Surcoûts des voitures électriques : comment le prix d’un véhicule neuf s’est envolé de 35 % en l’espace de 10 ans <!-- --> | Atlantico.fr
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François-Xavier Pietri publie « Voiture électrique : ils sont devenus fous ! » aux éditions Litos.
François-Xavier Pietri publie « Voiture électrique : ils sont devenus fous ! » aux éditions Litos.
©JUSTIN SULLIVAN / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / Getty Images via AFP

Bonnes feuilles

François-Xavier Pietri publie « Voiture électrique : ils sont devenus fous ! » aux éditions Litos. En 2035, votre voiture neuve sera obligatoirement électrique. Ce diktat européen est une folie. Une majorité de Français ne pourra pas s‘offrir son automobile : l'électrique coûte 50 % plus cher que le thermique… Cette décision offre aussi le marché européen aux Chinois. Extrait 1/2.

François-Xavier Pietri

François-Xavier Pietri

Journaliste économique, François-Xavier Pietri a notamment dirigé la rédaction de La Tribune et le service économie de TF1. Il a longtemps animé « Le club de l'économie » sur LCI.

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C’est donc une France de l’automobile à deux vitesses qui s’annonce, une France divisée entre les plus aisés et les autres. D’ici 2030, échéance que se sont fixée la plupart des constructeurs pour la bascule à l’électrique, des millions de Français n’auront pas les moyens de s’acheter une vertu. Il le faudra pourtant sans doute encore plus tôt que ça, tant s’accélèrent les programmes d’électrification. Un déchirement sociétal sans précédent se prépare. Hier, en matière d’automobile, la distinction entre les plus modestes et les autres s’établissait sur des fondements que les Français avaient acceptés: la puissance d’un modèle, sa vitesse, son luxe, ses équipements, sa ligne, sa marque, porteuse d’un statut social.

Demain, cette distinction sera punitive. Si vous n’en avez pas les moyens, vous ne pourrez pas accéder à un comportement dit vertueux. Vous ne pourrez pas être au volant d’un véhicule zéro carbone, vous serez coincé avec votre solution polluante et le cortège de punitions qui l’accompagnera. À bord d’un diesel, vous serez accusé de tuer chaque année avec vos émissions de particules fines. À bord d’un véhicule thermique, vos émissions vous interdiront l’accès aux centres-villes. Vous n’aurez aucune aide à l’achat, aucun escompte sur le prix de la carte grise. Vous deviendrez des parias de la société… parce que vous ne gagnez pas assez d’argent! « Faut-il des véhicules 100% électriques que les classes moyennes ne pourront pas se payer, tout en demandant aux États de continuer à creuser le déficit budgétaire pour les subventionner? », interroge Carlos Tavares dans l’entretien aux Échos déjà cité. « Il y aura des conséquences sociales », prédit le patron de Stellantis. La voiture a longtemps été l’instrument de l’émancipation des classes moyennes, de l’accès aux congés payés, de la liberté de circuler, du progrès social. Avec l’électrique, elle risque de devenir au contraire un instrument de régression. 

50% de surcoût pour une voiture électrique

La question du prix est profondément ancrée dans la perception des consommateurs sur l’électrique. Dans l’enquête « La voiture: le divorce impossible », menée en septembre 2020 dans 15 pays auprès de 10 000 individus dont 3000 en France, commandée par l’Observatoire Cetelem qui fait référence sur ces sujets de l’automobile, les consommateurs aux plus bas revenus prêts à acheter un véhicule dans l’année déclarent n’avoir d’autre choix que d’acheter une essence ou un diesel, alors que les plus hauts revenus se tourneront majoritairement vers l’hybride ou l’électrique. Dans l’édition précédente du même Observatoire, 91% des Français se déclarent conscients du surcoût des véhicules électriques.

Une perception plus que justifiée. L’analyse fouillée menée par le cabinet AlixPartners pour la Plateforme automobile en novembre 2021 démontre un écart de 59% de valeur entre le contenu moyen d’un véhicule thermique et celui d’un électrique: 15 100 euros pour le premier, 23900 euros pour le second: près de 9000 euros de différence! L’écart de valeur, on le doit essentiellement à la batterie: 8 000 euros sur le second, alors que le coût d’un moteur thermique n’est que de 2800 euros. L’électronique embarquée pèse également très lourd (6400 euros pour l’électrique contre 2400 euros pour le thermique).

Évidemment, l’incidence de ces coûts fait toute la différence sur le prix de vente d’une électrique. En moyenne, il faut débourser 10000 euros de plus que pour un modèle classique, ce qui signifie souvent 50% de surcoût pour un véhicule d’entrée de gamme. Un écart de prix que les classes moyennes sont dans l’incapacité d’assumer. La voiture, déjà trop chère, va devenir inaccessible. 

Le prix d’une voiture neuve s’est envolé de 35% en 10 ans

L’avènement de l’électrique va accélérer une tendance déjà bien réelle. Depuis quelques années, la hausse des prix d’un véhicule est vertigineuse. L’argus, qui fait référence en la matière avec son enquête annuelle, « La Voiture Moyenne Neuve », révèle qu’en dix ans son prix a augmenté de 35%! En 2010, il fallait débourser 19 767 euros pour une voiture moyenne; dix ans plus tard, ce même véhicule s’affiche à 26 789 euros! Pour comparaison, entre 2010 et 2020, la hausse des prix en France n’a guère dépassé 1% par an, et les salaires ont péniblement augmenté de 2% par an. En clair, la possibilité d’acheter une voiture neuve s’est littéralement effondrée en une décennie pour les Français.

Plusieurs facteurs se sont conjugués pour expliquer la hausse des tarifs. L’électronique embarquée coûte de plus en plus cher, qu’elle soit destinée à l’aide à la conduite ou au confort. Les règles de sécurité imposées par l’Union européenne ont aussi joué: il a fallu multiplier les airbags, installer des régulateurs de vitesse intelligents… Bien entendu, la baisse des émissions de CO2 déjà imposée aux constructeurs a pesé très lourd dans la balance. L’émergence des motorisations hybrides, qu’elles soient légères ou plus conséquentes avec les hybrides rechargeables, l’apparition des coûteuses batteries ont joué un rôle d’accélérateur de prix.

La tendance s’est à nouveau affolée en 2021. Aux raisons déjà évoquées se sont ajoutés les effets de la forte reprise mondiale, post pandémie. La crise des semi-conducteurs? Devenus plus rares, ils ont coûté logiquement plus cher. La hausse des prix des matériaux comme l’acier, l’aluminium, le cuivre, s’est conjuguée à celle des prix du transport – le coût de transport d’un conteneur a été multiplié par 5 en un an. Malheureusement pour les consommateurs, la tendance s’est à nouveau accélérée au début de l’année 2022 avec de nouvelles envolées tarifaires, jamais vues. En quelques mois, les Dacia, pourtant voitures low cost du groupe Renault, ont vu leurs tarifs catalogue flamber: des hausses de 300 à 500 euros pour des Duster ou des Sandero. Dans une autre gamme, le prix de la Tesla Model 3 a gonflé de 6 000 euros en quatre mois, pour tutoyer les 50 000 euros.

L’acier, le plastique, toujours le cuivre, mais aussi le nickel, le cobalt, le lithium, le platine ou le palladium: toutes ces matières premières indispensables à la construction d’un véhicule, qu’il soit électrique ou pas, ont été propulsées à des niveaux de prix spectaculaires. Les chaînes de production manquent encore de semi-conducteurs, mais aussi, nouveauté 2022, de faisceaux électriques qui relient les différents composants d’un véhicule. L’invasion de l’Ukraine par la Russie est bien sûr la principale raison avancée par les constructeurs pour expliquer cette brutale hausse. Le retour de la pandémie en Chine, et la pratique des autorités chinoises de la politique zéro Covid, qui consiste à imposer des confinements à des villes entières comme Shanghai, a remis à l’arrêt des pans entiers de l’industrie. Avec pour conséquence les ruptures d’approvisionnements des usines automobiles européennes. 

Extrait du livre de François-Xavier Pietri, « Voiture électrique : ils sont devenus fous ! », publié aux éditions Litos

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