Quand le cyclope guérit du mauvais œil et quand le lion rugit : c’est l’actualité des montres en veille de premier mai<!-- --> | Atlantico.fr
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Un des plus somptueux cadrans néo-classiques de ce printemps (De Bethune).
Un des plus somptueux cadrans néo-classiques de ce printemps (De Bethune).
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Atlantic-Tac

Mais aussi trois satellites intersidéralement précis, une connexion fleurie au bout des doigts, trois anneaux pour les seigneurs du temps, le marteau de Thor au poignet et un chronographe trop simple pour n’être pas compliqué…

Grégory Pons

Grégory Pons

Journaliste, éditeur français de Business Montres et Joaillerie, « médiafacture d’informations horlogères depuis 2004 » (site d’informations basé à Genève : 0 % publicité-100 % liberté), spécialiste du marketing horloger et de l’analyse des marchés de la montre.

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TRILOBE : Une fascination hypnotique…

Imaginez ce dôme – au demeurant très portable (40,5 mm) – à votre poignet : c’est la contribution de la jeune marque indépendante française Trilobe aux lectures du temps alternatives si prisées des nouvelles générations. On peut y déchiffrer le temps qui passe grâce à trois anneaux presque concentriques (les heures, les minutes, et les secondes) en rotation sous le verre saphir bombé. La magie de la mécanique semble animer ces anneaux dans une sorte de lévitation hypnotisante au possible. Dans une version sertie, cette montre Une folle journée – ici en couleur « Dune » – ajoute à la fascination des diamants à cette course des heures qui dansent en rond. Cette lecture du temps est intuitive : on la maîtrise en quelques secondes, mais on ne se lasse pas, pendant de longues minutes, aussi souvent qu’on le peut, de ces anneaux qui évoluent dans un boîtier en titane (version or rose disponible) sous leur bulle de verre saphir. La mécanique est un calibre automatique « maison » (micro-rotor) qui ne cache rien de ses mystères, mais dont l’architecture renforce l’effet magnétiquement irrésistible : on ne se force pas à regarder, on y prend plaisir ! Le mieux, c’est le prix relativement « abordable » [tout est relatif !] pour une montre aussi originale, qui fait figure d’exception dans le nouveau paysage de l’horlogerie française : moins de 24 000 euros, mais tous les collectionneurs vont diront que c’est une des meilleures affaires du moment… quand vous en avez les moyens, bien sûr !

URWERK : Trois satellites intersidéraux…

Révons un peu de très haute horlogerie disruptive avec la nouvelle UR-100 Magic T du laboratoire créatif Urwerk, qui n’a rien perdu de son style offensif en dépit du quart de siècle d’existence de la marque. C’est que le non-conformisme est ici un réflexe naturel et une identité, qu’on repère dans le style dépouillé d’une montre autrement plus complexe qu’elle n’en a l’air. Si vous ne lisez pas 8 :17 ou 20 :17 sur l’image ci-dessous, c’est que vous avez raté un épisode : les trois « satellites » qui portent le chiffre des heures tournent en permanence à l’intérieur du boîtier, chaque heure défilant pendant soixante minutes sur l’arc-de-cercle gradué au bas de la montre. Quand l’heure en cours arrive à l’index « 60 », un second satellite se présente, avec l’heure juste en face du repère « 0 » : pas belle, la vie des montres de nouvelle génération ? On admirera au passage l’architecture très étudiée qui donne cette (fausse) idée de simplicité, ainsi que les finitions satinées qui donnent une (fausse) idée de la « brutalité » d’une montre dont les heures vagabondes semblent merveilleusement domestiquées par une science mécanique soucieuse de précision ultime. Sur les flancs de ce boîtier, deux indications très inhabituelles : à droite, « 35 740 » – c’est le nombre de kilomètres parcourus par la Terre autour du soleil pendant vingt minutes. À gauche, « 555 » : c’est la distance parcourue par la Terre sur son propre axe rotatif pendant les mêmes vingt minutes. Puisqu’on vous dit que cette montre est magique : elle vous donne l’heure tout en vous entraînant dans les abysses du temps de ce vide intersidéral dont notre pauvre heure terrestre n’est que l’infime et fragile reflet…

ICE-WATCH : Une connexion fleurie à la demande…

Mieux qu’une roborative Ice-Watch bariolée dont on change au gré de ses humeurs, une Ice-Watch connectée qui vous maintient en ligne avec toute la planète autant qu’avec vous-même. La série des Ice Smart vous relie même avec votre avenir, puisque sa panoplie très complète de fonctions connectées (connexion au téléphone, notifications, applications de santé, traceur d’activités, régulation du sommeil, entraînement sportif, appels d’urgence, etc.) en donne toujours plus. On peut même téléphoner directement à partir de cette montre (micro intégré). Dans un boîtier très léger en aluminium (40 mm x 44 mm), c’est trois à cinq jours d’autonomie à un prix qui ne dépassera pas la centaine d’euros – ce qui relève de l’exploit pour le haut niveau des technologies embarquées sous cet écran tactile dont on peut varier l’affichage du temps qui passe avec ou sans aiguilles : on peut même le dire avec des fleurs. En plus de leur prix particulièrement accessible, l’avantage de cette génération de montres connectées reste la mise à jour permanente de cette panoplie de fonctions. On reste dans l’esprit de la fun attitude qui marque le style Ice-Watch depuis la naissance de la marque, mais on met ici un pied dans le futur – avec ce délicieux décalage que Jean-Pierre Lutgen, le fondateur de la maison, a toujours su imprimer à ses créations…

LOUIS ÉRARD x KONSTANTIN CHAYKIN : Mauvais œil…

Ce « régulateur » (lecture séparée des heures, des minutes et des seconde) est une montre qu’il faut assumer quand on la glisse à son poignet. Elle suscite bien des interrogations, tant par son étrange cadran que par son bracelet en crapaud. Elle est signée conjointement par Louis Érard, une des « nouvelles » locomotives de la jeune génération horlogère suisse [même si la maison existe depuis longtemps, elle a été relancée avec brio par l’excellent Manuel Emch], et par Konstantin Chaykin, l’étoile montante de la nouvelle horlogerie russe. On y lit l’heure à midi : c’est le point noir sur le cadran gradué sur douze heures. Les minutes sont affichées au centre par une aiguille tout sauf traditionnelle (c’est une flèche galbée et sommée par une pointe). La valse des secondes est indiquée par la rotation du disque denté à six heures. Le tout dans un boîtier en acier dont il existera deux versions : une de 42 mm à dominante verte et une des 39 mm à dominante violette pour le tour des heures (comptez environ 4 000 euros par version). Comme les deux compères n’ont prévu que 178 exemplaires de chaque série, il faut craindre que ce « régulateur » cyclopéen, qui fait que c’est l’heure qui vous regarde plutôt que vous qui la regardez, ne soit déjà sur liste d’attente. Dans les légendes du folklore slave, le monstre à l’œil unique s’appelle Liko et on l’exorcise avec une amulette qui rappelle ce mauvais œil – ce « régulateur » sera un fétiche idéal pour se concilier les faveurs des bons esprits…

DE BETHUNE : Aux frontières de la perfection mécanique…

Un peu banalisé dans les marques de montres accessibles, le chronographe mécanique reste une des spécialités horlogères les plus difficiles à maîtriser par les « vraies » manufactures – celles qui conçoivent et réalisent elles-mêmes la totalité de leurs mouvements (au lieu de les acheter « sur étagère »). Campée sur les marches de la frontière avec la France, la maison suisse De Bethune est une des plus en pointe dans le peloton de tête de l’avant-garde néo-classique, ce groupe des marques qui donnent le ton aujourd’hui et qui seront demain les parangons des beaux-arts de la montre. Il était fatal que Denis Flageollet, l’horloger de référence co-fondateur de la manufacture De Bethune, tienne à revenir sur la mise au point d’un chronographe mécanique, idée autour de laquelle il tourne depuis des années. Il ne fallait pas attendre lui un chronographe classique, avec deux poussoirs sur le côté de la montre : par souci d’élégance (pour le style), de sobriété (pour l’affichage sur le cadran) et d’efficacité (pour la subtilité mécanique), il a donc choisi de créer un chronographe monopoussoir – avec un poussoir de déclenchement, d’arrêt et de remise à zéro discrètement intégré dans la couronne de remontage. Si le cadran affiche un impeccable classicisme revu, corrigé et modernisé dans ses moindre détails (guillochages multiples, chiffres délicatement stylisés, aiguilles d’une admirable élégance), il a été simplifié pour agrandir le compteur des soixante minutes disposé à six heures et pour améliorer la lisibilité de la grande aiguille des soixante secondes du chronographe. Bâti en 42 mm, le boîtier en titane soigneusement poli se permet une fantaisie : celle de ses surprenantes « cornes » en obus. Le calibre DB3000 (281 composants) qui anime ce chronographe est le trente-et-unième mouvement créé par la manufacture De Bethune et on le découvre enrichi de ces fonctions mécaniques augmentées et de ces composants innovants qui sont la spécialité de la maison De Bethune. La réussite de ce chronographe DB Eight est impressionnante : le plus étonnant reste peut-être que, dans sa quête de la perfection, l’équipe de Denis Flageollet réussit toujours à repousser les frontières de l’excellence mécanique.

BON À SAVOIR : En vrac, en bref et en toute liberté…

•••• EXPORTATIONS HORLOGÈRES : mois après mois, les marques suisses continuent à exporter beaucoup de montres neuves vers leurs filiales internationales et vers leurs détaillants (+ 14 % en valeur, + 24 % en volume), alors même que la courbe des ventes dans les boutiques persiste à plonger. Même si l’essentiel de cette croissance s’explique à la fois par l’augmentation des prix pour les montres de luxe et par le « miracle » de la MoonSwatch qui ne se dément pas, on en déduira qu’il se crée sur le marché des stocks considérables de montres neuves dont on se demande ce qu’ils deviendront si la crise économique qui nous guette éclate d’ici à la fin de l’année… •••• HORLOGERIE HYPERBORÉENNE : actuellement en souscription sur Kickstarter, une série de montres dédiées à la mythologie nordique par la nouvelle marque Mythology Watch, venue de Suède (Gothenburg). Avec une découpe en forme de marteau de Thor sur le cadran, ces montres mécaniques à remontage automatique – proposées dans les 350 euros, avec un mouvelment japonais – rendent hommage à une grosse quinzaine de divinités nordiques, avec des chiffres et des lettrages qui rappelent les anciennes runes scandinaves… •••• LA MARCHE DU LION : tous les Français connaissent l’histoire du « Lion de Belfort », dont on fête ces temps-ci le centenaire [rappelons seulement que ce lion symbolise la résistance de la ville de Belfort lors de son siège par l’armée prussienne en 1870-1871], qu’on double avec le bicentenaire de la naissance du colonel Aristide Denfert-Rochereau, l’âme de la résistance belfortaine – c’est sur la place parisienne qui porte son nom qu’est érigée la reproduction du monumental Lion de Bartholdi qui veille toujours sur la forteresse de Belfort. Pour ce double anniversaire, le Territoire de Belfort – département français depuis 1921 – a commandé à l’horloger mécanicien bisontin Philippe Lebru (Utinam) un spectaculaire lion mécanique de 3,20 m de long, 1,30 m de large et 1,20 m de haut. En dépit de ses 200 kg d’acier (structure comprise), ce lion articulé marche ou, du moins, il semble marcher sur son socle, pendant une minute, avec un naturel époustouflant. On le remonte avec une clé géante et on peut déjà parier que les Terrifortains se feront un plaisir d’assister à un tel remontage, dans le grand hall de l’Hôtel du département. C’est bien un automate à remonter le temps et c’est aussi un triomphe pour l’horlogerie mécanique française, qui témoigne avec cette performance rugissante de ses nouvelles compétences…

• LE QUOTIDIEN DES MONTRES

Toute l’actualité des marques, des montres et de ceux qui les font, c’est tous les jours dans Business Montres & Joaillerie, médiafacture d’informations horlogères depuis 2004...

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