Voilà pourquoi nombre de parents peinent à construire la confiance en soi de leurs enfants à trop vouloir bien faire<!-- --> | Atlantico.fr
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Certains enfants naissent plus sûrs d’eux, plus hardis que d’autres.
Certains enfants naissent plus sûrs d’eux, plus hardis que d’autres.
©Pexels de Pixabay

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Pour de nombreux parents, aider leurs enfants à construire une bonne confiance en soi est primordial pour leur permettre d'affronter l’avenir et ses difficultés. Mais les moyens d'y parvenir sont complexes.

Maurice Berger

Le Docteur Maurice Berger est pédopsychiatre, ancien professeur associé de psychologie de l’enfant Université Lyon 2, responsable du diplôme universitaire « Expertise légale en pédopsychiatrie et psychologie clinique de l’enfant ». Il a publié en 2019 Sur la violence gratuite en France: Adolescents hyper-violents, témoignages et analyse (éditions de l'Artilleur). 

 

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Atlantico : Pour de nombreux parents, il est très important que leurs enfants acquièrent une bonne confiance en soi pour affronter l’avenir et ses difficultés. Pourquoi est-il compliqué pour les parents de trouver le bon équilibre vers la construction d’une bonne estime de soi ? À vouloir trop en faire, pourraient-ils les exposer un peu trop à la déception et l’échec ? 

Dr Maurice Berger : La confiance en soi peut se définir de multiples manières. Ce peut être croire en ses capacités concernant une tâche précise à réaliser, mais il est plus intéressant de penser cette expression en terme général : avoir confiance en sa capacité de s’adapter, de faire face à ce qui peut arriver, de modifier son existence, et de supporter, au niveau amour propre, de ne pas parvenir à réaliser un objectif fixé, en particulier en présence d’autrui.

Plusieurs auteurs insistent sur la nécessité de ne pas confondre la confiance en soi qui est la capacité d'atteindre un objectif, et l'estime de soi qui est une évaluation de sa propre valeur. Je pense cependant que les deux sont en partie liées : une bonne estime de soi facilite la confiance dans la capacité de réaliser certaines tâches.

La confiance en soi est un processus évolutif pendant toute l’existence de chaque personne. Nous naissons tous avec un tempérament particulier, il suffit d’avoir eu deux enfants pour observer que dès la naissance, ils ont une personnalité différente avant d’avoir reçu la moindre influence éducative. Donc certains enfants naissent plus sûrs d’eux, plus hardis que d’autres. Mais beaucoup plus tard, à l’âge adulte, les expériences de la vie, professionnelle et affective en particulier, peuvent accroître la confiance que nous avons en nos capacités ; c’est ainsi que certaines personnes qui étaient des enfants très timides s’exprimant d’une voix quasiment inaudible peuvent mener et gagner une campagne électorale. Et entre la naissance et l’âge adulte, il y a l’influence de l’éducation donnée par les parents.

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On peut distinguer de manière artificielle deux sortes d’expériences.

La première se situe pendant les premières années de sa vie : un nourrisson et un enfant petit ont besoin d’être admirés. Tout bébé, aussi fripé soit-il, est le plus beau bébé du monde pour ses parents. C’est cette admiration inconditionnelle qui lui donne le sentiment de sa valeur. Par la suite, il a besoin de ce regard des adultes pour considérer que ce qu’il fait est bien, joli, et acquérir ainsi ce sentiment que ce qu’il a réalisé est adapté, réussi. « Regarde ce que j’ai dessiné ! », demandent à répétition les enfants et la réponse de l’adulte a alors une grande importance car c’est elle qui détermine si l’entreprise de l’enfant a de la valeur ou non.

La deuxième sorte d’expérience se situe au moment où les parents cessent de protéger leur enfant d’un échec, et/ou s’opposent à des paroles ou des actes qu’ils réprouvent. L’échec n’est pas dû au fait que l’enseignant a donné un devoir trop difficile, etc. Faire une grande partie du devoir à la place de l’enfant ne lui sert pas, on n’apprend réellement que par la méthode des essais et des erreurs.

Il y a aussi ce qu’un collègue appelle l’épreuve du « non » surmontée ensemble, c’est-à-dire lorsqu’un parent émet un « non » clair à son enfant, qui peut lui dire en retour qu’il ne l’aime pas. Mais ce qui est intéressant, c’est que face au « non » parental, l’enfant, ressente la confiance du parent en sa solidité et en sa capacité de pouvoir supporter ce refus ou cet interdit, ce qui augmente l’estime de lui-même.

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Quel est le bénéfice réel pour l’enfant d’acquérir une bonne confiance en soi ? Comment agissent les enfants avec une bonne estime de soi ? 

Un tel enfant n’est pas parasité par la crainte de ne pas y arriver, en particulier devant les autres, il accepte de ne pas connaître toutes les bonnes réponses, l’échec ne provoque pas chez lui une honte insurmontable. Surtout, il est capable de dire ce qu’il pense sans crainte excessive, et il peut montrer qu’il pense différemment en exposant ses arguments, même face à un groupe qui a une pensée homogène, et même face à un leader négatif (comme c’est le cas des leaders qui amènent un groupe à harceler un enfant). Sans confiance en soi suffisante, il se contentera de garder ces pensées en lui, ce qui sera source d’insatisfaction, et constituera même une certaine honte de ne pas avoir osé présenter son point de vue.

Tout être humain recevra pendant son existence de sérieuses claques concernant son amour propre. Ne pas avoir été trop protégé, avoir vécu des oppositions intra familiales en constatant qu’on pouvait y résister, sont des facteurs qui permettent d’amortir en partie ce genre de blessure narcissique.

Que devraient faire les parents pour favoriser une bonne confiance en soi chez leurs enfants ? 

Je suis sceptique sur l’efficacité des conseils donnés aux parents dans les médias car les difficultés éducatives qu’éprouvent certains parents peuvent être en lien avec leur histoire personnelle, en particulier leur enfance. Je dirai simplement qu’il est intéressant d’aider son enfant à faire tout seul, en fonction de son âge, en lui proposant de ne pas faire certaines choses à sa place mais en l’y préparant, qu’il s’agisse d’aller acheter du pain (en surveillant la sécurité de la zone), ou d’avoir une discussion ou d’expliquer sa position. On peut préparer avec lui les phrases qu’il va pouvoir utiliser, et même prendre le rôle de l’interlocuteur. Et si ça n’a pas marché, lui dire que c’est bien qu’il ait essayé, quand il sera un peu plus prêt, cela se passera mieux.

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Enfin je voudrais évoquer un problème un peu différent. Un certain nombre de parents inscrivent leurs enfants à de multiples activités en se disant que les habilités ainsi acquises leurs serviront plus tard et les mettront plus en confiance. Je ne suis pas convaincu du bénéfice. Les enfants ont besoin de moments sans occupation déterminée, passés à rêvasser, à feuilleter une revue ou autre, ce n’est pas une perte de temps. Ce qui est précieux, aussi, ce sont les moments passés avec les parents sans aucun but pédagogique et sans être sur un jeu vidéo à deux : moments de jeux de société, de dessins, de construction, de puzzle, de sport ensemble. Et le quart d’heure du soir avant le sommeil où le parent prend le temps de passer un moment seul à seul et calme avec son enfant. Pour un enfant, savoir que s’il a eu un souci, son parent prendra le temps de l’écouter et d’y réfléchir est à l’origine d’un sentiment de sécurité qui participe à la confiance dans la capacité d’affronter le monde. Mais combien de parents prennent-ils encore ce temps ? Et si non, pourquoi faire des enfants ?

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