Atlantico : Mario Draghi, président de la Banque centrale européenne s'est montré confiant sur l'adoption et la mise en route du Pacte budgétaire européen dans une conférence de presse donnée jeudi. Le même jour, la BCE a abaissé une nouvelle fois sa prévision de croissance pour 2012 (entre - 0,5% et + 0,3%). Dans ces conditions, faut-il partager l'optimisme de Mario Draghi quant à l'avenir de l'Europe ?

Frédéric Bonnevay : Mario Draghi a des raisons bien réelles d’être confiant : la zone euro, depuis deux ans, aurait pu imploser à de nombreuses reprises. Elle a su conserver, malgré tout, sa géométrie initiale, et aucun membre n’est encore sorti du groupe.

Le scenario du statu quo est devenu le plus probable : maintien d’un équilibre institutionnel, et respect des engagements de consolidation budgétaire, au moins par les pays les moins touchés, au prix d’une croissance atone et d’un regain durable d’inflation.

L’optimisme, par ailleurs, est avant tout question de volonté, paraît-il. Il appartient au président de la BCE d’afficher sa confiance dans la capacité de sa propre politique à atteindre les objectifs qu’il lui a fixés : comment, sans cela, ladite politique pourrait-elle être efficace ?

Pour bénéficier de l'aide versée au titre du Mécanisme Européen de Stabilité, les États membres devront adopter au-préalable le Pacte budgétaire. L'intégration européenne à "marche forcée" souhaitée par l'Allemagne risque-t-elle de diviser durablement l'Europe ?

Cette pleine intégration a toujours été le « point oméga » de la construction européenne. La tourmente que traversent les 27 vient avant tout du fait qu’ils l’avaient perdu de vue, considérant l’édifice achevé, alors même qu’il reposait sur un unique pilier monétaire, fragilisé par l’absence d’un étai (en marine, câble qui maintient le mât) budgétaire et d’une clé de voûte politique.

La crise de crédit a mis cette absence au grand jour. Son mérite est de placer aujourd’hui nos dirigeants devant un choix simple, binaire : la pleine intégration – par étapes, certes, mais sans plus d’atermoiements –, ou le délitement, dont un affaissement de toutes les économies européennes serait l’inéluctable conséquence.

Il faut donc sans plus tarder délimiter le périmètre d’une Europe économique et politique fonctionnelle, et se lancer dans sa reconstruction.

Mario Draghi a "confiance sur le fait que le peuple irlandais répondra par la positive" à l'adoption du Pacte budgétaire. A-t-il raison ?

Cette confiance, à nouveau, relève de la dimension nécessairement incantatoire du discours que doit tenir un banquier central. Si je crois un succès probable, subsistent néanmoins de réelles zones d’ombres.

Le mode de décision – le référendum – est révélateur des dysfonctionnements graves qui sapent les bases de la zone euro : le procédé, s’il est parfaitement démocratique, reste beaucoup trop lent et incertain pour ne pas entraver le bon développement du projet européen, et mettre en péril le sauvetage du pays, dont le coût de financement a bondi, sur les marché, depuis l’annonce de cette consultation.

Au contraire : une fois acté le principe de l’intégration à terme, les populations devraient laisser aux gouvernements la charge d’en conduire la mise en œuvre.

Quelle pourrait être la réaction des marchés financiers à l'égard des pays qui s'opposeront à ce Pacte budgétaire ? Et la réaction politique des signataires du Pacte budgétaire ?

La réaction a toutes les chances d’être terrible, dans le cas des pays les plus fragiles : un pays qui s’écarterait du groupe européen s’exposerait naturellement au retrait de toute aide financière, au moins dans l’immédiat, et verrait ses créanciers lui imposer une pression difficilement supportable. Je crois cette perspective suffisamment menaçante pour être dissuasive.

Si, a contrario, c’est un pays « vertueux » financièrement – l’Allemagne ou les Pays-Bas, par exemple – qui, in fine, rejette le Pacte et les contraintes de solidarité qu’il suppose, c’est le reste de la communauté qui en pâtira. Dans ce deuxième cas, le projet européen serait probablement moribond. Fort heureusement, ce scenario est peu vraisemblable.

Dans un autre registre, Mario Draghi s'est montré serein sur l'augmentation des ressources financières mises à disposition de l'Europe par le Fonds Monétaire International. Qu'en est-il dans les faits ?

L’Allemagne a beaucoup retardé l’augmentation des ressources du FESF (et de son successeur, le MES) pour finalement se rendre à l’évidence. Ce « pare-feu » financier constitue la plus belle réussite des 27 face à la crise de crédit, la preuve que l’Europe est capable de se doter d’outils efficaces pour assurer sa survie et son redressement.

Les seules carences de cet outil restaient le montant et la nature – 440 milliards d’euros de garanties nationales – de sa dotation, respectivement trop faible et trop fragile pour convaincre définitivement les marchés de la capacité du dispositif à éteindre tout nouvel emballement spéculatif.

Peu à peu, il semblerait que Berlin, grâce, notamment, aux demandes pressantes de Paris et de Francfort, ait finalement accepté de réarmer le Fonds : la question, désormais, est de savoir comment financer cette hausse de ressources sans pénaliser les comptes des États membres.

Propos recueillis par Franck Michel

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