Au pied du mur : mais qu'attend donc l'Espagne pour demander de l'aide à la BCE ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Selon Mario Draghi, l'Espagne et son ministre de l'Economie Luis de Guindos ne devraient pas avoir peur de demander de l'aide.
Selon Mario Draghi, l'Espagne et son ministre de l'Economie Luis de Guindos ne devraient pas avoir peur de demander de l'aide.
©Reuters

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Mario Draghi a incité jeudi dernier l'Espagne à demander de l'aide à l'Europe. Le président de la Banque centrale européenne a assuré que l'Espagne ne devait pas avoir peur des conditions qui lui seraient imposées en cas de demande d'assistance financière.

UE Bruxelles AFP

Jean-Paul Betbeze

Jean-Paul Betbeze est président de Betbeze Conseil SAS. Il a également  été Chef économiste et directeur des études économiques de Crédit Agricole SA jusqu'en 2012.

Il a notamment publié Crise une chance pour la France ; Crise : par ici la sortie ; 2012 : 100 jours pour défaire ou refaire la France, et en mars 2013 Si ça nous arrivait demain... (Plon). En 2016, il publie La Guerre des Mondialisations, aux éditions Economica et en 2017 "La France, ce malade imaginaire" chez le même éditeur.

Son site internet est le suivant : www.betbezeconseil.com

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Mario Draghi l’a dit : la structure qu’il a mise en place pour financer les pays qui le demandent est prête (OMT, Outright Monetary Transactions). Pas de nom de pays, mais tout le monde a compris qu’il s’agissait de l’Espagne. Une Espagne qui doit d’abord faire la demande à ses pairs au sein de la zone euro, puis, une fois acceptée, cette demande sera transmise à la Banque centrale européenne qui l’analyse puis, une fois acceptée, qui se met à acheter des bons du trésor espagnol à deux et trois ans, apportant ainsi à l’Espagne une aide indispensable. Mais une Espagne qui doit d’abord faire la demande officielle et qui hésite.

On peut la comprendre, mais le temps presse. L’Espagne cumule en effet quatre crises. Une crise bancaire d’abord, liée à l’éclatement de la bulle immobilière. Elle va nécessiter 50 milliards d’euros de soutien, déjà accordés par les pays de la zone euro, ce qui impliquera des fermetures de banques et des cessions d’actifs à bas prix, notamment dans l’immobilier. Une crise économique et sociale ensuite, avec une récession profonde, des licenciements, des fermetures d’usines, le tout donnant un taux de chômage officiel du quart de la population. Une crise budgétaire donc, avec des coupes dans les dépenses qui conduisent à des grèves à répétition, jusqu’à une grève générale qui se profile. Une crise régionale enfin, certaines régions étant en faillite, dont la Catalogne. Elle vient de demander une aide à Madrid, qui lui a été refusée. Celle-ci envisage donc un référendum sur l’indépendance, son leader politique, Artus Mas indiquant qu’une Catalogne indépendante serait un grand pays de la zone euro, et ajoutant que sans la Catalogne, l’Espagne est insolvable…

Il faut donc aller très vite, avant que l’irréparable ne soit accompli. D’où les pressions sur Mariano Rajoy, à la fois par l’intermédiaire de la BCE et par celle des autres responsables politiques, notamment du Sud. A Malte la semaine dernière, à l’occasion de la réunion « 5+5 » (5 pays des deux côtés de la Méditerranée), ce point a dû être abordé. Nous verrons, mais une issue de demande de l’Espagne est la plus probable.

A la BCE, le travail d’analyse en faveur de l’OMT avance. L’idée est toujours la même : le programme d’achat de titres publics est destiné à permettre au système économique de fonctionner, et plus nettement encore aux banques du pays de faire crédit aux entreprises et aux ménages. C’est là tout le problème, car la chaîne est rompue entre baisse des taux de la banque centrale d’un côté et baisse des taux bancaires de l’autre. En effet, si le pays est en difficulté, ces bons du trésor voient monter leurs rémunérations, ce qui inquiète tous les acteurs économiques et vient en concurrence avec  la rémunération des dépôts bancaires, donc avec la capacité des banques de baisser leurs taux. L’OMT doit donc faire baisser les taux à moyen terme, « désinquiéter » les marchés et les acteurs internes, faire baisser les conditions de funding des banques et permettre ainsi aux taux d’intérêt de baisser, précondition pour faire repartir le crédit et la croissance. On voit le temps qui sera nécessaire : des trimestres. En même temps, la BCE poursuit son analyse par rapport à l’opposition de la Buba, en expliquant les conditions et modalités de son intervention, le fait que son intervention n’aura lieu que sur le marché secondaire et qu’elle sera stérilisée, autrement dit compensée, tout ceci afin de ne pas intenter de procès en inflation.

Encore une fois, tout est prêt pour l’Espagne, car le temps presse. Les marchés croient à cette solution, derrière la BCE, et le pire serait de les décevoir, pour l’Espagne bien sûr, pour le Sud ensuite, pour les voisins (dont nous), pour la zone euro.

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