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Vaccination (presque) obligatoire : quid des cas particuliers et autres contre-indications ?
©Menahem KAHANA / AFP

Explications

Un nombre non négligeable de Français reçoivent des avis contradictoires des médecins qu’ils consultent au regard de leur situation médicale ou de vraies contre-indications à la vaccination. Quel sort pour eux une fois le passe sanitaire entré en vigueur ?

Philippe Juvin

Philippe Juvin

Philippe Juvin est professeur de Médecine, chef du service des urgences, HEGP, Paris. Il est également député des Hauts-de-Seine et conseiller municipal de La Garenne-Colombes.

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Michaël Rochoy

Michaël Rochoy

Michaël Rochoy est médecin généraliste. Il s'intéresse particulièrement au Covid-19 chez les enfants. Il est membre du Collectif Du Côté de la Science et cofondateur du collectif Stop postillons.

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Ludovic Toro

Ludovic Toro

Ludovic Toro est médecin, maire de Coubron (93), conseiller régional UDI et président de l’Observatoire Régional de Santé (ORS).

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Quelles sont les contre-indications pour le vaccin anti-Covid ?  Existe-t-il encore des zones de flou ?

Michaël Rochoy : Concernant les vaccins à ARN messager, il y a trois principales contre-indications : souffrir d'un  antécédent de syndrome inflammatoire multi-systémique pédiatrique (PIMS) (une complication relativement rare qui atteint certains enfants positifs au Covid-19), une hospitalisation suite à une première injection ayant entraîné une myocardite ou péricardite (les myocardites étant un peu plus fréquentes chez les garçons de 12 à 15 ans) et enfin avoir une allergie au polyéthylène glycol qui est l'un composants du vaccin (extrêmement rare, une dizaine de cas en France selon le Ministère de la Santé). Beaucoup de gens se posent des questions sur la grossesse. Ce n'est pas une contre-indication. Les femmes enceintes peuvent tout à fait se faire vacciner et ce dès le premier trimestre de la grossesse. 

Le collège national des gynécologues-obstétriciens français rappelle juste que comme le premier trimestre est le moment où il y a le plus de fausses-couches, de faux liens de causalité entre vaccin et fausses couches peuvent être faits.

Philippe Juvin : On peut ajouter que pour le vaccin AstraZeneca (à vecteur viral), il est spécifiquement contre-indiqué pour les patients ayant eu des syndrome de fuites capillaires ou des syndromes thrombotiques

Pour les zones de flou, c'est le problème de l'allergie en général, au-delà du vaccin. Certains classent parfois sous le nom d'allergie des symptômes qui ne sont pas de l'allergie. Par exemple, l'augmentin (un antibiotique) a pour effet secondaire de donner des diarrhées. Un certain nombre de gens disent alors : "je suis allergique à l'augmentin". En fait c'est un effet secondaire, cela n'est pas une allergie.

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Deuxièmement, il y a le problème de l'imputabilité. Par exemple quand vous faites un scanner, on peut vous injecter un produit dans la veine pour opacifier les organes. Certaines personnes font des réactions que longtemps on a qualifié d’ "allergiques" mais qui parfois viennent en réalité du fait que le produit a été injecté trop rapidement. L'allergie est donc différente de la toxicité. L'allergie a une caractéristique : elle peut-être déclenchée avec une très faible dose.

Soulignons que les antécédents de réaction allergique (abeille, guêpe, acariens, pollens, médicaments...) ne sont pas une contre-indication à la vaccination, mais que pour des raisons de sécurité, on peut prolonger la surveillance post-injection à 30 ou 45 minutes.

Les adolescents ayant fait un PIMS, les personnes allergiques à l’ethylene glycol et ceux qui ont fait une hépatite après la première injection sont peu nombreux. La plupart du temps, quand on pense avoir une contre-indication c’est en réalité faux. Pour connaître la réalité du problème, il faut se renseigner auprès d’un médecin qui est bien informé, qui a lu les recommandations. Aujourd’hui, on a plus de recul et on sait par exemple qu’il y a un risque important pour la conduite de la grossesse lorsque l’on a le Covid alors que l’on a déconseillé la vaccination en début d’année. 

Atlantico : Que dire aux personnes qui doutent à cause de situation très particulière comme des antécédents de chocs anaphylactiques couplés à des problèmes cardiaques ? Et qu'en est-il de leur pass sanitaire ?

Michaël Rochoy : A priori avoir fait un choc anaphylactique par le passé n'est pas une contre-indication tant que ce n'est pas lié à une allergie au polyéthylène glycol. On n'est pas allergique à un vaccin "en soi".

Ça représente peu de personnes. On peut supposer qu'elles auront une dérogation de pass sanitaire - ce n'est pas le cas aujourd'hui à ma connaissance. Le risque de fraude (s'inventer une contre-indication) est toujours possible.

Pour les gens qui ont fait une myocardite après la première injection, la question se pose peut-être de savoir si on bascule d'une dose de vaccin Pfizer à une dose Moderna ou vice-versa. Cela fera sans doute l'objet d'un examen très particulier de leur dossier.

Ludovic Toro : Aucun texte officiel n'existe sur le sujet. Le médecin doit juger le bénéfice/risque, comme on l'a toujours fait depuis le début de la vaccination. Si le risque est supérieur au bénéfice, on ne vaccinera pas les personnes. C'est d'ailleurs ce qu'on fait pour chaque vaccin (et pour chaque médicament d'une manière générale). On vaccine pas quelqu'un contre l'Hépatite B s'il a un cas de sclérose en plaque dans sa famille.

L'appréciation ne peut se faire qu'au cas par cas. Si le risque est important et surtout si la personne est jeune, on ne vaccine pas. Si une personne de moins de 50 ans a fait un choc violent à la première injection, il a moins de chance de décéder du Covid-19 que de la seconde injection. 

Atlantico : En cas de réaction allergique dans un centre de vaccination, que se passe-t-il ?

Michaël Rochoy : Des seringues d'adrénaline sont à disposition dans les centres. A ma connaissance, elles ont été peu voire pas utilisées.

Ludovic Toro : Il y a eu des cas d'allergie violente mais aucun mort. Tous les patients ont été pris en charge à l'hôpital avec succès.

Le gouvernement a-t-il fait quelque chose au niveau du pass sanitaire pour ces quelques personnes qui ont une contre-indication ? 

Philippe Juvin : Si l’on a une vraie contre-indication au vaccin, il ne faut pas le recevoir… Pour ces quelques patients, il faut renforcer les mesures barrières avec un FFP2 ou FFP1. 

Depuis le début le gouvernement est très insuffisante sur l’information concernant le vaccin. Si nous en sommes à une telle suspicion généralisée, c’est par un manque d’explication sur ce que l’on sait et ce que l’on ne sait pas. Le Président de la République a une responsabilité par rapport à cela. Début décembre, il expliquait à Brut que l’on ne savait pas tout sur les vaccins. Formellement, cette phrase était vraie, mais le journaliste de Brut lui a fait remarquer que cela n’allait pas aider à créer de la confiance. Ensuite, il a poursuivi sa phrase en disant que c’était le cas de tous les médicaments. Au même moment, la Grande-Bretagne et les États-Unis commençaient déjà leur campagne de vaccination en expliquant plus largement les vaccins à sa population… 

La parole publique a été anxiogène sur le vaccin, peut-être avec un calcul politique au début. Comme les Français n’avaient pas envie de se faire vacciner au mois de décembre, ils se sont dit qu’il fallait y aller tout doucement. C’est l’une des conséquences d’une gouvernance aux sondages. Ils suivent les inquiétudes des Français au lieu d’être responsable et de jouer leur rôle. Et les Français sont beaucoup plus intelligents que ce que quelques hommes politiques le croient.  Dès lors qu’ils sont bien informés, ils sont aptes à prendre la bonne décision. Cette situation a créé une suspicion généralisée à l’égard des vaccins. À des faits précis, il faut apporter des réponses précises et ils ne l’ont pas fait. 

Avec une telle stratégie, on évite d’aborder les questions que se posent les Français. Est-ce qu’une personne dans le débat a parlé des 3 contre-indications et de leur fait exceptionnel. Tout le monde a alors l’impression d’avoir une contre-indication. 

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