"Gouvernement technique" : un mécano au ministère des garages ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Emmanuel Macron et Gabriel Attal.
Emmanuel Macron et Gabriel Attal.
©Ludovic MARIN / POOL / AFP

Blague belge

Ce n’est pas parce qu’on parle de "mécanique institutionnelle" qu’on s’en tirerait mieux avec des institutions mécaniques.

Hugues Serraf

Hugues Serraf

Hugues Serraf est écrivain et journaliste. Son dernier roman : La vie, au fond, Intervalles, 2022

 

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La grande idée à la mode, en cas de majorité introuvable, c’est le « gouvernement technique ». Personne ne sait exactement ce que c’est comme animal, s’il a un bec de canard ou une trompe d’éléphant, mais tout le monde en parle et a l’air de se réjouir de la perspective en lâchant la même vanne déjà fatiguée sur la Belgique (qui en aurait eu un pendant deux ans et jamais la vie n’aurait été aussi belle outre-Quiévrain).

Et dans notre pays idéologisé jusqu’à la moëlle, où les deux-tiers des électeurs votent pour des Bardella ou des Boyard de 12 ans et demi qui s’envoient des auteurs qu’ils n’ont pas lus et des concepts qu’ils ne maîtrisent pas à la figure pour mieux s’arrimer à leur filiation respective, être gouvernés par des mécaniciens sans surmoi politique serait désormais la situation idéale…

Mais avant que la Belgique, dont personne n’a l’air de vraiment savoir grand-chose (à commencer par le fait que dans ce micro Etat fédéral, il y a un gouvernement tous les 300 mètres), ne fasse l’expérience d’une vie sans capitaine de pédalo, les cabinets composés de « spécialistes apolitiques » étaient surtout l’apanage des régimes autoritaires sud-américains qui tenaient à rassurer les marchés pendant qu’ils remplissaient les stades : un technocrate de la médecine au ministère de la Santé, un technocrate de la pédagogie au ministère de l’Education, un technocrate du saut en hauteur au ministère des Sports, un technocrate de la technocratie au ministère de la Technocratie...

Le sentiment serait donc partagé que tous ces experts dépassionnés mettraient immédiatement leur expertise dépassionnée au seul service de l’intérêt commun, contrôleraient dépenses et recettes avec juste la bonne rigueur du bon père de famille, recruteraient juste le bon nombre de bons fonctionnaires, et proposeraient systématiquement la bonne solution pragmatique tirée du bon manuel à chaque problème…

Franchement, ça a l'air cool. Il est vrai qu’il serait con de s’en priver. Je me demande d'ailleurs pourquoi on n’y avait pas pensé avant. Après tout, si j’amène ma voiture au garage pour un problème de parallélisme, je ne veux pas que ce soit le comptable qui la prenne en charge. Logique. Carré. Imparable. McKinsey-ien.

Même moi, en écrivant ça, je finis par être pratiquement convaincu et à deux doigts de demander la nationalité belge, ne courant plus le risque, avec un second passeport, d’être empêché de devenir ministre puisque je ne suis spécialiste de rien et qu’on ne me l’aurait jamais proposé de toute manière.

N’empêche, il y a quelque chose d’un peu timide et low-tech dans ce désir d’un gouvernement « by the book », voire même d’un peu coûteux si tous ces spécialistes doivent être rémunérés autant qu’un ministre à idéologie encombrante : un abonnement à la dernière version de ChatGPT, c’est à peine 20 balles par mois TTC et ça peut faire le boulot tout aussi bien. 

Préparez toutefois à la retraite à 70 ans et à un budget de l’État équilibré aux petits oignons  : l’intelligence artificielle, elle sait encore mieux se servir d’Excel qu'un expert dépassionné belge...

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