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Le seul pays d’Europe à être vraiment en déflation est la France.
Le seul pays d’Europe à être vraiment en déflation est la France.
©Reuters

Flagrant délit de déni

Un constat qui tranche avec les propos optimistes d'Emmanuel Macron qui considère que “tout est réuni pour que l’embauche et l’investissement repartent”.

Nicolas Goetzmann

Nicolas Goetzmann

 

Nicolas Goetzmann est journaliste économique senior chez Atlantico.

Il est l'auteur chez Atlantico Editions de l'ouvrage :

 

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"L’inflation annuelle est attendue à -0.2% pour le mois de décembre 2014". C’est par ces mots qu’Eurostat a pu annoncer la situation de déflation qui frappe la zone euro en ce 7 janvier 2015. Malgré la gravité de la situation économique, ces chiffres sont à nuancer tant les variations de prix peuvent avoir des causes différentes.

En effet, en excluant les prix de l’énergie, à savoir la forte chute du pétrole qui a lieu depuis plusieurs mois maintenant, les prix ne baissent pas de -0.2% mais progressent de 0.6% sur la dernière année. C’est-à-dire le même chiffre que pour le mois de novembre. De fait, la très forte chute des prix de la composante énergie de l’indice, soit -6.3% sur le mois de décembre, pèse lourdement dans le chiffre paru ce jour.

La difficulté tient au fait que l’inflation regroupe plusieurs catégories de prix qui évoluent en fonction de causes diverses. D’une part, la baisse du prix du pétrole est la conséquence d’une très forte hausse de la production de barils, notamment en provenance des Etats-Unis, et cette baisse peut ainsi être jugée comme étant bénéfique. D’autre part, les prix des biens et des services au sein de la zone euro subissent une très faible hausse, historiquement basse en réalité, et qui est la conséquence d’une trop faible demande au sein de la zone euro. Sans acheteurs, les vendeurs se livrent à une guerre des prix pour préserver leurs parts de marché. Les prix baissent ou progressent modérément en conséquence.

Et si l’inflation "hors pétrole" de la zone euro campe à ce niveau de 0.6%, il en va tout autrement en France. En effet, selon les chiffres publiés par l’INSEE, l’inflation sous-jacente (c’est-à-dire sans ses éléments les plus volatils) s’établit à -0.1%. Ce qui traduit, cette fois, une déflation au sens propre car le pétrole n’a rien à y voir et que la demande anémique a tout à y voir.

Et cette situation vient heurter de plein fouet la déclaration du ministre de l’économie Emmanuel Macron au journal Les Echos le 7 janvier 2015 :

"Tout est objectivement réuni pour que l’embauche et l’investissement repartent. Afin de transformer l’essai, il faut que nous combinions trois actions durant le prochain semestre : consolider et expliquer les mesures prises ; accélérer les réformes sur le plan microéconomique pour moderniser notre économie et démontrer aux entrepreneurs, aux investisseurs et à nos partenaires que nous avançons ; enfin, changer la donne de la politique macroéconomique européenne afin de relancer la demande intérieure de la zone euro."

Le ministre, dans un difficile exercice de justification, inverse les rôles. Car la phrase "Tout est objectivement réuni pour que l’embauche et l’investissement repartent" n’est tout simplement pas compatible avec une situation de déflation au sein de la zone euro, qui plus est, annoncée le jour même. La déflation exprime l’exact opposé car elle est la raison "objective" justifiant que "l’embauche et l’investissement" ne repartent pas.

En effet, si l’horizon des agents économiques est la baisse de prix, c’est-à-dire un horizon de demande faible, de ventes médiocres, et ce, sans espoir d’amélioration, il n’y aura pas de perspectives possibles pour les embauches ou les investissements. Investir dans une économie sans croissance n’a aucun sens.

C’est ce qui est d’ailleurs exprimé par le ministre à la fin de sa déclaration : "changer la donne de la politique macroéconomique". Car bien entendu, il ne sera possible d’obtenir des résultats sur les fronts de "l’embauche et l’investissement" qu’à partir du moment où la déflation sera traitée. C’est-à-dire lorsque l’on aura "changer la donne de la politique macroéconomique européenne", à savoir restaurer la demande intérieure. Et en Europe, la demande est la chasse gardée de la Banque centrale. C’est donc sur cette cible que l’exécutif français doit concentrer ses efforts pour obtenir des résultats. Sans cela, les mots resteront des mots et la stagnation séculaire tant redoutée finira par s’imposer. Ce qui est déjà le cas depuis 7 années maintenant.

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