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Une personne brandit un drapeau de l'UE devant le bâtiment du Parlement européen, le 9 juin 2024
Une personne brandit un drapeau de l'UE devant le bâtiment du Parlement européen, le 9 juin 2024
©SEBASTIEN BOZON / AFP

Élections européennes

Les partis de droites sont sortis renforcés des élections européennes, mais leur influence sur la politique de l'UE dépendra en grande partie de leur capacité à agir ensemble. Une large coalition de droite serait d'autant plus importante que sans elle le statut quo européen risque à continuer.

Ákos Bence Gát

Ákos Bence Gát

Ákos Bence Gát est chef des affaires européennes au MCC Bruxelles.

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L'image du Parlement européen sortant est déprimante pour la droite. Pendant 5 ans, le Parti populaire européen (PPE) gouvernait en coalition avec les socialistes (SD), les libéraux macroniste (RE) et les Verts. Le résultat est clair : Green deal, pacte migratoire, endettement européen, centralisation à marche forcée et chasse aux sorcières contre les États membres qui osent s'opposer aux tendances progressistes au nom de la souveraineté nationale et des valeurs conservatrices. Pendant la législature passée, les forces gauchistes ont clairement dominé la scène politique européenne, à cause d’un PPE ayant sacrifié le reste de ses principes pour ses ambitions de pouvoir.

En face on trouve une droite morcelée entre le groupe des Conservateurs et réformistes (ECR) d'une part et le groupe de l'Identité et démocratie (ID) d'autre part, souvent composés respectivement des partis en situation de rivalité dans leur État membre d'origine. Pendant longtemps, il était bien plus confortable pour ces deux groupes de rester séparés chacun dans son coin.

Mais depuis quelques années, la scène politique européenne a connu une évolution importante. En 2021, le Fidesz, parti du premier ministre hongrois Viktor Orbán a quitté le PPE. Le champion souverainiste hongrois a finalement rompu avec le PPE acquis à une intégration supranationale toujours plus poussée. Les députés Fidesz ont fait le choix de ne pas intégrer immédiatement un autre groupe, mais de siéger au Parlement européen en tant que "non-inscrits", c'est-à-dire sans affiliation politique européenne.

Certes, ce choix a réduit leur influence directe dans le système institutionnel européen. En même temps, ce positionnement a aussi permis de jouer un rôle médiateur entre les deux groupes de droite. Le résultat en est que désormais, les partis au sein des deux groupes communiquent beaucoup mieux entre eux et nombre d'entre eux ont réalisé l’intérêt d’une coopération plus large.

Car les principaux clivages au sein de l'UE rapprochent clairement les partis de l’aile droite. L'opposition au wokisme, à l'immigration de masse ainsi qu'à une politique environnementale prisonnière d’obsessions idéologiques unit la droite face aux représentants du statut quo qui ont été acteurs ou complices de ces tendances préjudiciables aux sociétés européennes.

Plus encore, le clivage est déterminant entre les forces cherchant à créer les « États-Unis d'Europe » avec un pouvoir centralisé à Bruxelles, et ceux voulant préserver une Europe des nations, respectant la souveraineté de ses États membres.

Il ne s'agit plus d'une question de science politique qui devrait uniquement occuper les initiés aux affaires européennes. Au contraire, depuis le Brexit, la centralisation à Bruxelles est en train de se passer à une vitesse sans précédent, privant de plus en plus les États de leur capacité d'action autonome tant au niveau politique national qu'international, c'est-à-dire que dans des domaines où l'UE n'a que peu ou guère de compétence.

Et cela pose une question démocratique grave, lorsque les gouvernements élus doivent subir des pressions politiques et financières lourdes en cas de résistance aux exigences de l'élite bruxelloise.

Les deux groupes politiques de droite, dont le destin est encore ouvert, pourraient bien s'unir autour de ces points. Tout l'espoir de leur concurrents politiques réside dans leurs divergences quant à l'approche vis-à-vis de la Russie et la guerre en Ukraine. Les médias dominants traduisent cette divergence comme un clivage pro-russe et anti-russe. Mais cette présentation biaisée est manipulatrice, parce que personne ne remet en question la condamnation de l'agresseur russe ou le droit de l'Ukraine de se défendre. Les divergences résident essentiellement dans la stratégie à suivre  pour rendre la paix au continent: faut-il rompre complètement les relations économiques et diplomatiques avec la Russie en créant deux blocs avec une ligne de démarcation infranchissable, ou faut-il garder le dialogue pour éviter l'escalade de la guerre.

Dans la mesure où les partis de droite attribuent une haute importance à la souveraineté nationale, ils seraient tout à fait logique qu'ils actent simplement que la politique étrangère reste la compétence des État membres. Renvoyer les questions de la guerre et des relations diplomatiques avec la Russie et l'Ukraine au niveau des États membres, c'est-à-dire là au niveau de compétence fixé par les traités européens, permettraient d'éliminer cet obstacle à une coopération plus étroites des droites en Europe.

Parallèlement, il faudrait aussi résister aux sirènes du statut quo. Comme nous le savons, Ursula von der Leyen a lancé une opération de charme auprès de Giorgia Meloni, lui proposant de devenir membre du club des "mainstream" avec tous les bénéfices que cette adhésion peut permettre. Le but est simple, diviser la droite pour éviter le cauchemar de la gauche libérale.

Car, au lendemain des élections européennes, il y a bien un élan historique pour la droite. Les deux groupes ont gagné des sièges supplémentaires au Parlement européen, tandis que les libéraux et les verts ont subi des pertes significatives. Giorgia Meloni a renforcé son leadership en Italie, tandis que le parti de Marine Le Pen a bouleversé toute la scène politique française. Viktor Orbán est également sorti net vainqueur des élections, malgré les défis posés par l'émergence soudaine d'une nouvelle force d'opposition en Hongrie.

Dans un entretien récent à la télévision publique, le premier ministre hongrois a estimé que l'unification de l'ECR et de l'ID, en leur ajoutant les députés du Fidesz, pourraient en faire le deuxième groupe au Parlement européen, devançant les socialistes. Un tel groupe pourrait en plus disposer d'une force d'attraction telle que d'autres partis pourraient également décider de le rejoindre. Cela permettrait à la droite de maximiser son capital politique et de disposer d'un poids considérable dans l'appareil parlementaire.

Le succès d’un tel scénario dépend essentiellement de Giorgia Meloni et de Marine Le Pen. Ce qui est sûr, c'est qu'il y a une fenêtre d'opportunité visible pour une coopération plus étroite des droites en Europe. Et c'est une chance historique pour peser contre les tendances progressistes de l'UE.

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