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Soldes en ligne : pourquoi les sites de e-commerce voudraient nous convertir au Black Friday américain
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Consommation ostentatoire

Les grands acteurs américains du e-commerce ont tout intérêt à étendre ce rite en Europe et en France.

Christophe Benavent

Christophe Benavent

Professeur à Paris Ouest, Christophe Benavent enseigne la stratégie et le marketing. Il dirige le Master Marketing opérationnel international.

Il est directeur du pôle digital de l'ObSoCo.

Il dirige l'Ecole doctorale Economie, Organisation et Société de Nanterre, ainsi que le Master Management des organisations et des politiques publiques.

 

Le dernier ouvrage de Christophe Benavent, Plateformes - Sites collaboratifs, marketplaces, réseaux sociaux : comment ils influencent nos Choix, est paru en mai  2016 (FYP editions). 

 
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Le commerce est aussi une question de rituel. Son caractère obligatoire a un avantage remarquable : il supprime toute culpabilité quant à l'achat, qui en est un des gestes et en fait une sorte de communion. Le rituel est aussi ce qui rassemble et démontre l'appartenance à la communauté au moins par le partage des mêmes gestes. Il encourage aussi l'imitation voire même une forme de compétition qui est l'essence même du phénomène de la consommation ostentatoire : trouver la meilleure bonne affaire, le gadget le plus fun.

Le black friday est un de ces grands rites de la consommation aux Etats-Unis. Il ne l'est pas chez nous. Mais on peut comprendre que les grands acteurs américains du e-commerce aient intérêt à étendre ce rite en Europe et en France en particulier. Ils en maîtrisent les codes et la logistique, ils auraient tout intérêt à en faire une fêtes globale.

Le problème est que ce rite n'existe pas chez nous et qu'il se confronte à une morosité qui encourage la procrastination : les acteurs du commerce se doutent que les achats de Noël se feront à la toute dernière minute, ils s'y préparent.

Si on se met à la place d'Amazon, un exemple parmi les autres, la première conséquence est qu'il faudra sorte les armes lourdes : pour lancer la saison des achats commencer par des soldes généralisées, massives et poctuelles. Une manière d'amorcer la migration de Noel dans les boutiques et dans les rayons électroniques. C'est intéressant, car cette planification de la période promotionnelle est inverse aux soldes traditionnelles : soldons avant plutôt qu'après. Et c'est assez tendance.

Il faut aussi organiser l'atmosphère. Naturellement pour le marketeur, c'est une question de relations publiques. Sensibiliser la presse et les médias, entraîner les unions de commerce, convraincre les centres commerciaux. Ce n'est pas si simple, l’exemple d'Halloween montre que le rite ne s'est pas institutionnalisé, il reste un phénomène de mode, artificiel et périphérique.

Un élément cependant dans nos cultures pourrait servir de point d'accroche : la tradition des "avents". Dans le cérémonial de Noel, certains éléments ont connu une diffusion forte en quelques années et se sont installés pleinement là où ils n'étaient pas avant : les villages de Noel venus d'Allemagne et d'Alsace en sont l'exemple le plus remarquable, ils amènent la neige là ou elle ne tombe pas. Les calendriers de l'avent qui ponctuent les jours du mois précédents et les 4 dimanches d'avant noël avec les bonbons et chocolats pour les enfants et les plus grands. Là aussi une coutume s'est diffusée, sous la forme d'un objet particulier. Son timing correspond au black friday. Et il y aurait sans doute matière à travailler ce calendrier.

D'un point de vue stratégique, notons toutefois que les acteurs dominants du secteur n'ont peut-être pas besoin de cette ritualisation. Les promotions offertes ce jour précis, si elles sont fortes, permettent de préempter le marché en séduisant les consommateurs les plus prévoyants, qui sont aussi ceux qui disposent de la plus grande trésorerie. Cela n'est pas une opération sur les clients, en découvert permanent ! C'est sans doute là toute la finesse de cette stratégie. Même si le black friday n'est pas destiné à s'institutionnaliser, il est une prétexte idéal pour mener cette opération de préemption. 

En conclusion, quelques chiffres : en 2013 au Etats-Unis, ce marché (un seul jour) a représenté 61,4 milliards de dollars et 249 millions de consommateurs. Le marché de Noel français doit être de l'ordre de 10 milliards d'euros avec une dépense qui sera de l'ordre de 520 euros par personne, dont 60 euros pour le e-commerce.

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