Tu quoque, Lionel ?
Quand Lionel Jospin, dernier sage de la gauche de gouvernement, adoube la gauche régressive...
L’ancien Premier ministre sort de son silence. On a le droit d’être un peu déçu.
Voir François Hollande s’installer dans le train de la New Nupes, même à un wagon de distance prophylactique de ses promoteurs puisqu’il n’a pas jugé utile d’informer Olivier Faure de sa candidature, c’était déjà surprenant. Dans le cas de Lionel Jospin, dont le ralliement date d’hier, c’est carrément sidérant.
On comprend que l’ancien Premier ministre ait gardé un chien de sa chienne pour le RN, et que l’arrivée possible de l’extrême droite à Matignon le fasse flipper autant que la plupart des gens ayant un peu de mémoire, mais tout de même…
Jospin représentait en effet une sorte d’âge adulte de la « gauche de gouvernement » post-Mai 81. Le leader naturel intellectuellement structuré qui, ayant appris des errements de son camp et de sa propre jeunesse « lambertiste », avait su élaborer une version hexagonale de la social-démocratie nord-européenne, rompre avec la démagogie la plus crasse, faire évoluer la société là où il le fallait, relancer la croissance en redynamisant un marché du travail sclérosé, et même, défi suprême, réconcilier les Français avec l’idée que « l’État ne peut pas tout ».
Il y avait eu Rocard, puis Delors, puis Jospin… Une marche après l’autre, le haut de l’escalier était en vue.
Désormais, tout ça n’a plus cours. Le Front populiste que l’entraîneur de la fameuse « dream team » a décidé « d’accompagner en ce moment crucial », et qu’il présente comme « une digue », est la négation absolue de tout ce chemin parcouru. L’acceptation tranquille d’une régression conceptuelle de quarante ans, si le « tournant de la rigueur » de 83 doit servir de base 100, et même de 65 ans si c’est plutôt le consentement à l’économie de marché et la rupture avec l’aspiration révolutionnaire par les socialistes allemands du congrès de Bad-Godesberg en 1959 que l’on prend pour repère...
Régression sur les enjeux économiques bien sûr, avec la bienveillance exprimé pour un programme de dépenses faramineux objectivement infinançable (« Coucou, Athènes 2008 ! »), mais aussi régression sur le rapport de la France au monde (« Coucou, Caracas 2013 ! ») et à l’Europe (« Coucou, Londres 2016 ! »), sur la laïcité républicaine, sur la science, et surtout sur des compagnonnages plus sulfureux les uns que les autres au nom des œufs qu’il faudrait bien casser pour se cuisiner une brouillade de gauche…
L’heure est grave, certes, mais il y a différentes teintes d’heures sombres.
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