Grand Meeting d'Emmanuel Macron à Strasbourg : pourquoi le diagnostic de l'ancien ministre ​de l'Economie pourrait être plus proche du conservatisme que de la modernité<!-- --> | Atlantico.fr
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Emmanuel Macron pense qu’il faut plus flexibiliser le marché du travail, réduire le nombre de fonctionnaires et affaiblir le modèle social pour accorder l’économie française à la mondialisation.
Emmanuel Macron pense qu’il faut plus flexibiliser le marché du travail, réduire le nombre de fonctionnaires et affaiblir le modèle social pour accorder l’économie française à la mondialisation.
©REUTERS/Benoit Tessier

Façade

Alors qu'Emmanuel Macron présente ce mardi soir à Strasbourg son diagnostic de l'état de la France, Thomas Porcher, dont l'ouvrage "Introduction inquiète à la Macron-économie" vient de sortir, nous explique en quoi la pensée de l'ancien ministre de l'Economie, loin d'être moderne, est en réalité conservatrice.

Thomas Porcher

Thomas Porcher

Thomas Porcher est Docteur en économie, professeur en marché des matières premières à PSB (Paris School of Buisness) et chargé de cours à l'université Paris-Descartes.

Son dernier livre est Introduction inquiète à la Macron-économie (Les Petits matins, octobre 2016) co-écrit avec Frédéric Farah. 

Il est également l'auteur de TAFTA : l'accord du plus fort (Max Milo Editions, octobre 2014) ; Le mirage du gaz de schiste (Max Milo Editions, mai 2013).

Il a coordonné l’ouvrage collectif Regards sur un XXI siècle en mouvement (Ellipses, aout 2012) préfacé par Jacques Attali.

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Atlantico : Vous considérez que le discours d'Emmanuel Macron est loin d'être aussi moderne, jeune, innovant que ce que prétend l'ancien ministre de l'Economie. Pensez-vous qu'il soit suffisant de vous baser sur des "petites phrases" pour élaborer un tel jugement ? En quoi ces phrases seraient-elles le symptôme d'un conservatisme ?

Thomas Porcher : Quand vous êtes ministre de l’Economie, normalement vous connaissez le poids des mots et vous êtes conscients de ce que vous dites. On est en droit de porter un jugement sur quelqu’un qui avance des phrases comme "Si j’étais chômeur, je n’attendrais pas tout de l’autre" ou "L’Etat doit donner plus de souplesse au marché du travail" ou encore "je n’aime pas ce terme de modèle social". Pour nous, ces petites phrases ne sont pas dénuées de sens et sont illustratives de propos convenus qui courent depuis plus de trente ans. En réalité, derrière un libéralisme se voulant 3.0 et portant UBER, une entreprise championne de l’évasion fiscale, en modèle de réussite, se trouve une vision très proche de celle des économistes du 19ème siècle qui stigmatise les chômeurs, réduit les droits sociaux, divise volontairement les Français et porte uniquement les intérêts de quelques-uns.

"Il y a la politique des artisans et la politique des fainéants" avait aussi affirmé Emmanuel Macron. Le volontarisme du leader d'En marche ! semble pourtant séduire de nombreux Français, qui attendent un chef d'Etat capable d'endosser de sérieuses réformes économiques. Quelles sont les politiques "d'artisan" que prépare Emmanuel Macron, et pourquoi vous inquiètent-elles ?

Il suffit de regarder ce qu’il y a dans la loi Macron. Franchement, comment a-t-on pu penser qu’il suffisait d’ouvrir les magasins le dimanche, de dérèglementer les pharmacies ou encore de développer les lignes de cars pour relancer l’économie de la 6ème puissance mondiale ? Et puis honnêtement, la loi Macron n’a rien d’original et ressemble très fortement a ce qui a été fait en Italie et en Espagne. La loi italienne de 2006 intitulée "libéralisation et promotion de la concurrence et de la compétitivité" conduite elle aussi par un gouvernement dit de gauche, celui de Romano Prodi qui a été également président de la Commission européenne, concernait quasiment les mêmes professions réglementées : avocats, pharmaciens, notaires et taxis. Loin d’être un artisan, Emmanuel Macron apparaît surtout comme un "élève modèle" de la Commission européenne.

Ce mardi 4 octobre, Emmanuel Macron dévoilera son diagnostic de l'état de la France, à Strasbourg. Selon vous, quel serait le diagnostic qu'Emmanuel Macron ne voit pas ?

Emmanuel Macron pense qu’il faut plus flexibiliser le marché du travail, réduire le nombre de fonctionnaires et affaiblir le modèle social pour accorder l’économie française à la mondialisation. Mais le problème de la France ne se situe pas là mais plutôt dans le manque d’innovation. Notre ministre devrait se poser les bonnes questions : comment redonner en France et en Europe, une place à la puissance publique en matière de pilotage de l’innovation ? Quelles opportunités d’investissement choisir pour que la France puisse, à l’instar des Etats-Unis avec internet, devenir un leader sur un marché qu’elle aura façonné depuis le début ? 

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