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L’Union européenne laisse-t-elle de côté la compétitivité de son agriculture ?
L’Union européenne laisse-t-elle de côté la compétitivité de son agriculture ?
©LOIC VENANCE / AFP

Politique agricole

L’Union européenne prévoit de réduire le volume de l’agriculture pour privilégier l’écologie au détriment de la sécurité alimentaire. Les restrictions liées aux pesticides aux Pays-Bas vont notamment avoir des conséquences dramatiques sur l’agriculture du pays.

Samuel Poidevin

Samuel Poidevin

Samuel Poidevin est ingénieur agronome. Il développe de nouvelles matières actives naturelles pour l'agriculture.

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Atlantico : Dans une note publiée sur Linkedin, vous pointez une volonté de l’Union européenne de réduire le volume de l’agriculture pour privilégier l’écologie. Quels signaux nous montrent cela ? 

Samuel Poidevin : Dans la nouvelle PAC, il sera exigé 4 % de jachère sur les terres du continent. Mais cette mesure n’est pas gravée dans le marbre et l’Union européenne hésite encore à l’inscrire ou non dans la PAC. Pour les agriculteurs, cette hésitation est dangereuse et coûteuse surtout que cela implique de nombreuses choses car avec 4 % de terres en jachère on réduit la quantité de nourriture produite. Pourtant, la FAO nous conseille de produire plus de denrées alimentaires étant donné la multiplication des sécheresses et des événements climatiques. La Commission européenne veut passer à une agriculture plus naturelle, plus écologique. C’est une bonne chose, mais la meilleure chose serait de faire une agriculture écologiquement intensive et pas seulement écologique. 

Les instances de l’Union européenne oublieraient-elle que la mission de l’agriculture est tout d’abord de nourrir des populations ? 

Exactement ! C’est assez typique de cette institution et on voit que leur politique amène des situations assez aberrantes. Quand on regarde les chiffres des importations de poulets, on voit que plus de 50 % des poulets consommés en France sont importés et majoritairement du Brésil. Il s’agit de poulets industriels, prêts à cuire. En France, on produit des poulets de qualité, mais il est compliqué de faire des poulaillers industriels. 

La stratégie de l’Union européenne laisse-t-elle alors tomber notre sécurité alimentaire pour la confier à d’autres pays ? 

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Cette instance dit vouloir réduire les méfaits de l’agriculture industrielle et non de vouloir laisser tomber la sécurité alimentaire. Néanmoins, il faut d’abord voir ce qu’est l’agriculture industrielle en Europe. En France, en moyenne, une ferme c’est 69 ha, la situation est la même en Allemagne alors qu’aux États-Unis la moyenne se situe autour de 128 ha. 

Derrière ce discours anti-industrie, elle met surtout en cause l’azote, les engrais de synthèse et les pesticides. Mais lorsque l’on regarde l’agriculture biologique qui n’utilise que très peu de pesticides, elle perd jusqu’à 50 % de rendement. Pour avoir le même rendement que l’agriculture industrielle, il faudrait multiplier par deux les surfaces or les surfaces ne font que baisser. 

Un problème va arriver : le prix de la nourriture va augmenter. Et le bio peut difficilement prendre plus de parts de marché étant donné son coût. Aller vers une agriculture de qualité est possible, mais il faut savoir que l’agriculture européenne est déjà de qualité. En ce qui concerne les pesticides, l’Union européenne a déjà les restrictions les plus strictes au monde. 

L’Union européenne laisse-t-elle de côté la compétitivité de son agriculture ? Quels risques y a-t-il à cela ? 

La situation du vin en France va devenir une norme pour beaucoup d’autres produits produits. Je m’explique, dans notre pays, nous produisons beaucoup de vin, mais le vin français est massivement exporté, alors nous importons aussi beaucoup de vin de mauvaise qualité pour de multiples usages. On retrouve cette situation avec le poulet, la denrée est importée massivement avec des normes beaucoup moins restrictives.

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Dans cette même note, vous avez évoqué le cas des Pays-Bas et des conséquences dramatiques que l’interdiction des pesticides va faire sur l’agriculture du pays ?

Les Pays-Bas ont eu une dérogation sur les normes au nitrate. Ainsi, ils ont pu continuer à produire sans trop se soucier de ce problème. Aujourd’hui, le gouvernement en place a commencé à décider de limiter les nitrates ce qui va amener à la situation suivante : 90% des éleveurs de certaines régions vont purement et simplement disparaître car l'élevage est considéré comme étant à l'origine des émissions d'azote. Les agriculteurs et surtout les éleveurs ne vont plus pouvoir travailler et cela va changer la carte des Pays-Bas. 

La stratégie Farm to Fork veut baisser drastiquement l'utilisation de pesticides de synthèse, qu'en pensez-vous ?

Si on ne permet pas aux agriculteurs d’appliquer des traitements phytosanitaires, la production agricole va baisser drastiquement. Les pesticides ne sont pas utilisés pour s’amuser par les agriculteurs et ils savent aujourd’hui les conséquences de leur usage. En France, par exemple, très peu de producteurs utilisent les pesticides sans se protéger. Si on baisse voire on interdit l’utilisation de pesticides, il pourrait y avoir 50 % de rendement en moins et 50 % de chiffre d'affaires en moins. Si l’on ne traite pas le mildiou, c’est 50 % de pertes minimum voire 100 %.

Cette situation rappelle celle que l’on connaît avec le nucléaire. Sans raison, on considère cette énergie comme mauvaise alors on ne veut plus la développer ou on l’abandonne. Pourtant, si l’on regarde côté climat, le nucléaire émet peu comparé aux éoliennes ou au gaz. Par dogmatisme parfois, on prend des chemins qui ne sont pas forcément les bons et après il faut revenir en arrière. 

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