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Vous avez dit : dépassement du clivage droite-gauche ?
©Reuters

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Théoriquement, on envoie souvent l'opposition droite-gauche aux oubliettes, et ce bien prématurément. Tout indique que ce clivage existe encore.

Michel Fize

Michel Fize

Michel Fize est un sociologue, ancien chercheur au CNRS, écrivain, ancien conseiller régional d'Ile de France, ardent défenseur de la cause animale.

Il est l'auteur d'une quarantaine d'ouvrages dont La Démocratie familiale (Presses de la Renaissance, 1990), Le Livre noir de la jeunesse (Presses de la Renaissance, 2007), L'Individualisme démocratique (L'Oeuvre, 2010), Jeunesses à l'abandon (Mimésis, 2016), La Crise morale de la France et des Français (Mimésis, 2017). Son dernier livre : De l'abîme à l'espoir (Mimésis, 2021)

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Le dépassement du clivage partisan droite-gauche, contrairement à ce qui se dit ou s’écrit, n’a pas eu lieu. A défaut d’être une probabilité, il reste une simple possibilité. Mais il n’a pas eu lieu. Le « macronisme » n’est pas ce dépassement. En théorie et en désir peut-être, dans ses actions sûrement pas. La politique présidentielle et gouvernementale est, objectivement, une politique libérale (de droite donc), saupoudrée de ci de là de mesures à caractère ou d’apparence sociale.

Nous assistons donc aujourd’hui, moins au déclin du clivage partisan (même affaiblie, même amoindrie, les gauches demeurent une réalité en France ; même surclassée par l’extrême-droite, la droite républicaine reste présente dans le paysage politique de ce pays), qu’au recul d’une organisation de la vie politique sur la base du système des partis. Tous les observateurs le constatent : il existe bel et bien une « crise des partis politiques », crise, comme je l’ai jadis expliqué (cf. L’Individualisme démocratique, L’œuvre, 2010), qui est elle-même la résultante d’une « crise des leaderships » mais aussi des idées politiques. Le système des partis est en effet rongé par le pragmatisme et les « postures » des hommes et femmes qui les incarnent. Hormis, à gauche quelques dirigeants comme Jean-Luc Mélenchon et Benoît Hamon (je ne vois personne à droite) qui ont fait l’effort d’une véritable réflexion idéologique, les responsables politiques actuels sont vides d’idées.

« Crise des leaderships », disais-je. Crise normale dans le processus de croissance démocratique. Une société individualiste comme la nôtre a le dégoût des chefs qui incarnent la négation de l’horizontalité citoyenne exprimée (toujours aussi mal) par la démocratie participative. Or, les partis politiques, vieille tradition du XIXème siècle, à la structuration verticale (à notre sens, indépassable), a besoin de chefs pour fonctionner. Une gauche était-elle pensable sans Jaurès, Blum, Mendès, Mitterrand, une droite sans Poincaré, Pinay, De Gaulle, Chirac ? Non évidemment. Mais la démocratie est allergique aux chefs tandis que les Français – suprême paradoxe – les réclament dans leur inconscient collectif resté très monarchique – pour les tuer évidemment ! La difficulté se double d’une crise du charisme politique et de la culture de nos dirigeants, guère supérieure bien souvent à celle d’un Donald Trump aux Etats-Unis.

Les partis politiques sont, quoiqu’on puisse dire ou écrire, indépassables parce qu’ils sont inhérents au régime parlementaire. Ce sont eux qui sélectionnent les « élites » politiques appelées à siéger dans les assemblées ou à s’asseoir sur le « trône » de l’Etat. Le mouvement En Marche, qui se voulait à l’origine non-partisan, n’a -t-il pas dû se transformer lui-même en parti fonctionnant à peu près comme les autres ?

Le président Macron, s’il a incontestablement contribué à perturber le fonctionnement des partis, et donc du clivage droite-gauche, n’est en aucun cas le responsable majeur de la crise affectant les partis dans leurs différentes expressions. Il le met seulement davantage en lumière.

Parce qu’il est essentiellement un pragmatisme, le « macronisme » ne survivra pas à son inventeur, Emmanuel Macron. En 2027 – au plus tard (car le quinquennat ne semble pas profiter aux présidents sortants : double échec de MM. Sarkozy et Hollande) -, le jeu modernisé des partis reprendra son cours dans un paysage politique lui aussi rénové par une « révolution citoyenne ».

Michel Fize, sociologue, ancien conseiller régional d’Ile-de-France, auteur de L’Individualisme démocratique : les défis de la démocratie participative (Ed. de L’œuvre, 2010)

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