12 nouvelles pistes d’économies identifiées par Bercy : une revue des dépenses, ça sert à quoi ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Le ministère des Finances, à Bercy.
Le ministère des Finances, à Bercy.
©Reuters

Copie à revoir

Dans un rapport à paraître, Bercy fait montre de 12 propositions visant à permettre des économies budgétaires. Cette "revue des dépenses" pratiquée tous les ans offre, théoriquement, des possibilités d'optimisation non négligeables du budget, mais en pratique c'est sur les marges que se font les économies.

Thomas Carbonnier

Thomas Carbonnier

Maître Thomas Carbonnier est Avocat et coordinateur pédagogique du DU Créer et Développer son activité ou sa start-up en santé au sein de l’Université Paris Cité (issue de la fusion Paris 5 et Paris 7). Il est titulaire du Master 2 droit fiscal, du Master 2 droit financier et du D.E.S. immobilier d’entreprise de l’Université Paris 1 Panthéon Sorbonne.

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Atlantico : Dans les annexes du PLF 2016 figure la liste des dépenses qui, d'après les Echos, "devraient être passés au peigne fin, dans la perspective du budget 2017". Parmi toutes ces dépenses, le ministère des Finances devrait isoler 12 thématiques et les présenter sous forme de revue des dépenses. Concrètement, de quoi s'agit-il et qu'elle est son utilité ?

Thomas Carbonnier : Au XIXe siècle, l’économiste français Frédéric Bastiat, avait rédigé un texte prémonitoire à propos de la sécurité sociale qui est transposable au budget de la France :

« Les ouvriers ne verront plus dans la caisse commune une propriété qu'ils administrent, qu'ils alimentent et dont les limites bornent leurs droits. Peu à peu, ils s'accoutumeront à regarder le secours en cas de maladie ou de chômage, non comme provenant d'un fond limité, préparé par leur propre prévoyance, mais comme une dette de la Société.

Ils n'admettront pas pour elle l'impossibilité de payer, et ne seront jamais contents des répartitions. L'État se verra contraint de demander sans cesse des subventions au budget. Là, rencontrant l'opposition des commissions de finances, il se trouvera engagé dans des difficultés inextricables.

Les abus iront toujours croissants et on en recalculera le redressement d'année en année, comme c'est l'usage jusqu'à ce que vienne le jour d'une explosion. Mais alors, on s'apercevra qu'on est réduit à compter avec une population qui ne sait plus agir par elle-même, qui attend tout d'un ministre ou d'un préfet, même la subsistance, et dont les idées sont perverties au point d'avoir perdu jusqu'à la notion du Droit, de la Propriété, de la Liberté et de la Justice ».

L’Etat ayant pris à sa charge des fonctions qui n’étaient autrefois pas les siennes, ses dépenses ont explosé au même titre que les abus.

L’Etat essaye, depuis plus de 20 ans, d’améliorer le rapport coût-efficacité des dépenses publiques. Pour ce faire, il est nécessaire de réduire de manière substantielle les dépenses et de diminuer les dépenses des administrations publiques au sens large.

Les réductions toucheront les divers types de dépenses, selon leur nature (rémunérations, transferts sociaux, investissements…) et selon leur fonction (protection sociale, éducation, défense…).

Les principales pistes portent sur :

·         Les budgets annexes des collectivités : 22 Md€ d'enjeu budgétaire ;

·         La masse salariale des agences et opérateurs de l’Etat : 17 Md€ ;

·         L’intervention de l’Etat et des collectivités en faveur du sport : 13 Md€ ;

·         La fonction achats des collectivités : 9 Md€ ;

·         La gestion du fonds de compensation de la TVA : 6 Md€ ;

·         Les transports sanitaires (en ambulance ou en taxi) : 4,2 Md€ ;

·         Les soins à l’étranger des assurés : 1 Md€ ;

·         La formation initiale des fonctionnaires : 250 M€ ;

·         La gestion des aides agricoles (PAC) : 250 M€ ;

·         La mutualisation des forces d’hélicoptère : 200 M€ ;

·         Les zones franches d’activité : 90 M€ ;

·         Le patrimoine des collectivités : NC.

Toutefois, si sur le papier cela paraît chose relativement aisée, pour réussir la mise en œuvre opérationnelle des réductions, il est indispensable de faire accepter la réduction auprès de l’administration et de l’opinion publique.

Il apparaît ainsi pertinent de revoir un nombre aussi élevé que possible de dépenses et d’opérer des arbitrages stratégiques entre les postes et d’impliquer pleinement l’administration dans le processus de telle sorte qu’elle propose et mette en œuvre des réductions de dépenses ambitieuses.

Enfin, il est indispensable d’informer les citoyens sur les choix stratégiques qui sont faits et qui engagent pour partie l’avenir du pays. Malheureusement, la succession de tendances politiques et de préférences nationales rend impossible l’identification d’une stratégie claire.

Critiquée par François Hollande pendant l'ère Sarkozy, la revue de dépenses n'a pas disparu sous le quinquennat socialiste. S'agit-il d'un effet de mode ou d'une nécessité ?

En 2007, M. François Fillon, alors Premier Ministre, avait déclaré « Si la France était une entreprise, un ménage, elle serait en cessation de paiement ». Cette déclaration n’était bien entendu pas le fruit du hasard mais reflétait la piètre santé financière de la France.

Le niveau des dépenses publiques en 1978 était de 44,4 % du PIB alors qu’aujourd’hui, il bat des records pour atteindre plus de 56% du PIB. La France se place chaque année dans le peloton de tête européen.

Dans ces conditions, la problématique dépasse le stade de la couleur politique. Les critiques adressées par les socialistes au gouvernement sous l’ère Sarkozy s’inscrivait dans le jeu classique de la politique.

Naturellement, les socialistes connaissaient parfaitement la réalité et savaient pertinemment qu’ils n’auraient pas d’autre choix que de poursuivre cette revue des dépenses. Au même titre que la lutte contre le cancer, la problématique de la dépense publique préoccupe tout élu politique quelle que soit sa couleur.

Comment expliquer la nécessité d'une revue des dépenses chaque année ?  S'agit-il de "corriger" le PLF de l'année précédente ?

Combien de ministres du budget ont été capables d’anticiper avec exactitude la croissance annuelle de la France ? Probablement aucun. Ce n’est pourtant pas faute de disposer de spécialistes de l’économie et d’outils de mesure développés et perfectionnés…

Le budget voté à l’équilibre en début d’année doit donc être revu et corrigé en cours d’année en même temps que les prévisions de croissance.

Il n’y a guère de solution miracle pour équilibrer (du moins tenter de l’équilibrer) : augmenter la pression fiscale ou baisser la dépense publique.

Au sein des propositions réalisées par Bercy, quelles sont celles qui apparaissent cohérentes ? A l'inverse, quelles sont les plus irréalistes ? Y'a-t-il d'autres propositions qu'il aurait fallu faire et qui ne figurent pas là-dedans ?

Si la France disposait d’une véritable croissance économique forte, le budget serait plus aisément équilibré. Tel n’est pas le cas. Les mesures de réformes se révèlent souvent être de simple rustines.

L’autre mesure consisterait à recentrer l’Etat sur ses grandes missions régaliennes et de revenir aux idées portées par les révolutionnaires de 1789. L’Etat devait limiter ses dépenses à l’entretien de la voierie, au maintien de la paix sociale (police et justice) et à la défense de son territoire (armée).

Les autres fonctions, telles que la santé et l’éducation, étaient laissées à la charge des entreprises privées. Ainsi, les grandes entreprises construisaient des écoles et rémunérait des enseignants pour former au mieux ses futurs salariés. De même que des caisses de secours mutuels permettaient d’assurer une couverture santé pour chaque secteur d’activité voire même par métier.

Ce retour en arrière n’apparaît toutefois, en l’état actuel de notre société, pas très réaliste.

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