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Sans programme fixe : Emmanuel Macron contraint à l'ambiguïté par le soutien "pressant" des proches de François Hollande
©Crédit Flickr mastermaq

JMS

Emmanuel Macron tarde à préciser son programme et pour cause, il se retrouve coincé par les amis de François Hollande qui lui imposent un double discours.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Le dernier discours d’Emmanuel Macron a attiré la grande foule à Lyon, mais n’a pas permis de préciser sa route de campagne présidentielle.  Trop flou, trop futile, trop angélique. Séduisant mais frustrant. Seuls les Lyonnais étaient vraiment contents. Ils ont compris que Emmanuel Macron pouvait être leur futur maire. Ce jeune homme brillant et pragmatique leur conviendrait. Gérard Colomb ne cache plus à ses amis proches que s’il n’était pas président de la République, il en ferait son successeur à la tête de cette métropole lyonnaise dont le dynamisme international talonne désormais celui d’un Paris handicapé par le sectarisme de Anne Hidalgo.

Dans la course à la présidentielle, les sondages donnent Emmanuel Macron en finale face à Marine Le Pen, mais avec un électorat très hétérogène. Il draine à gauche, a droite et au centre des Français qui n'ont pas encore définitivement fixé leur vote. Ils attendent d’en savoir plus sur le programme. Et c’est bien la fragilité de Macron. L'ancien ministre de l'Economie a lancé son entreprise politique sur l‘échec de la politique mise en œuvre par François Hollande, avec une offre très proche de celle proposée par Manuel Valls. Macron et ses amis pensaient qu’il a avait plus de charisme et surtout plus de liberté que Manuel Valls pour mettre en œuvre une politique "pro-business" dans la mesure il n’avait pas le handicap d’avoir servi la messe dans la paroisse socialiste avec tous ces courants contradictoires qui ont pourris le quinquennat. François Hollande et tous ses proches n’étaient pas loin de partager cette analyse. Emmanuel Macron est donc parti seul ou presque et a taillé son succès sur un diagnostic partagé par toute la classe politique à l’exception des segments extrémistes. Le diagnostic de la situation française est connu depuis 20 ans. Il a fait l’objet de rapports et de recommandations multiples. Le pays est en risque d’asphyxie et de conservatisme notoire incapable d’assumer les contraintes de la modernité et de la mondialisation. Plutôt que de voir dans la modernité, l’Europe, et la mondialisation, autant d’opportunités de croissance, d’emplois, de progrès et de richesse, la France a toujours eu tendance à y voir des facteurs anxiogènes. D’où la tendance au repli, à la protection. Largement entretenue par les corporatismes professionnels et syndicaux.

Avec un tel diagnostic qui ne désigne aucun responsable et ne condamne personne, au contraire, Emmanuel Macron a su s’imposer dans les couches sociales qui n’ont pas trop souffert de la mondialisation ces dix dernières années. Drainant aussi bien les électeurs de gauche très socio-démocrates que les libéraux de droite et plus particulièrement les jeunes et les chefs d’entreprise. Le problème c’est qu'au fur et à mesure que la situation politique se décante et que la part de marché d’Emmanuel Macron s’est élargie, la demande de précision se fait plus pressente. Il lâche donc, au compte-gouttes des mesures qu’il pourrait prendre et se retrouve tiraillé dans tous les sens.

N’étant au départ, ni de gauche, ni de droite, ce qui était un atout, il se retrouve, à l’arrivée, entre la gauche et la droite, ce qui est un handicap. Il reste sur son diagnostic, il invite le pays à s'ouvrir au monde, à l’Europe, aux nouvelles technologies, mais il butte sur la réalité des mesures à prendre pour mettre en musique ses ambitions.

Deux exemples dans le domaine économique. Sur l’ISF, par exemple, il en a dit, au départ, tellement de mal, pour admettre aujourd’hui qu'il faudra le garder quitte à le modifier un peu, pour qu’il ne pénalise pas trop les chefs d’entreprise. Cela étant, il gardera l’ISF. Autre exemple, sur les 35 heures. Quand il était au gouvernement, il n’avait pas de mots assez dur pour les condamner. Puis il a convenu dans un premier temps qu’il faudra sans doute les conserver pour les salariés les plus âgés. Et maintenant, il n’est plus question d’y toucher. A chaque retour en arrière, Emmanuel Macron va perdre des points dans les sondages avec le risque de permettre à Benoit Hamon d’arriver second au premier tour si François Fillon ne se redresse pas.

Les ambiguïtés de plus en plus flagrantes dans le discours d'Emmanuel Macron sont, semble- t-il lié à trois séries de facteurs.

D’abord, l’homme n’avait pas au départ de convictions idéologiques très fortes. Il avait seulement l’intuition que la France souffrait d une croissance molle et que dans ce contexte, il fallait faire une politique de l’offre par une meilleure compétitivité des entreprises. D’où ses pulsions pro-business. Ensuite, il a sans doute pensé que des mesures pro-business allaient aussi déplaire à une frange de son électorat plus conservatrice mais dont il aurait besoin d’où les bémols qu‘il accroche à certaines de ses ambitions. Enfin, faut reconnaître qu’Emmanuel Macron est désormais très soutenu par des amis proches de François Hollande. C’est Jean-Pierre Jouyet, le secrétaire général de l’Elysée, fidèle entre les fidèles du président qui a "fabriqué Emmanuel Macron". C’est lui, qui a toujours parrainé Emmanuel Macron dans les milieux d’affaires et administratifs. C’est lui qui inspire grandement le groupe des Gracques, un groupe de haut-fonctionnaires très influent.

Au niveau économique, le travail est désormais préparé par Jean Pisani-Ferry, un économiste du Cercle des économistes que dirige Jean-Herve Lorenzi, mais était déjà un des inspirateurs du programme économique de François Hollande en 2012. Des économistes qui n'ont pas la réputation d’avoir proposé des mesures particulièrement pro-business. La levée de toutes les ambiguïtés de son programme sera compliquée.

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