Quand le cadran sent le bouchon et quand les sucres d’orge colorent le temps : c’est l’actualité septembriste des montres<!-- --> | Atlantico.fr
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Un « 2 » minimaliste sur le cadran stylisé d’une montre contrastée (Bulgari)…
Un « 2 » minimaliste sur le cadran stylisé d’une montre contrastée (Bulgari)…
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Atlantic-Tac

Mais aussi les codes nautiques d’un tonneau avant-gardiste, le soleil qui peut se lever où vous voulez, le Parrain qui n’en peut se fredonner entre deux pianos, le ciel d’un salon horloger chargé de nuages et une sélection qui en dit très long…

Grégory Pons

Grégory Pons

Journaliste, éditeur français de Business Montres et Joaillerie, « médiafacture d’informations horlogères depuis 2004 » (site d’informations basé à Genève : 0 % publicité-100 % liberté), spécialiste du marketing horloger et de l’analyse des marchés de la montre.

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KRAYON : Défi solaire…

Vous ne le savez sans doute pas encore, mais vous aimeriez peut-être l’heure du lever et du coucher du soleil dans un endroit que vous aimez tout particulièrement : cette indication « horlogère » était jusqu’ici le privilège de montres très compliquées. L’équipe de Krayon a décidé de nous reconnecter et de nous relier aux rythmes naturels de la planète, en nous apportant la réponse à nos questions sur le temps vrai – celui du soleil, pas celui de nos montres qui demeure une pure convention approximativement calée sur un temps moyen qui oublie que les journées sont plus longues en été et que le soleil se couche plus tôt en hiver, avec d’impressionnantes variations selon les lieux. La montre Anywhere de Krayon est un véritable calculateur mécanique, qui peut établir avec précision ce lever et ce coucher du soleil, où que ce soit dans le monde et quelle que soit la saison, avec ou sans heure d’été. La performance horlogère redonne ainsi au temps sa dimension émotionnelle, puisqu’on peut le transformer en temps purement personnel et affectif – que vous soyez « du matin » ou « du soir », vous apprécierez de savoir où vous en êtes par rapport à la course du soleil. Évidemment, un tel bijou mécanique se mérite (ne serait-ce que par son prix, aligné dans les 150 000 euros), mais, avec ce temps « égoïste », vous aurez le privilège de disposer au poignet d’une complication qui tenait autrefois la place d’une immense horloge astronomique dans une immense cathédrale. Le jour et la nuit, le soleil et les étoiles, les jours et les mois de l’année : rien n’est plius limpide que cette montre qui ne se contente pas de vous donner l’heure pour vous donner beaucoup : du temps ! On vous épargne les subtilités mécaniques de ce mouvement conçu par Rémi Maillat, le fondateur de Krayon, qui est ingénieur de formation, mais il faut savoir que pas une seule des grandes marques de référence de l’horlogerie contemporaine n’avait osé se lancer dans un tel défi…

BULGARI : Alu… mez le feu !

La collection Aluminium de Bulgari se rit du temps qui passe : lancée en 1998, elle nous revient sans une ride au début des années 2020, toujours avec la même impertinence – il fallait avoir l’audace de Bulgari pour faire de l’aluminium un des métaux précieux de l’horlogerie –et avec la même élégance dans un registre néo-classique. On aime la pureté de ses formes et la rigueur toute en contrastes de son chic « Bulgari Bulgari ». L’Aluminium de ce printemps a été développée avec l’artiste japonais Sorayama, qui a saturé la montre de ses propres références au style des voitures et des avions d’avant la Seconde Guerre mondiale – d’où le cadran « bouchonné » comme les compteurs de bord d’autrefois [la lumière y brûle comme dans un feu], d’où la sobriété de la décoration qui ne laisse émerger que le « 2 » fétiche de Sorayama [qui est né le 22 février de la 22e année de l’ère Shōwa au Japon], d’où l’articulation post-industrielle des éléments d’une montre qui alterne le caoutchouc noir, les maillons en aluminium et la couronne de remontage en titane noirci. Cette Aluminium Sorayama est une excellent relecture du passé à la lumière de ce que doit être le luxe contemporain, tant dans la limitation de cette série à 1 000 exemplaires et dans le prix bien contenu (comptez un peu plus de 3 000 euros) que dans l’impact visuel d’une présence non-ostentatoire. Dans ce registre d’horlogerie accessible, c’est une des meilleures propositions de cette rentrée…

FRANCK MULLER : Style nautique…

La Vanguard a redynamisé la maison genevoise Franck Muller en apportant une touche de modernité bienvenue à ses boîtiers tonneau traditionnels. La nouvelle Yachting en fait la démonstration, avec quelques détails graphiques qui attestent de sa vocation nautique : une rose des vents, les axes d’une boussole sur le rehaut ou le bleu profond du cadran. Les chiffres stylisés ont adopté eux aussi un accent plus contemporain. On peut opter pour un boîtier en titane, en or ou en acier, en choisissant une version « classique » (ci-dessous), un chronographe ou un tourbillon. Bref, on joue comme on aime, en redécouvrant le plaisir d’une montre aux lignes avant-gardistes moins galvaudée sur les poignets que les « sportives chic » qui foisonnent dans les beaux quartiers : Franck Muller, c’est la touche de design en prime, une allure indéniable au poignet et un style rajeuni qu’on ne peut pas prendre pour une resucée vintage des montres de l’âge d’or. Avec cette Vanguard, on se sent poussé vers l’avant, pas projeté vers l’arrière. C’est déjà beaucoup…

BEAUREGARD : Nostalgie enfantine…

Voici une horlogerie joaillière de très haut niveau qui parle français, mais avec un sympathique accent canadien : Alexandre Beauregard, le créateur de la marque Beauregard, nous arrive de Montréal, mais il a tenu à confier à la place genevoise le soin de mettre en scène sa double passion pour les pierres et pour les montres. Tout va se jouer ici dans une subtile harmonie entre les formes, les volumes, les lignes et les couleurs. Prenons l’exemple de cette Lily Candy, dont les 33 mm d’or blanc et les 150 diamants entourent d’une précieuse ronde un anneau soigneusement galbé de « sucre d’orge » joaillier, où on peut reconnaître opale, topaze, améthyste ou chrysoprase. Pas de « cornes » pour accrocher le bracelet : elles nuiraient à l’élégance de cette montre, dont le bracelet est intégré au fond du boîtier. Pas de couronne de remontage : on met la montre à l’heure (mouvement à quartz) par un poussoir au revers de la montre. Une vraie friandise, dont il faut tout de même avouer qu’elle sera facturée dans les 160 000 euros. Comme toujours avec les vrais joailliers, chacun peut commander les pierres dans les couleurs qu’on préfère : dans le style « sucre d’orge » de cette série de Lily Candy, on peut aller très loin dans le délire régressif…

JACOB & CO. : Sublime extravagance…

Autant vous prévenir tout de suite : il vous faut un bon million de dollars ou de ce que vous voulez comme devise forte pour passer cette montre signée Jacob & Co à votre poignet. En hommage au film Le parrain et baptisée « Opéra Baguette », cette folie ne fait pas dans la nuance : 49 mm pout le boîtier qui n’est pas moins serti de 217 diamants baguette, 59 autres diamants baguette pour le cadran et 18 diamants baguette pour la boucle du bracelet, on se situe déjà pas loin des 25 carats. On ajoutera à ce premier bilan joaillier les diamants du « décor » de l’animation : une soixantaine d’autres diamants baguette pour les « pianos » qui permettent de jouer la musique du Parrain et 666 diamants en taille brillant pour les « rouleaux » qui portent les « peignes » de cette ahurissante double boîte à musique portative. Histoire de ne rien perdre en extravagance, ne manquez pas la figurine au centre de la montre : c’est bien le Marlon Brando sur son trône de Parrain. Tant qu’à rester dans le sublime de la démesure, le tourbillon sphérique à six heures tourne sur lui-même selon trois axes : la cage intérieure sur un premier axe en vingt-quatre secondes, la cage intermédiaire en quarante-huit secondes et la cage extérieure en cent quatre-vingts secondes. Détail utile : grâce à ce tourbillon gravitationnel, cette « Opera Baguette » donne l’heure avec précision, mais cela semble bien annexe dans ce festival de son et de lumière : regardez dans le petit cadran à midi, derrière Marlon Brando. Vous l’avez compris, pour jouer avec cette montre musicale, il ne faut pas craindre d’étaler son opulence, sa munificence et même sa magnificence, ainsi qu’un certain mépris des convenances bourgeoises qui définissent l’élégance au poignet et le bon goût dans l’ostentation salutaire. Heureusement qu’il y a des Jacob & Co pour rompre avec le sempiterne train-train d’une horlogerie qui se vautre avec paresse dans le culte de ses icônes vintage

EN VRAC, EN BREF ET EN TOUTE LIBERTÉ : ce qu’il faut retenir…

•••• GENEVA WATCH DAYS : la fête est finie, mais ce fut une très belle fête que ces journées horlogères qui marquent désormais la rentrée horlogère à Genève. Un temps d’été, une communauté horlogère joyeuse de se retrouver en petit comité [on comptait tout de même une cinquantaine de marques mobilisées pour l’occasion, officiellement ou officieusement], un format de manifestation très souple et décontracté, dans le goût « cool chic » et, bien sûr, plein de merveilles à découvrir dans tous les palaces des bords du lac [nous présentons certaines de ces montres ci-dessus]. Si le bilan est commercialement très positif, tout le monde ayant bien vendu ce qui était présenté [avec parfois des carnets de commandes pleins jusqu’en 2023], l’avenir économique, géopolitique et sociétal inquiète plus d’un état-major : des changements majeurs sont à l’œuvre, avec des mutations très rapides sur les marchés et dans les modulations de la demande – or, les maisons horlogères ont besoin de temps et de visibilité, ce que le nouvel ordre mondial ne garantit plus... •••• GRAND PRIX D’HORLOGERIE DE GENÈVE : on prend les mêmes et on recommence ? La présélection des 90 marques finalistes du GPHG 2022 (qui attribuera 20 prix aux « montres de l’année ») vient d’être mise en ligne : on remarquera dans ce premier écrémage par les 650 Académiciens du pré-jury une nette sous-représentation des « petites marques » qui étaient pourtant très majoritaires dans les maisons inscrites et une sur-représentation des marques déjà multi-récompensées par un GPHG e plus en plus « lâché » par ses grandes marques. Un chiffre révélateur de cette endogamie horlogère : 85 % des marques présélectionnées ont déjà reçu un prix au cours des années précédentes et on trouve 90 % de marques suisses dans une finale qui entend pourtant représenter les maisons de toute la planète. Une originalité dans le cadre du conflit en Ukraine : deux marques russes sont sélectionnées pour cette finale, qui aura décidément du mal à créer la surprise ! •••• SEQUENT : toutes les montres connectées ne sont pas ces objets tristes, standardisés et fonctionnels qu’on imagine. Sequent a décidé de dérider la carpo-connexion avec une montre « automatique » qui se recharge avec les mouvements du poignet : une montre qui ne ressemble justement pas à une montre connectée et qui se situe dans la tradition de ce qu’étaient autrefois les Swatch – de l’insolence sans arrogance et du décalage sans étalage ! Voici donc une Sequent revue et corrigée par Seconde/seconde, un des plus bouillonnants des jeunes laboratoires créatifs français. On en redemande !

• LE QUOTIDIEN DES MONTRES

Toute l’actualité des marques, des montres et de ceux qui les font, c’est tous les jours dans Business Montres & Joaillerie, médiafacture d’informations horlogères depuis 2004...

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