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30% des Français pensent que François Hollande ne reformera plus d’ici l’élection de 2017, 46% qu’il ne le fera qu’à la marge
©Reuters

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En dépit des nombreuses réformes annoncées par le gouvernement, la majorité des Français reste très sceptique vis-à-vis de la capacité (et de la volonté !) de l’exécutif à réformer le pays. Si la France parait irréformable, c'est peut-être plus en raison d'un gouvernement qui promet monts et merveilles mais fait toujours volte-face.

Jérôme Fourquet

Jérôme Fourquet

Jérôme Fourquet est directeur du Département opinion publique à l’Ifop.

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Atlantico : Seuls 6% des Français semblent croire que le gouvernement mènera des réformes importantes d’ici 2017. Qu’est-ce que cela traduit de cette image réformiste que François Hollande cherche à se construire ? Pourquoi n’y parvient-il pas ?

Jérôme Fourquet : Dans un soucis d'objectivité, il convient de préciser que si 6% des Français pensent que le gouvernement mènera des réformes importantes d'ici 2017, 18% estiment que les réformes menées seront "assez importantes". On peut donc dire qu'un quart des Français font ce constat, jugeant le gouvernement réformiste. C'est un score très faible, mais il faut garder à l'esprit qu'il reste encore un an et demi avant la fin du mandat de François Hollande. Or, on sait que ce n'est pas en dernière partie de mandat que l'ardeur réformatrice est la plus forte. En rassemblant les réformes "importantes" et les réformes jugées "assez importantes", le gouvernement ne parvient à convaincre qu'un quart des Français. Cela s'inscrit effectivement en décalage avec le crédo gouvernemental tenu à l'Elysée, à Matignon où à Bercy. Emmanuel Macron est récemment monté au créneau pour défendre une nouvelle loi Macron II, sur l'univers des start-ups, de l'économie numérique et digitale. De nombreux ballons d'essais ont également été envoyés en matière de fiscalité, sur l'impôt à la source... La fusion entre l'impôt sur le revenu et la CSG revient comme un serpent de mer (et, pour le coup, il s'agirait d'une réforme majeure). Autres ballons d'essais : ceux concernant une éventuelle réforme du marché du travail.

Le crédo gouvernemental, officiel, c'est celui-ci. Les mois et les semestres qui nous séparent aujourd'hui de l'élection présidentielle ne seront pas des mois et des semestres perdus : le gouvernement continuera à adapter la France à l'économie d'aujourd'hui. Concrètement, cela implique que le gouvernement mènera les réformes qui s'imposent et c'est vers ce but que convergent les différentes annonces qui se sont succédées à échéances rapprochées. Or, notre sondage pour Atlantico.fr montre qu'une grande partie des Français reste très dubitatif sur la réalité et l'intensité de cette intention. C'est également le cas vis-à-vis de la détermination du gouvernement à poursuivre sur cette voie, mettre en pratique leurs annonces. De la même façon que les Français n'avaient pas cru à la baisse du chômage, que la hausse de la fiscalité épargnerait 90% d'entre eux, ils sont aujourd'hui très sceptiques sur la détermination du gouvernement à poursuivre.

Comme c'est attendu, ce scepticisme atteint son paroxysme dans les rangs de l'électorat de droite et du Front National. Il touche cependant l'électorat du Parti Socialiste : 40% des sympathisants du PS pensent que le gouvernement se contentera de réformes à la marge et 12% d'entre eux estiment qu'il ne réformera plus du tout. Un électeur socialiste sur deux pense donc que des réformes vont encore advenir.

A gauche comme à droite, on peine à croire à la capacité du Président à réformer. Le fait que seul 14% des sympathisants PS soient convaincus aujourd’hui indique-t-il une régression de la portée de sa voix au sein même de sa famille politique ?

Il ne s'agit pas uniquement de remettre en doute la capacité du Président à réformer, mais aussi sa volonté à le faire.

Ce gouvernement et ce Président ont mené un certain nombre d'annonces, souvent fortes et implicantes, qu'il s'agisse de la fiscalité ou du chômage. Jusqu'à présent, les Français n'ont pas été convaincu par les faits. Le chômage a baissé le mois dernier, mais en l'absence d'une confirmation de cette tendance sur la durée, cela fait des mois et des mois que le Président de la République se prend en retour de bâton cette promesse, à chaque fois que l'Insee dévoile les chiffres du chômage. Idem concernant le matraquage fiscal et la non-hausse des impôts, supposée être uniquement cantonée aux familles les plus aisées. En outre, les pataquès, auxquels nous avons assisté la semaine passée, sur la hausse de la fiscalité pour toute une partie des retraités, la suppression de la baisse des dotations aux collectivités locales et la diminution de l'Allocation Adulte Handicapé (AAH)... Tous ces éléments ne contribuent pas à donner le moindre crédit au gouvernement. Cela ne légitime pas sa parole, pas plus que cela ne la valide. Force est de constater, aujourd'hui, que cette parole est très fortement dévaluée. Notamment quand on la met en regard avec des faits objectifs. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, il est logique que les Français (y compris une bonne partie des sympathisants du PS) doutent des propos de membres éminents du gouvernement. Particulièrement quand ceux-ci annoncent que l'adaptation de notre pays à une économie contemporaine et moderne va bon-train et qu'ils y travaillent.

Au fond, nous faisons face au même phénomène que celui concernant les cotes de popularité. La popularité de Manuel Valls, celle de François Hollande... Toutes deux sont aujourd'hui à de très faibles niveaux.  Ce dernier s'explique en partie par des promesses non tenues, certes, mais aussi parce que tout une frange de la base électorale du Parti Socialiste est mécontente, insatisfaite. C'est ce qui explique la faiblesse de cette cote de popularité de François Hollande, mais également la défiance vis à vis de sa parole.

François Hollande joue aujourd’hui son quinquennat et il semble avoir opté pour une ligne réformiste, en opposition à une ligne plus à gauche. A-t-il fait le bon choix ? Laquelle de ces deux lignes semble la plus porteuse, électoralement parlant ?

Je ne suis pas sûr que l'alternative se pose en ces termes. Dans la mesure où beaucoup de Français (y compris à gauche) savent désormais que la marge de manoeuvre est extrèmement réduite, la grille de lecture qui s'impose à eux n'est plus forcément idéologique ; plus ou moins à gauche... La question n'est plus forcément d'avoir plus ou moins de redistribution, si celle-ci est payée à crédit et qu'il faudra rembourser plus tard. Ca n'est ni souhaitable, ni viable.

Ce que les Français attendent, notamment à gauche, c'est que le gouvernement soit en capacité de démontrer une amélioration objective de la situation au moins sur un certain nombre de sujets. Chômage, fiscalité, comptes publics, industrialisation... sur tous ces sujets-là, l'électorat s'intéresse davantage aux résultats qu'aux moyens. Or, l'électorat n'en voit pas aujourd'hui. Je pense que, par soucis de cohérence, François Hollande n'avait pas d'autre choix que celui de suivre la ligne qu'il suit aujourd'hui. La clarté et la lisibilité de son action impliquaient de poursuivre dans cette voie, à partir du moment où il s'y est engagé, via le pacte de compétitivité, les nominations de Manuel Valls ou Emmanuel Macron. Son champ d'action, qui manque déjà de lisibilité, en aurait manqué plus encore s'il avait fait volte-face et par conséquent François Hollande est condamné à aller jusqu'au bout dans cette logique. Il n'est plus possible de faire machine arrière et ce qu'il faut absolument pour valider cette ligne, c'est que l'économie se redresse ; qu'il puisse présenter des chiffres valorisants aux Français.

Donner un grand coup de barre à gauche, aujourd'hui, cela passerait pour de l'électoralisme. De plus, pour les mêmes raisons qui poussent les Français à être très sceptiques vis-à-vis des baisses d'impôts, ceux-ci auraient probablement tendance à demander "avec quel argent" cette politique serait menée. Le septicisme à l'égard de cette ligne est important, et le bénéfice attendu est loin d'être énorme.

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