Vrai ou faux : revenir de Londres en jet privé moins cher qu’en Eurostar ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Il est aujourd'hui possible d'effectuer un aller simple en jet privé pour un prix moins élevé qu'en première classe en Eurostar.
Il est aujourd'hui possible d'effectuer un aller simple en jet privé pour un prix moins élevé qu'en première classe en Eurostar.
©DANIEL LEAL-OLIVAS / AFP

Par ici le bon plan

Londres-Paris en jet privé, quatre places, pour environ 175 euros par personne, c'est possible. Et aussi incroyable cela puisse paraître, un billet de première classe en Eurostar peut coûter près du double.

Alain Bonnafous

Alain Bonnafous

Alain Bonnafous est Professeur honoraire à l’Université de Lyon et chercheur au Laboratoire d’Economie des Transports dont il a été le premier directeur. Auteur de nombreuses publications, il a été lauréat du « Jules Dupuit Award » de la World Conference on Transport Research (Lisbonne 2010, décerné tous les trois ans).

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Atlantico : Il est aujourd'hui possible d'effectuer un aller simple en jet privé (voir ici) de Londres à Paris (4 places, environ 700 euros, soit 175 euros par personne), pour un prix moins élevé qu'en première classe en Eurostar ou sur une compagnie aérienne telle qu'Air France ou British Airways. Comment expliquer un tel paradoxe ?

Alain Bonnafous : C'est tout simplement l'état du marché qui commande. Pour un usager qui doit faire Paris-Londres en aller-retour dans la même journée, il est évident que la meilleure solution est l'Eurostar. Par ailleurs le service aérien, lui, est soumis à une forte concurrence et ne se trouve pas au meilleur de sa forme compte tenu du ralentissement économique actuel, d’où des prix agressifs. Les salariés, pour continuer sur cet exemple, sont beaucoup moins souvent envoyés par leurs entreprises en représentation à l'étranger, à cause de l'état de leurs finances. L'alternative qui se présente aux usagers est tout de même assez favorable au transport ferroviaire, qui se déplace d'un centre-ville à un autre, avec une certaine fiabilité. Prenons l'exemple d'un expert de haut niveau : ce genre de personne représente un coût élevé pour l'entreprise qui fait appel à ses services. Vu son coût horaire, le commanditaire aura intérêt à raccourcir au maximum sont temps de transport, et donc à lui faire prendre le train plutôt que l'avion, même si c'est plus cher.

Sait-on si ces petits avions sont nombreux à voyager à vide ?

En la matière, les éléments statistiques sont rares, si ce n'est inexistant. Les seuls à disposer de données utilisables sont les opérateurs. Sur l'aspect plus qualitatif, ces petites compagnies ont les mêmes pratiques que les grandes lignes aériennes ordinaires : il est toujours préférable de remplir un siège pour une vingtaine ou une trentaine d'euros, que de le garder vide, étant donné que le coût marginal du passager est extrêmement faible. Aujourd'hui internet permet de rendre l'information plus transparente : les éventuels passagers savent au dernier moment sur quel vol ils peuvent trouver des places pas chères, sachant qu'avec ou sans eux, l'avion effectuera tout de même le vol. C'est le principe de l'application JetSmarter, lancée il y a un an. Etant donné que ce service ne coûte pas grand-chose à mettre en place, sa rentabilité fait peu de doute.

De manière générale, comment expliquer le phénomène de l'avion plein à l'aller, et quasi vide au retour ? Le principe des vases communicants ne devrait-ils pas garantir un certain équilibre?

Dans tous les systèmes de transport, et ce sans exception, on observe une dissymétrie des flux. Voyez la densité du trafic dans un réseau express régional à une heure de pointe : dans l'autre sens, les trains ont un taux de remplissage extrêmement faible, car ils doivent repartir pour faire le "ramassage" dans l'autre sens. Au plan international, on observe de pareilles dissymétries entre pays émetteurs et pays touristiques. En fret routier ou ferroviaire également, les retours à vide sont considérables.

Comment en est-on arrivé à une situation où prendre l'avion coûte de manière générale beaucoup moins cher que le fait de prendre le train ? Le confort et la proximité des gares avec le centre-ville suffisent-ils à justifier de tels prix dans le ferroviaire ?

Tout dépend du service que l'on achète. Le vendeur cherche à obtenir le maximum du consentement à payer de l'acheteur. Sur certains parcours, le train est le seul à pouvoir fournir la possibilité de se déplacer. Sur une ligne particulièrement concurrentielle en revanche, sur laquelle on trouvera un opérateur traditionnel comme Air France mais aussi des compagnies low cost, on aura un choix beaucoup plus large de tarifs. Dans chaque cas de figure, le ou les acteurs en présence font une estimation du maximum qu'ils peuvent retirer des voyageurs. Réciproquement, le demandeur choisit son transport de manière optimale en termes de coût.

Le transport aérien est-il devenu le transport "du pauvre", et le train celui du "nanti" ?

Non, car beaucoup de personnes savent trouver les billets pas trop chers : il suffit de s'y prendre à l'avance, ou d'effectuer une veille permanente pour saisir le bon moment. En avion, c'est la même chose. Une autre raison pour laquelle je ne parlerais pas de "transport du pauvre" par l'avion, est que si ce ne sont pas forcément les plus riches, ce ne sont pas non plus les plus défavorisés qui prennent ce type de transport. Les transports se sont plutôt démocratisés, et il n'y a pas un, mais des marchés, avec toutes les offres et toutes les demandes différentes que cela suppose.

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