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La baisse de l'inflation permettra-t-elle à la BCE d'aller plus loin dans la voie de la monétisation "masquée" ?
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Prise de risques

Les prix ​​à la consommation dans la zone euro ont chuté plus que prévu en décembre. Une conjoncture économique favorable qui devrait permettre à la BCE de réduire ses taux d'intérêt. De quoi redonner un second souffle à une économie européenne toujours menacée par la récession ?

UE Bruxelles AFP

Jean-Paul Betbeze

Jean-Paul Betbeze est président de Betbeze Conseil SAS. Il a également  été Chef économiste et directeur des études économiques de Crédit Agricole SA jusqu'en 2012.

Il a notamment publié Crise une chance pour la France ; Crise : par ici la sortie ; 2012 : 100 jours pour défaire ou refaire la France, et en mars 2013 Si ça nous arrivait demain... (Plon). En 2016, il publie La Guerre des Mondialisations, aux éditions Economica et en 2017 "La France, ce malade imaginaire" chez le même éditeur.

Son site internet est le suivant : www.betbezeconseil.com

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Les derniers chiffres d'inflation en zone euro confirment le mouvement de désinflation en cours. Ce sont désormais 2,7% en décembre pour l’indice global, contre 2,8% prévus. Ce sont aussi 2,7%, contre 3% en octobre et 3% en novembre. La décélération de l’inflation se déroule donc sous nos yeux, sachant qu’une part importante, et de plus en plus importante même, en est importée, pour ne pas dire "pétrolière".

De fait, ces chiffres nous disent deux choses :

  • D’abord, l’inflation structurelle, en gros celle qui est liée aux salaires internes, est en décélération, en liaison avec la récession de la zone euro ;
  • Ensuite, la partie importée de l’inflation est toujours forte, avec la hausse du prix du pétrole brut (pour des raisons géopolitiques) et la baisse de l’euro par rapport au dollar. Ainsi, la progression du sous-indice logement, électricité, gaz est à près de 5%, et celle des transports dépasse encore 4%, alors que la nourriture décélère à 3%. Mais l’inflation pétrolière n’atteint pas les salaires : c’est là l’essentiel.

Dans un tel contexte, comme la BCE dit toujours considérer l’inflation dans son ensemble, elle peut toujours maintenir ses taux d’intérêt, en attendant des signes plus tangibles de désinflation. Elle peut alors attendre quelque temps, notamment pour bien vérifier que des effets de second tour n’ont pas lieu, et plus précisément que les salaires n’augmentent pas en liaison avec le prix du logement et de l’énergie. Mais elle prend ainsi le risque d’aggraver la situation.

Ou bien elle peut se dire – et dire - que la tendance à moyen terme est bel et bien désinflationniste, avec la récession en cours, et laisser entendre qu’il lui faut accompagner le mouvement de réduction des déséquilibres publics par des baisses de taux, et non pas le durcir encore. Ce faisant, elle continuera à amortir l’ajustement de l’économie avec des taux réels négatifs, une économie qui en a bien besoin. Elle pourra ainsi poursuivre, en même temps, sa politique indirecte de soutien aux banques et au secteur public.

Ceci permettrait donc de compenser sa différence d’approche avec les États-Unis et l’Angleterre, pays qui achètent massivement leur dette publique et tiennent ainsi leurs taux longs très bas, au-dessous de 2 %.

Mais compenser, pas plus. Car les taux longs actuels de l’Italie et de l’Espagne empêchent en réalité un retour à un sentier viable. Ils exigent donc d’aller plus loin en soutien de la part de la BCE. Plus loin, mais plus tard. Il faudra donc attendre ce qui se dit avec la Grèce, ce qui se fait en France, et ce qui se prépare partout en matière de consolidation budgétaire et de dialogue social. Et ce n’est pas le moment pour revoir les mandats de la BCE et ses rôles, elle joue au maximum avec ce qui est sa feuille de route.

La BCE va donc à la fois baisser ses taux et proposer des mécanismes de soutien à des États et des banques, en accroissant les sommes en jeu. Elle va ainsi se mettre ainsi en risque, qu’elle le veuille ou non, et peut-être plus que les États-Unis et le Royaume-Uni. Mais elle n’a pas d’autre choix. Elle ouvre ainsi la voie à des ajustements plus profonds, à des solutions plus imaginatives de soutien à la croissance, mais elle ne peut faire autant de travail que la Fed (réserve fédérale américaine) et compenser par son action actuelle les limites qui lui ont été données à sa naissance.

Elle fait le maximum, simplement, mais un maximum… qui augmente.

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