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Droit de vote des étrangers ou l'art de mitonner les questions posées dans les sondages...
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Vous pouvez répéter la question ?

L’institut de sondage BVA publiait ce lundi pour le Parisien une étude sur les Français et le droit de vote aux étrangers. Il ressort que 61% des Français sont favorables au droit de vote des étrangers pour les élections locales. Un score élevé pas forcément déconnecté de la formulation de la question...

Jérôme Fourquet

Jérôme Fourquet

Jérôme Fourquet est directeur du Département opinion publique à l’Ifop.

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Atlantico : L’institut de sondage BVA a publié ce lundi dans Le Parisien une étude sur les Français et le droit de vote des étrangers. La question était la suivante : « Les étrangers venant d’un pays membre de l’Union Européenne ont le droit de voter aux élections locales en France. Vous personnellement, seriez-vous favorable ou opposé à ce que ce droit soit étendu aux autres étrangers, en situation régulière et résidant en France depuis plus de 5 ans ? ». Le résultat montre une forte évolution de l'opinion sur ce sujet, la formulation de la question a-t-elle pu influencer les réponses ?

Jérôme Fourquet : Il faut savoir que c’est un sujet sensible politiquement. Dans ce cadre-là, la façon dont on pose la question peut en effet avoir une incidence sur les résultats que l’on obtient. Cela étant, je n’ai pas à me prononcer sur le fait de savoir si la question a été posée de manière juste ou non. 

Sur ce sujet, le fait par exemple de mentionner ou non, à côté du droit de vote, le droit d’éligibilité pour les étrangers, aurait pu durcir les réponses. Si vous faites figurer la notion d’éligibilité dans le libellé de la question, on peut penser que la proportion des gens favorables serait moins importante.

Le deuxième aspect qui peut favoriser un taux de réponse plus favorable est le fait de faire figurer dans la question l’idée que les étrangers ressortissants de l’Union européenne soient déjà eux-mêmes titulaires du droit de vote. Le fait de mentionner cela fragilise l’argumentaire de l’UMP qui défend le fait que le droit de vote soit consubstantiel à la nationalité. Logiquement, seul les Français pourraient donc voter. Or, aux élections municipales et européennes, des Espagnols, des Allemands peuvent voter. Les gens peuvent donc dire: « Si eux ils peuvent, pourquoi les autres ne le pourraient pas ? ».

En mettant cette accroche là et en ne mentionnant pas le droit d’éligibilité, on maximise clairement les réponses favorables.

Pourquoi alors utiliser une telle formulation ?

Cette formulation est historique. C’est la même utilisée par l'institut CSA depuis plus de dix ans. Sur des sujets aussi sensibles que celui-ci, pour pourvoir parler d’évolution, il est indispensable de reprendre la question telle quelle. Sinon, on ne sait pas si l’évolution vient de l’opinion elle-même ou du fait que l’on ait changé la question. Seul un libellé en tous points exacts autorise la comparaison dans le temps.


Les résultats du sondage auraient-ils pu être différents si l’on avait remplacé le terme « étranger » par « immigré » ?

Durcir les termes, c’est durcir les réponses. Les termes ne sont pas neutres. Sur un sujet éminemment sensible comme celui-ci, il faut être le plus équilibré possible, le plus objectif. La formulation « étrangers » est plus appropriée que la notion d’ « immigrés », plus connotée.

Propos recueillis par Jean-Benoît Raynaud

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