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Femme de chambre agressée dans un palace parisien : affaire classée
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EDITORIAL

L'edito de Gilles Klein Raisons diplomatiques : l'auteur présumé jamais entendu a quitté le pays.

Gilles Klein

Gilles Klein

Gilles Klein,, amateur de phares et d'opéras, journaliste sur papier depuis 1977 et en ligne depuis 1995.

Débuts à Libération une demi-douzaine d’années, puis balade sur le globe, photojournaliste pour l’agence Sipa Press. Ensuite, responsable de la rubrique Multimedia de ELLE, avant d’écrire sur les médias à Arrêt sur Images et de collaborer avec Atlantico. Par ailleurs fut blogueur, avec Le Phare à partir de 2005 sur le site du Monde qui a fermé sa plateforme de blogs. Revue de presse quotidienne sur Twitter depuis 2007.

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L'information est fascinante, on a du mal à y croire tellement elle est emblématique à plus d'un titre : une femme de chambre guinéenne dit avoir été agressée sexuellement par un client en juillet 2010 (vidéo BFM TV) dans l'hôtel Park Hyatt Vendôme à Paris. L'homme en cause fait partie (nous dit-on) de l'entourage de la famille princière du Qatar. Rien ne se passe, il n'est pas interrogé, quitte le pays sans aucun problème. L'affaire est classée sans suite. Aux Etats-Unis, on arrête une personnalité internationale à l'aéroport, en France on n'interroge même pas, un proche de l'entourage d'une famille princière.

C'est le Parisien qui révèle cette affaire sur une page dans son édition de ce samedi. Un vrai scoop, plutôt triste pour l'indépendance de la police et de la justice, mais Le Parisien n'a consacré qu'une toute petite partie de sa Une, un mini pavé de 4 lignes de 2 mots en bas de page à droite. Alors que l'on peut aussi penser que l'information méritait un grand titre de Une et la page 2 plutôt que la page 12..

Paradoxe, Libération fait sa Une et ses trois premières pages sur le harcèlement sexuel, sur l'affaire DSK et ses conséquences sur la société française, tout en soulignant qu'il n'existe aucune statistique concernant ce genre d'affaire. Le seul chiffre c'est celui des condamnations devant un tribunal correctionnel en 2009, selon le ministère de la Justice : 78, soixante dix-huit, pas une de plus.

Autre paradoxe cruel, Libération titre en Une "Harcèlement sexuel Pourquoi la France ferme les yeux" mais ce titre n'occupe qu'1/3 de la Une, il vient sous des pavés noirs s'étalant sur la moitié supérieure de la Une, l'emplacement principal, le plus visible. Ces pavés annoncent "Invader a envahi Libé" : un artiste français a collé ses petits envahisseurs dans chaque lettre "a" des titres de tout le journal.

Le geste artistique a lieu parce que "Son attachée de presse" a proposé qu'Invader envahisse les titres de Libé papier qui a accepté comme l'explique page 4 le Making Of. Résultat : la moitié de la Une pour signaler qu'un artiste s'amuse dans Libération, 1/3 de la Une pour annoncer l'événement, le sujet principal du journal sur le harcèlement sexuel.

En clair si l'on veut en savoir plus sur la société française et le harcèlement sexuel, ce n'est pas la Une et les trois pages de Libération qu'il faut lire, mais la page 12 du Parisien.

Dans cette fameuse page 12, on découvre qu'une femme de chambre de nationalité guinéenne, comme celle qui accuse DSK elle aussi guinéenne, dit avoir été agressée sexuellement à Paris et avoir porté plainte en juillet 2010. Que l'agression contre laquelle elle se serait battue avec l'aide de la douche de la salle de bains, aurait cessé lorsque des membres de la famille de l'agresseur sont entrés dans la chambre. On apprend aussi que la direction de l’hôtel n'aurait pas compris la gravité des faits avancés..... et que la police n'a pas pu enquêter plus avant : le "suspect clairement identifié n’a pas pu être entendu. Une source judiciaire évoque aujourd’hui des « obstacles diplomatiques »".

On peut critiquer les photos de DSK quittant le poste de police avec des menottes dans le dos, alors que ce genre d'image serait interdit en France, mais il faut surtout s'effarer devant un tel déni de justice dans notre pays si les faits sont avérés : le suspect dans l'affaire du palace parisien n'est même pas un membre du gouvernement d'un pays étranger, il est présenté comme "membre de l'entourage" de la famille princière de l'Etat du Qatar.

Le simple fait qu'il fasse partie "de l'entourage" lui aurait donc servi de passe-droit, empêchant qu'il soit entendu, simplement entendu par la police. Et l'affaire a été classée. Si l'on en reparle aujourd'hui, selon Le Parisien, c'est parce que la victime s'est manifestée à nouveau  après l'affaire DSK et que des "sources", en clair des policiers, ont parlé à la presse. L'enquête serait réouverte après que la plainte ait été classée sans suite. Navrant.

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