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Une personne présente lors du Forum pour l'emploi des seniors organisé par le MEDEF à Paris, le 7 mars 2018.
Une personne présente lors du Forum pour l'emploi des seniors organisé par le MEDEF à Paris, le 7 mars 2018.
©GERARD JULIEN / AFP

Réforme des retraites

Notre regard sur l’âge et notre rapport au travail doivent évoluer pour donner enfin une vraie place dans notre société, et spécifiquement dans notre économie, à ceux d’entre-nous qui bénéficient de la plus grande expérience de la vie. Nous devons collectivement faire évoluer ces conceptions stériles qui nous condamnent à ne trouver que de mauvaises solutions.

Caroline Young

Caroline Young est diplômée HEC de l’université de Lausanne, possède un DEA en démographie économique de l’IEP Paris et un MBA de l’IESE Business School à Barcelone. Elle a commencé sa carrière en tant qu’Analyste en fusions acquisitions chez Schroders, puis comme Manager en fusions acquisitions chez Crédit Agricole Indosuez. En 2002, elle rejoint IP France, régie publicitaire du groupe RTL, en tant que Secrétaire générale où elle est chargée de la stratégie et du développement. Elle est actuellement Présidente d’Experconnect. Elle est co-auteur avec Gilles Effront et Jean-Yves Ruaux de « 60+Actifs Pourquoi le travail post-retraite est indispensable » (2014).

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Réforme des retraites, projet de loi grand âge et autonomie : alors que la question du vieillissement taraude nos concitoyens, le COVID et le contexte politique ont eu raison des deux principaux projets de réforme que le Gouvernement ambitionnait de porter sur le sujet. Pourtant cette question demeure une préoccupation centrale pour les Français. 78% d’entre eux redoutent la perspective de la vieillesse, ce qui en fait un des peuples les plus pessimistes au monde sur ce sujet (IPSOS mars 2019). Si les problématiques matérielles et financières expliquent en partie cette appréhension, c’est principalement la dégradation de l’état de santé et spécifiquement la perte d’autonomie, de mobilité et de mémoire qui inquiète nos concitoyens. Cette appréhension est d’autant plus forte que notre société a construit un rapport ambivalent et contradictoire au travail et à la vieillesse.

Trop souvent considéré comme l’héritier du « tripalium », instrument de torture antique qui en serait l’origine étymologique, le travail est parfois présenté comme un mal nécessaire auquel il faut mettre fin le plus vite possible grâce à la retraite. Conséquence directe de cette vision négative : non seulement l’activité professionnelle post-retraite demeure anecdotique dans notre pays, mais les salariés les plus âgés peinent eux aussi à poursuivre leur carrière de manière satisfaisante. Fréquemment victimes de mise à l’écart, les plus âgés d’entre nous font l’objet d’une discrimination systématique qui ne dit pas toujours son nom. Dans ces conditions, comme pouvons-nous espérer débattre sereinement des sujets de retraite et de vieillissement ?

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Nous devons collectivement faire évoluer ces conceptions stériles qui nous condamnent à ne trouver que de mauvaises solutions. L’âge est une richesse que nous devons accueillir, et le travail peut être source d’épanouissement personnel tant pas son aspect social que par les réalisations qu’il nous amène à produire. Sur ces sujets, une véritable révolution collective est nécessaire pour au moins trois raisons.

Politiquement et philosophiquement d’abord, la mise à l’écart des plus âgés est une faute que nous devons absolument réparer. Alors que les discours sur la durabilité de nos modes de vie et sur l’inclusion fleurissent, quel regard portons-nous sur ceux d’entre-nous qui bénéficient du plus de recul et de sagesse ? Savons-nous déceler en eux les richesses de l’expérience et de la compétence, ou préférons-nous les considérer comme obsolètes, car devenus trop chers ou trop lents ?

Médicalement ensuite, l’inclusion des plus âgés dans l’activité est une nécessité cruciale, seule à même de répondre à l’angoisse de nos concitoyens et à l’enjeu de la dépendance. L’académie de médecine rappelle en effet que « l’activité intellectuelle exigeante souvent demandée par l’activité professionnelle, permet de réduire la détérioration des fonctions cognitives, première cause de dépendance ». Les chiffres le prouvent. Reculer la fin de l’activité professionnelle de 60 à 65 ans équivaut à diminuer le risque de démence de 15 %, selon une étude du RSI portant sur un échantillon de plus de 400 000 personnes.

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Economiquement enfin car en 2035, 23 millions de Français auront plus de 60 ans, soit une personne sur trois. Impossible donc de se passer de leur concours sous peine d’un nouveau rétrécissement de l’activité. Ce fait démographique pose également la question centrale de la compétence et de son transfert aux jeunes générations. Pour 67% des employeurs, il s’agit même de l’atout principal des profils les plus seniors (Etude Research Survey Robert Half, 2019). Alors que la pyramide des âges s’inverse de plus en plus, il est vital d’organiser la formation des jeunes générations pour ne pas perdre nos savoir-faire économiques. Quant aux sceptiques qui affirmeraient que l’emploi des seniors se développe au détriment de l’emploi de jeunes, rappelons que selon l’OCDE, « des taux d’emploi élevés chez les seniors sont généralement associés à des taux d’emploi élevés chez les jeunes, car les juniors et les seniors sont complémentaires et peu substituables ».

Nous le constatons donc, c’est notre regard sur l’âge et notre rapport au travail qui doivent évoluer pour donner enfin une vraie place dans notre société, et spécifiquement dans notre économie, à ceux d’entre-nous qui bénéficient de la plus grande expérience de la vie.

Caroline Young,

Présidente d’Experconnect

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