Trentenaires avec des corps de vieillards : la vraie facture du binge drinking <!-- --> | Atlantico.fr
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Un femme ayant pratiqué le binge drinking souffre d'une insuffisance hépatique, dont le symptôme est un ventre similaire à celui d’une femme enceinte.
Un femme ayant pratiqué le binge drinking souffre d'une insuffisance hépatique, dont le symptôme est un ventre similaire à celui d’une femme enceinte.
©BBC

Ravages

Neurones brulés pour toujours, difficultés à se déplacer, visites toutes les trois semaines à l'hôpital : non, ceci n'est pas le quotidien de vieillards grisonnants, mais de trentenaires qui ont cédé aux sirènes du binge drinking.

Mickaël  Naassila

Mickaël Naassila

Mickaël Naassila est professeur de physiologie et de biologie cellulaire dans le Groupe de recherche sur l'alcool et les pharmacodépendances à l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale).

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Atlantico : La chaîne de télévision britannique BBC a suivi le quotidien d’une femme de 35 ans qui, après avoir pratiqué le binge drinking à haute fréquence pendant plusieurs années, se retrouve avec une insuffisance hépatique, dont le symptôme est un ventre similaire à celui d’une femme enceinte, contenant 23 litres de fluide qu’elle doit faire drainer à l’hôpital toutes les trois semaines. Cela est-il plus courant qu’on ne le pense, et quelles sont les autres conséquences physiques ?

Mickaël Naassila : Ce cas est plus répandu qu’on ne le pense. Des malades alcooliques présentent assez couramment ce type de symptôme clinque ; e cas de cette femme n’est pas très étonnant.

Le binge drinking est un facteur aggravant en matière d’insuffisance hépatique et de maladie alcoolique du foie, car il augmente la toxicité. C’est également le cas au niveau cérébral : à quantité égale d’alcool ingurgité, le binge drinking est plus toxique qu’une autre modalité de consommation. Les dommages seront indéniablement plus importants au niveau cognitif (apprentissage et mémorisation) pour ce type de buveur que pour un autre qui boirait autant mais de manière plus étalée dans le temps.

Pourquoi le binge drinking est-il plus dommageable qu'une consommation égale mais plus étalée dans le temps ?

Parce que la consommation massive en très peu de temps  entraîne des phénomènes de type inflammatoire, tant au niveau périphérique que cérébral. Sur ce dernier plan, notamment, le fait de monter très haut dans les niveaux d’alcoolémie, pour ensuite redescendre très vite à zéro, est particulièrement toxique. Cela s’apparente au phénomène des sevrages chez l’alcoolique : cette période entraîne une toxicité. L’incidence neurotoxique est alors très forte.

Le documentaire évoque également le cas d’une femme d’une trentaine d’années qui,  après s’être longtemps adonnée au binge drinking, connaît des problèmes moteurs...

Ce symptôme vient compléter le tableau des effets de l’alcoolisme chronique : tout le système périphérique est touché, et donc  les fibres nerveuses. Il s’agit d’une complication d’un cas de cirrhose  tout ce qu’il y a de plus classique, qui certes touche les binge drinkers, mais aussi les alcooliques en général.  Ne nous trompons pas : le binge drinking est un phénomène visible, mais les effets dont nous parlons concernent toutes les formes d’alcoolismes.

Hommes et femmes sont-ils égaux en termes de conséquences corporelles ?

Comparativement à l’homme, à consommation égale, la toxicité et les dommages sont plus importants chez la femme, tant au niveau cérébral que physique. Des études récentes d’imagerie cérébrale chez les jeunes entre 20 et 30 ans démontrent ce fait.

Quels sont les effets du binge drinking sur la fécondité ? Aggravent-ils également la chose ?

La consommation d’alcool porte atteinte à différents niveaux sur la fonction de reproduction (fertilité, libido), que ce soit chez l’homme ou la femme. Quant à la relation entre ces effet et le binge drinking plus précisément, les études manquent.  Et si elles manquent, c’est parce que la prise en compte de la problématique de l’alcool n’est pas du tout à la hauteur du problème de santé publique que nous connaissons aujourd’hui. Rapporté au nombre d’habitants, la France occupe le bas du tableau des pays riches dans le traitement de la question de l’alcoolisme. La médiatisation est forte, mais peu de choses sont faites pour réagir.

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