UDI contre FN : qui est vraiment la 3e force politique française ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Hervé Morin, leader de l'UDI.
Hervé Morin, leader de l'UDI.
©Reuters

Non c'est moi !

Au soir du second tour des élections municipales, les discours des responsables du FN et des partis du centre se ressemblaient étrangement, Marine Le Pen et Hervé Morin qualifiant chacun leur mouvement de "troisième force politique".

Atlantico : "Il faut désormais compter avec une troisième grande force politique dans ce pays", a déclaré Marine Le Pen au soir du second tour des élections municipales, tandis qu'Hervé Morin estimait de son côté que "le centre est redevenu la troisième force politique". Résultats à l'appui, qui est le plus légitime pour prétendre à ce statut ?

Alexis Massart : Les deux, mon capitaine ! Tout dépend de l'angle que l'on adopte pour comprendre ces deux affirmations. En termes de médiatisation, d'impact sur les commentaires des résultats, le FN peu effectivement dire qu'il est la troisième force politique du pays. Par contre, si on regarde l'impact des voix, le nombre de collectivités gagnées et dirigées par l'UDI, celui-ci peut se considérer comme la troisième force politique du pays. Le FN apparaît comme le troisième parti de France en termes d'impact, en revanche l'UDI apparait comme le troisième parti de gouvernement.

François Kraus : Tout dépend de ce qu'on entend par force politique. En matière de voix le contraste entre l'UDI et le FN est très net, il est en faveur du FN. Mais il faut pondérer cette donnée par l’influence politique et le nombre de sièges dans les différentes assemblées. Actuellement la capacité à gouverner, ou à tout le moins à influencer un gouvernement, est bien plus forte chez l'UDI que chez le FN, tout simplement parce que ses représentants sont bien plus présents au Parlement national et européen, et dans les conseils régionaux et départementaux.

Il faut ajouter que l'UDI ne partait pas seul dans la bataille des municipales. En exprimé, ils ont fait 2,3 % au premier tour, quand le FN a fait 5 %. Mais les municipales ne sont pas un bon indicateur, car selon la taille des communes les scrutins ne sont pas identiques. Dans les communes de moins de 1 000 habitants il n'y a pas d'étiquettes politiques, il n'y a que des candidats, et généralement les principales forces politiques sont des divers droite ou des divers gauche. Ce n'est donc pas à partir des municipales que l'on peut mesurer le poids du FN, qui était présent dans à peine 600 communes sur les 36 000 que compte la France.

Peut-on dire que, au vu de la réalité des chiffres, Marine Le Pen pratique le bluff ? Avec quel but ?

François Kraus : On ne peut pas dire qu'elle pratique le bluff ; depuis 2002 le FN est une puissance qui compte. Aux Européennes, il sera en première ou deuxième position, ce qui ne veut pas dire pour autant que la ligne du FN sera celle de la prochaine assemblée européenne ou nationale. Et du fait de ses alliances et de sa position centrale, l'UDI-Modem, a un poids politique bien plus large que son poids électoral.

Alexis Massart : Le problème, pour juger l'impact d'une élection municipale, c'est que le FN n'est pas présent partout. Au vu de la répartition des voix au niveau national, c'est un coup de bluff – et c'est classique. Quand on regarde la réalité par rapport aux municipalités où le FN était effectivement présent, le résultat concret est bien au-delà d'un regain national. C'est le problème du FN, on ne peut pas lire ses résultats au niveau national. Ce sont les élections européennes qui nous indiqueront la réalité de la chose.

Le but de Marine Le Pen est très simple, c'est celui de s'inscrire dans une dynamique, dans la perspective des prochaines échéances électorales des Européennes.

Le centre, dont l'identité n'est pas toujours bien définie, semble se reconstruire sur une alliance solide entre l'UDI et le Modem, et le FN, de son côté, s'efforce d'échapper à son étiquette d'extrême droite pour susciter un plus large consensus. Au vu de leur positionnement et de leur ancrage, laquelle de ces deux forces politiques est la mieux positionnée pour peser sur des élections présidentielles ?

François Kraus : Pour le centre, tout l'enjeu est de dégager un candidat : qui de Bayrou ou Borloo pour diriger cette force politique ? Cette question ne pose pas pour le FN. De toute façon, n'importe qui face à Le Pen l'emporte. Mais si l'élection avait lieu demain, ce serait le FN qui, sur le plan électoral, pèserait le plus.

Alexis Massart : Celui qui est le mieux positionné est clairement l'UDI, car les élections présidentielles ne peuvent se jouer qu'entre partis de gouvernement. Cela ne veut pas dire que le FN ne fera pas un bon score, ceci étant, on l'a vu le 21 avril, au second tour le FN est forcément hors course. L'UDI, avec ses pouvoirs locaux et parlementaires, est davantage en position de négocier avec l'un ou l'autre. Le FN reste à la marge, il est par nature disqualifié au second tour ; la question des alliances et des reports de voix se traite uniquement entre partis de gouvernement.

Le centre connaît des difficultés à percer au niveau national, par manque de relais. La chose est-elle en train de changer, ou va-t-il continuer de traîner ce handicap ?

François Kraus : L'alliance Modem-UDI est une sorte de reconstruction de l'UDF, qui avait implosé à la fin des années 1990, à la fois à cause de la tentation plus centriste de Bayrou, et de la tentation plus droitière des libéraux. C'est pourquoi en 2002 le RPR et Démocratie libérale ont fusionné, le parti radical ayant suivi tout en conservant une légère autonomie. Mais le rassemblement n'est pas encore complet, des personnalités comme Raffarin sont encore à l'UMP...

Alexis Massart : Les choses évoluent, car jusqu'à la création de l'UDI, on rencontrait un problème de définition du centre. Centre droit ? Ni de droite ni de gauche ? Aujourd'hui c'est réglé, François Bayrou est revenu à son positionnement centre droit de départ, qui a d'ailleurs toujours été le sien. Maintenant que la définition est affinée, les choses sont en train de se restructurer sur cette ligne. Le seul handicap réside dans le retrait temporaire de Borloo pour des raisons de santé, mais son retour va accélérer le processus.

Propos recueillis par Gilles Boutin

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