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Le prix du Brent est de plus en plus le meilleur indicateur de la réalité international du marché pétrolier.
Le prix du Brent est de plus en plus le meilleur indicateur de la réalité international du marché pétrolier.
©Reuters

Flambée

Le pétrole vaut 117 dollars le baril pour le brent et 100 dollars pour le brut léger américain. Avec la perspective d'éventuelles frappes israéliennes sur l'Iran, un baril à 250 dollars est-il envisageable ?

Philippe Chalmin

Philippe Chalmin

Philippe Chalmin est professeur d’histoire économique à l’Université Paris-Dauphine où il dirige le Master Affaires Internationales. Membre du Conseil d’Analyse Economique auprès du Premier Ministre, il est le président fondateur de CyclOpe, le principal institut de recherches européen sur les marchés des matières premières.

Il est l’auteur d’une quarantaine d’ouvrages, dont le récent « Demain, j'ai 60 ans : Journal 2010 - 2011 ».

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A la mi-février 2012, le pétrole vaut 117 dollars le baril pour le Brent et 100 dollars pour le brut léger américain (WTI). Les prix aux Etats Unis étant de plus en plus sensibles à la situation locale marquée par l’augmentation de la production tant de gaz naturel que de pétrole grâce à l’utilisation des techniques de fracturation des roches (« fracking »), le prix du Brent est de plus en plus le meilleur indicateur de la réalité internationale du marché pétrolier.

A 117 dollars, le prix du pétrole intègre déjà nombre de fondamentaux : à la hausse, il y a bien sur les tensions liées depuis un an au Printemps arabe et qui affecte encore la Syrie, l’Egypte et le Yémen ; il y a aussi l’augmentation de la demande des pays émergents et tout particulièrement de la Chine. Il y a enfin l’Iran. Mais il faut tenir compte aussi des éléments qui jouent en faveur sinon de la baisse, au moins de la modération des prix : l’AIE ne vient-elle pas de diminuer encore sa prévision pour la demande mondiale de pétrole en 2012 – cette fois de 500 000 barils/jour (bj) – afin de tenir compte des problèmes économiques européens. Et puis l’Arabie Saoudite n’a cessé dans le courant de 2011 d’augmenter sa production à près de 10 millions bj pour compenser les déficits des autres producteurs de l’OPEP. Au début de 2012 d’ailleurs, la plupart des observateurs sont surpris de la rapidité du retour à la normale de la production en Libye. Enfin, c’est autour de 100 dollars le baril que s’équilibre vraiment les budgets des pays producteurs les plus dépensiers comme le Venezuela, l’Algérie ou l’Iran.

Le marché intègre donc déjà une certaine prime de risque iranienne liée pour l’instant plus à la turbulence du régime qu’à l’éventualité de frappes israéliennes sur son potentiel nucléaire (Israël reste aujourd’hui dans le registre « retenez-moi sinon je vais le taper » en espérant bien qu’il sera retenu).

L’Iran n’est plus un facteur important du marché pétrolier : la faiblesse des investissements, l’augmentation de consommation d’une population de 80 millions d’habitants font qu’en 2020, le pays pourrait être importateur net de pétrole. Les embargos américain et européen qui affectent jusqu’à la banque centrale d’Iran commencent à porter leurs fruits. Dans le pire des cas, le marché du pétrole perdrait 2 millions bj destinés pour l’essentiel à l’Asie. Les autres pays arabes membres de l’OPEP et hostiles à l’Iran ont encore les moyens de compenser un tel déficit. Au-delà, il y a le problème du détroit d’Ormuz par lequel transitent entre 15 et 20 millions bj. L’Iran a-t-il les moyens de le bloquer face aux puissantes flottes occidentales ? Ses dirigeants ont-ils aussi la volonté de pousser aussi loin la confrontation ? Nous rentrons là dans le domaine de la conjecture voire de l’irrationnel qui sera aussi celui des marchés.

Une frappe sur l’Iran pousserait certainement dans un premier temps les prix du Brent au-delà de 150 dollars. Mais quel scénario imaginer ensuite ? Si le conflit reste strictement confiné à l’Iran, sachant même que ses livraisons vers la Chine ou l’Inde pourraient ne pas être affectées, le marché pourrait se « stabiliser » dans la zone des 130 à 140 dollars le baril. Mais si toute la région s’embrase et qu’effectivement la voie maritime du Golfe est coupée, les pires scenarii deviennent possibles et, pourquoi pas, le baril pourrait monter à 250 dollars au moins pendant quelques jours.

C’est à notre sens aujourd’hui le plus improbable des scenarii, mais il a au moins le mérite de nous rappeler en plus que son caractère polluant, le pétrole a l’énorme inconvénient d’avoir l’essentiel de ses réserves exploitables dans la région géopolitiquement la plus instable de la planète. En tout état de cause, le temps du pétrole bon marché est révolu et c’est probablement mieux comme cela pour les générations futures !

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