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Voilà d'où pourrait venir la prochaine pandémie
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Mieux vaut prévenir que guérir

Après le coronavirus, nous pourrions être amenés à connaître de nouvelles pandémies alors mieux vaut être renseignés sur les prochaines infections.

Serge Morand

Serge Morand

Serge Morand est chercheur au Cnrs et au Cirad. Il travaille également au Centre d’infectiologie Christophe Mérieux du Laos. Écologue évolutionniste et parasitologue de terrain, il conduit de nombreuses missions sur les relations entre biodiversité et maladies transmissibles. 

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Atlantico.fr : Après le Covid-19, d’autres épidémies pourraient se transformer en pandémie mondiale. Les chauves-souris asiatiques auraient-elles encore un rôle à jouer dans la propagation ? 

Serge Morand : Lorsque l’on voit les chiffres des épidémies, on constate une augmentation du nombre de cas ces cinquante dernières années. Dans une grande majorité, il s’agit de zoonose comme le Covid-19 et depuis les années 70 ces épidémies se pandémisent. 

Cette tendance lourde va connaître une chute en 2019-2020 car nous avons arrêté les transports internationaux. Localement, ce sont de petits clusters qui démarrent et qui se transforment en pandémie dans un monde globalisé. Il est très facile qu’un petit cluster rejoigne un hub international et c’est ce qui est arrivé. On peut imaginer que c’est ce qu’il s’est passé en Chine. Il s’agissait peut-être d’une transmission de la chauve-souris à l’homme puis le virus a rejoint Wuhan. Si on n’agit pas localement et globalement, nous sommes sûrs d’avoir d’autres situations similaires à l’avenir. De surcroît, cela concerne également les maladies animales et végétales car elles se globalisent aussi. 

Atlantico.fr : Selon vous, quels seront les modes de propagation pandémiques à regarder de près ? 

Serge Morand : Les zoonoses sont d’une importance capitale. Nous l’avons prévu mais nous l’avons pas vu venir… Suite à un exercice de simulation démarré par l’OMS en 2018 sur les maladies les plus dangereuses. Les coronavirus issus de chauve-souris avaient été mis en haut de la liste. Les chauves-souris jouent un rôle important mais elles ne sont pas seules, il y a aussi des coronavirus issus de rongeurs. Ils ont déjà circulé en Asie et notamment à Hong-Kong. 

Pour qu’une épidémie devienne une pandémie, il faut que la transmission soit adéquate. Il est beaucoup plus aisé de réagir face à Ebola car le taux de létalité est important, les symptômes apparaissent rapidement, ce qui permet de réagir vite. À la différence du Sars-Cov-2, Ebola se transmet par les fluides, la transmission se fait par un contact très proche. Les plus infectés sont ceux qui manipulaient les malades comme le personnel de santé. Le risque de transmission à la population générale est donc relativement faible.

Si l’on évalue les risques pour une prochaine pandémie, le facteur le plus important vient des virus transmis par la respiration et par aérosols, ce qu’on appelle les airborne. On a toutes les grippes, saisonnières issues de la faune domestique et de la faune sauvage. Il y a eu l’exemple du H5N1 ou du H1N1 : des maladies avec des taux de létalité importants avec une forte transmission. C’est le risque majeur ces prochaines années surtout avec l’augmentation de la population des animaux d’élevage. 

Atlantico.fr : Les moustiques constituent-ils eux aussi une menace ?

Serge Morand : Les moustiques peuvent être transmetteurs de la dengue et toutes les conditions sont actuellement présentes pour leur installation en Europe. Il y aussi les maladies comme Zika, Chikungunya qui peuvent faire leur arrivée. Il s’agit du même groupe de virus que celui de la fièvre jaune, tous originaire d’Afrique et des primates non-humains. Nous ne sommes pas à l’abri de l’émergence d’un nouveau virus venant d’un primate non-humain. 

Le changement climatique, lui aussi, aggrave le système et les niches environnementales de ces moustiques se multiplient dans les régions tempérées. Actuellement, ces moustiques sont aux portes de Paris alors qu’ils n’étaient pas encore là il y a une dizaine d’années. 

Atlantico.fr : Après les chauves-souris et les moustiques y-a-t-il une autre menace invisible ? 

Serge Morand : Oui, il s’agit du monde bactérien et en particulier d’une bactérie résistante aux antibiotiques. Nous nous sommes rendu compte de l’émergence d’un variant porté par un gène dans des bactéries. Ce gène peut coloniser d’autres bactéries du tube digestif de patients sans qu’ils s’en aperçoivent et les rendre résistantes aux antibiotiques de secours. Il y a une augmentation forte de multi-résistances des bactéries qui ne peuvent pas être traités par des antibiotiques classiques et ceux de secours. À part ces derniers, nous n’avons rien pour être guéris. Après son émergence vers 2014 en Chine, on s’est rendu compte que le gène de résistance s’est répandu sur l’ensemble de planète par la propagation de bactéries sur des poulets congelés ou des légumes. Cette situation est incertaine car on sait que toutes les conditions sont réunies pour que cela émerge localement et que cela se propage globalement. 

On a vu les échecs de nos stratégies de prédiction. On n’a jamais su savoir où et quand précisément les maladies nouvelles se sont développées. Les systèmes de surveillance n’ont pas les capacités ou les moyens de déterminer clairement les menaces. Au-delà de la prédiction, il y a la stratégie de la préparation qui est importante car comme on l’a vu on ne sait pas se préparer. Les grippes aviaires sont de plus en plus récurrentes mais on se retrouve dans la même situation qu’auparavant. On n’a rien prévu et on n’est toujours pas préparé. 

Comment éviter que l’on ait ces événements locaux qui sont les premiers facteurs de transmission ? 

C’est souvent dans des milieux uniformisés que ces maladies se propagent avec une augmentation des animaux d’élevage. Des conditions locales créent les conditions de transmission locale. Ce sont aussi des aussi des problèmes de transports avec une mondialisation des marchandises notamment sur les produits agricoles qui favorisent la transmission globale. Il va falloir travailler sur le local et le global. 

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