Sauvetage des manuscrits de Tombouctou : pourquoi on n'efface pas si facilement une culture<!-- --> | Atlantico.fr
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Les manuscrits de Tombouctou ont été sauvés de la destruction.
Les manuscrits de Tombouctou ont été sauvés de la destruction.
©REUTERS/Benoit Tessier

Immortel patrimoine

Maintenant libérée, la ville de Tombouctou révèle que ses manuscrits vieux de plusieurs siècles ont été sauvés de la purge djihadiste. Belle leçon que nous donne les Maliens de la dimension indestructible du patrimoine.

Dominique Audrerie

Dominique Audrerie

Dominique Audrerie est un expert indépendant des questions environnementales.

Il est également docteur en droit de l'environnement et ancien directeur du Conseil d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (en 1993).

Il est avocat à la Cour et maître de conférences.

Il est l'auteur de Petit vocabulaire du patrimoine culturel et naturel (Confluences, 2003).

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Qu'est-ce qu'une civilisation? L’histoire nous rapporte que bien des civilisations ont vu le jour au cours des millénaires passés. Les unes ont disparu, d’autres ont formé le socle de civilisations nouvelles, comme l’Egypte ou la Grèce ou encore Rome.

Mais peut-on en effacer le souvenir ? Dans les périodes troubles, les esprits fanatiques essaient - je dis bien "essaient" - d’effacer les traces, les souvenirs ou les symboles de ce qu’ils rejettent : ils détruisent, ils brûlent, ils enterrent ce qu’ils refusent, comme si le vandalisme suffisait à transformer le monde.

L’abbé Grégoire, aux temps de la Révolution, s’est élevé contre l’action de ces vandales, ainsi les a-t-il nommés, qui ont confondu dans la violence renouveau et ignorance, évolution et négation. Détruire est facile, respecter ou assumer pour aller plus loin suppose réflexion et modestie.

A Tombouctou, de modernes vandales ont refait les gestes de ceux qui, au fil des siècles, ont avec une application confondante cherché à annihiler ce qu’ils ne comprenaient plus.

Vaine tentative, car la civilisation, si elle est riche des témoignages ou des œuvres qui la manifestent, est d’abord dans les cœurs. Elle vit à travers ceux qui en portent les valeurs. Elle se transmet par des hommes fiers de leur passé et soucieux de l’avenir. Ses symboles peuvent disparaître, non son message.

A Tombouctou, des enragés ont cru pouvoir effacer la mémoire. Il n’en est rien. Tant que des hommes, fussent-ils peu nombreux, en garderont vivant le sens, l’avenir en restera marqué.

Toute civilisation est porteuse à la façon d’une mère. Les enfants sont libres de leur avenir, mais ils ont en eux-mêmes les gènes de ce qui les a produits. Bêtise que de croire effacer un héritage, surtout quand il n’est pas le sien.

Il en restera toujours un qui, au milieu des tourments, gardera le flambeau sous le boisseau ou en pleine lumière. Demain, encore vivant, enrichi ou transformé, même inconsciemment, l’héritage des siècles poursuivra son ouvrage.

Toute civilisation est immortelle. A chacun d’en retrouver les marques.

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