Zone Franche
Antisémitisme de droite, antisémitisme de gauche : ne faites plus d’impair, apprenez à les distinguer
Rien n’est plus gênant, dans un dîner de gauche, que d’évoquer son hostilité aux juifs sans préciser qu’elle part d’un bon sentiment.
Le sketch des Inconnus sur les bons chasseurs est tellement mis à toutes les sauces qu’on hésite désormais à y faire référence, mais c’est plus par crainte de tomber dans le cliché que parce que sa pertinence aurait été sapée par sa popularité.
Là tout de suite, je viens de lire la tribune que co-signent dans Le Monde Arie Alimi, avocat emblématique de la gauche radicale, et Vincent Lemire, un historien spécialiste de Jérusalem mais pas beaucoup plus à droite non plus, et je me les figure assez bien tous les deux se promenant dans la campagne avec leurs 22 long rifle et leurs verres de lunettes en cul de bouteille, expliquant pâteusement la différence entre le bon antisémitisme et le mauvais antisémitisme à un reporter TV médusé...
Car s’ils sont d’accord pour se désolidariser de Mélenchon sur la question d’une judéophobie qui ne serait plus que « résiduelle » (ils rappellent eux-mêmes qu’on assisterait plutôt à une véritable explosion des actes antisémites depuis un an), c’est pour mieux inviter le lecteur à distinguer la haine des juifs venue de la gauche de la détestation des juifs arrivée par la droite :
« Non, il n’y a pas d’équivalence entre l’antisémitisme contextuel, populiste et électoraliste instrumentalisé par certains membres de La France insoumise, et l’antisémitisme fondateur, historique et ontologique du Rassemblement national, qui défend la préférence nationale, dénonce les ressortissants binationaux et attaque l’« anti-France » depuis toujours et avec constance », assurent-ils.
OK, objection retenue. Lièvres à kippa, faisans à schtreimel et renards à prépuce apprécieront.
Mais parce qu’ils admettent qu’en dépit de leurs origines ontologico-topographiques différentes, les deux antisémitismes sont aussi toxiques l’un que l’autre, les antidotes suggérés ne sauraient être plus surprenants :
« Le premier, nous devons le combattre pied à pied, programme à l’appui, sans baisser les yeux, en prenant les électeurs à témoin pour démontrer que l’antisémitisme est la négation même de nos valeurs communes. Le second, nous devons le battre, dans les urnes et dans l’urgence, pour éviter que la France ne renie son identité républicaine en renouant avec les pires pages de son histoire ».
Ainsi, c’est en votant pour les promoteurs du bon antisémitisme tout en expliquant à leurs supporters qu’il n’est pas la solution à leurs problèmes de fin de mois qu’on rendra ce fléau résiduel pour de bon, mais c’est au contraire en battant les fans du mauvais antisémitisme dans les urnes qu’on ramènera la joie et l’harmonie dans les foyers.
Cette nouvelle version du sketch des chasseurs, franchement, elle donne plutôt envie de jouer les pêcheurs à la ligne dans 15 jours...
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