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Theresa May piégée par la frontière irlandaise, Bruxelles pourrait lui proposer de réunifier les deux Irlande
©Paul FAITH / AFP

No borders

Si Theresa May a réussi à convaincre une majorité de députés d’accepter un accord sur le Brexit, elle n’a pas de majorité sur le maintien d’une libre circulation entre les deux Irlande.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

Il est aussi l'auteur du blog http://www.jeanmarc-sylvestre.com/.

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Comment éviter la restauration d’une frontière irlandaise? C’est la question que Theresa May va finalement poser aux Européens. Parce que si elle a réussi à convaincre une majorité de députés d’accepter un accord sur le Brexit, elle n’a pas de majorité sur le maintien d’une libre circulation entre les deux Irlande. A Bruxelles, on commence à penser qu’il faudra organiser la réunification des deux Irlande. Que cette réunification soit sous la bannière britannique ou irlandaise. C’est la seule solution qui éviterait de prendre le risque de reconstruire ce mur de la honte. Reste à savoir si les Irlandais seront d’accord.

La situation britannique n’a jamais été aussi inextricable sauf que maintenant, le Parlement a admis avec une assez forte majorité qu’il fallait sortir de l’Union européenne avec un deal qui protège les intérêts économiques de part et d’autre. Mais la même majorité ne se retrouve pas pour s’entendre sur la nature du deal.

Les partisans d’un hard Brexit n’ont pas perdu la partie, mais ils ont accepté que Theresa May retourne à Bruxelles pour négocier quelques assouplissements à l’accord qu’elle avait obtenu après deux ans de négociations.

Cela dit, à Bruxelles, il n’est pas question de renégocier tant que Theresa May n’aura pas dit très clairement ce qu'elle voulait changer. Peut être ne le sait-elle pas elle-même. Les Européens ont compris qu’une fois de plus, la Grande Bretagne essayait de gagner du temps et surtout, essayait de jouer sur les nerfs des Européens en espérant fissurer cette belle unanimité qu’elle a trouvée face à elle. 

En fait, cette situation, qu’on décrit très souvent comme la chronique d’une catastrophe annoncée, s’apparente davantage à un jeu de rôle dans une série télévisée dont le cynisme vaut bien celui qui a fait le succès de House of cards. Avec chaque semaine un nouveau rebondissement.

Acte 1 : Theresa May a obtenu de ses députés un refus catégorique d’un Brexit sans accord. Il y aura donc bien un divorce, mais ce divorce sera assorti d’un accord qui fixera les relations entre les partis.

Acte 2 : l’accord qui avait été négocié par Theresa May est acceptable, à l’exception d’un point particulièrement sensible et qui porte sur le sort réservé à l’Irlande. Au terme de l‘accord, le Royaule-Uni sort évidemment de toutes les institutions européennes, mais conserve ses accords de libre circulation et notamment en matière de commerce et de finance avec l’Union européenne. On oublie les projets de douanes et on continue de faire du commerce comme avant. La seule différence est que le Royaule-Uni devra appliquer des accords et des normes sur lesquels elle ne pourra plus intervenir, puisqu’elle sera sortie des organismes de contrôle et de régulation.

Le seul point délicat de cet accord est qu’il fallait reconnaître que l’Irlande du nord était rattachée de fait à l’Union européenne de part sa relation particulière avec l‘Irlande du sud.

Acte 3 : Pour les Européens, il est inimaginable, inconcevable, que les deux Irlande soient séparées par une frontière, un mur de brique et de honte qui, il y a plus de 25 ans, a encore fait des morts et provoqué beaucoup de douleurs. Pas question d’autoriser de nouvelles guerres de religion entre l’Irlande du Nord protestante et british et la République d’Irlande, catholique et celtique. Et c’est vrai qu’en 25 ans, les choses ont beaucoup changé.

Or, les Anglais, qui ont voulu le Brexit, sont intraitables. Ils acceptent la libre circulation des biens, des services et des capitaux, mais ne veulent pas maintenir une porte d’entrée aussi large vers le Royaule-Uni via l’Irlande. Trop facile. Après tout, les Brexiter ont avant tout protesté contre les migrations.

La situation est donc bloquée à cause de cette frontière que les Anglais Brexiter veulent ériger.

Acte 4 : les Européens sont parfaitement conscients que le projet d’accord capote sur la question irlandaise. Alors, dans l’entourage de Michel Barnier, se prépare une proposition assez originale qui consisterait à proposer de réunir les deux Irlande sous la bannière britannique.

Cette proposition, dont l’auteur serait un proche de Michel Barnier dit-on, ne serait pas forcément bien accueillie par les Irlandais eux-mêmes, mais ça ne change pas grand chose par rapport à la situation actuelle puisqu’ils  garderaient leur liberté de faire du commerce avec l’Union européenne et avec le Royaule-Uni.

Pour les Anglais, la question de la frontière entre les deux Irlande serait résolue.  On pourrait donc s’entendre sur un Brexit avec deal. Lequel deal reprend l’essentiel de ce qui se passait jusqu’à maintenant.

Pour les Européens, l’idée de réunir les deux Irlande qui ne seraient plus sous administration européenne aurait un énorme avantage collatéral. Cette idée reviendrait à transférer à Londres le problème des GAFA et autres multinationales américaines qui ont installé leurs bases européennes en Irlande. Les Google, Facebook, Intel travaillent à partir de l’Irlande. Si cette Irlande n’était plus rattachée à l’Union européenne, l’épineuse question des GAFA, que ce soit sous l’angle fiscal ou social, serait sous la gouvernance britannique.

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