Retraites : la France toujours aussi éloignée d’une BONNE réforme<!-- --> | Atlantico.fr
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La réforme des retraites est l'une des priorités d'Emmanuel Macron.
La réforme des retraites est l'une des priorités d'Emmanuel Macron.
©GONZALO FUENTES / POOL / AFP

Priorités du quinquennat

La piste d'une réforme des retraites via le budget de la Sécurité sociale "n'a pas été écartée" lors d'une réunion au ministère du Travail avec les syndicats.

Nathalie MP Meyer

Nathalie MP Meyer

Nathalie MP Meyer est née en 1962. Elle est diplômée de l’ESSEC et a travaillé dans le secteur de la banque et l’assurance. Depuis 2015, elle tient Le Blog de Nathalie MP avec l’objectif de faire connaître le libéralisme et d’expliquer en quoi il constituerait une réponse adaptée aux problèmes actuels de la France aussi bien sur le plan des libertés individuelles que sur celui de la prospérité économique générale.
 
https://leblogdenathaliemp.com/

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Décembre 2019. Vous vous souvenez ? On ne parlait pas encore de Covid-19 et encore moins d’inflation, de prix de l’énergie et de guerre en Ukraine, mais le pays était déjà au bord de la crise de nerfs, encore une fois dans la rue, encore une fois dans le rapport de force syndical, les blocages, les TGV à l’arrêt et les vitrines cassées, pour s’opposer de toutes ses forces à la retraite universelle à points annoncée par Emmanuel Macron dans son premier programme électoral.

Ah, la France et son précieux modèle social ! Du déficit dans tous les comptes, du chômage qui persiste à rester nettement au-dessus de la moyenne européenne, du pouvoir d’achat qui fait grise mine, de la dette qui caracole plus que jamais, des statuts privilégiés… et des régimes de retraite très spéciaux dans le secteur public. Mais que personne, jamais, ne s’avise d’y toucher ! La « casse sociale » ne passera pas !

Toute la planète anticapitaliste, de la France insoumise de Jean-Luc Mélenchon au Rassemblement national de Marine Le Pen en passant par la CGT, SUD et consorts très solidaires, y veillait à l’époque et continue d’y veiller de près, maintenant qu’Emmanuel Macron, reconduit à l’Élysée, envisage de renouer au plus vite avec son profil de grand réformateur autoproclamé par le biais d’une nouvelle réforme des retraites.

Il faut se souvenir qu’à peine un mois avant le premier tour de l’élection présidentielle, le président en campagne nous avait gratifié d’un petit programme bouclé à la va-vite dans lequel il avait lancé l’idée de faire passer l’âge de départ en retraite de 62 à 65 ans. Une résolution qui s’est rapidement émoussée quelques semaines plus tard, quand il est devenu clair que M. Mélenchon, grand héraut de la retraite à 60 ans, serait l’arbitre du second tour qui allait l’opposer à Marine Le Pen, laquelle était (et est toujours) tout aussi résolument accrochée aux 60 ans (avec l’option d’un référendum populaire).

Mais pour Emmanuel Macron, la réforme n’est pas vraiment optionnelle. Dans le contexte actuel marqué par le niveau dangereusement élevé de la dette publique française, elle doit lui permettre d’abord de montrer à ses partenaires de l’Union européenne qu’il s’engage résolument sur le chemin des réformes structurelles (je ne vous étonnerai pas en vous disant que le gouvernement prévoit miraculeusement de ramener notre déficit public à 3 % du PIB en 2027…), mais ensuite et surtout, de dégager des marges de dépenses supplémentaires pour mener à bien la suite éperdue du « quoi qu’il en coûte » inauguré avec la pandémie de Covid.

D’où un nouveau projet où l’âge légal de départ pourrait ne pas être repoussé jusqu’à 65 ans, peut-être seulement 63 ou 64 ans, via l’adjonction d’un volet sur la hausse de la durée de cotisation qui, elle, pourrait passer à 43 ans. Mais surtout, aller vite ; pouvoir commencer à engranger les effets budgétaires dès 2023.

Pour ma part, il m’était et il me sera encore aujourd’hui tout à fait impossible de soutenir des mouvements sociaux largement alimentés par des syndicats marxistes archaïques, abusivement campés sur leurs privilèges et dont le pouvoir de nuisance constitue finalement le seul argument. Mais il m’était et il m’est à nouveau tout aussi impossible de soutenir la réforme des retraites proposée par le gouvernement.

On pourra tripatouiller tous les paramètres et tous les curseurs qu’on voudra, rajouter 1/8è de trimestre par-ci, mettre des bonus-malus par-là pour inciter les gens à travailler plus longtemps, le simple fait de rester intégralement et obligatoirement dans le système par répartition que nous connaissons depuis la deuxième guerre mondiale met les retraités à la merci totale de décisions purement politiques, qu’il s’agisse de pallier une mauvaise gestion chronique ou de financer l’ingénierie sociale qui a toujours fait frétiller les élus de nos partis politiques, constructivistes si ce n’est par nature, éventuellement par conviction et à coup sûr par esprit de conservation politique personnelle.

Je vous propose donc de retrouver ci-dessous les articles que j’ai eu l’occasion d’écrire sur cette question depuis 2019 (cliquer sur les images pour accéder aux textes).

Commençons par une présentation de la pensée collectiviste de gauche qui, chez nous, domine la réflexion sur les retraites depuis 1945 et nous condamne au système par répartition parce que c’est comme ça, c’est bien, c’est solidaire – aussi mal goupillé et aussi privatif de liberté soit-il :

La réforme initiale voulue par Emmanuel Macron (universelle à points) avait pour ambition de mettre tout le monde sur le même pied. Cela signifiait la fin des régimes spéciaux de la RATP et de la SNCF (notamment) d’où la farouche opposition des syndicats d’extrême-gauche, mais cela englobait aussi la fin des régimes dits autonomes (des avocats, des pharmaciens, etc.).

Or les deux choses n’ont rigoureusement rien à voir l’une avec l’autre.

Les premiers sont salariés du secteur public. À force de grèves et de blocages, ils ont obtenus de multiples avantages concernant leur âge de départ en retraite, le niveau de leurs pensions et leur durée de cotisation à tel point que leurs régimes très spéciaux doivent perpétuellement être équilibrés par l’argent des contribuables – 8 milliards d’euros par an selon les estimations du ministre du budget de l’époque Gérald Darmanin.

À l’inverse, les régimes dits « autonomes » ne peuvent compter que sur les cotisations de leurs adhérents et une bonne gestion des fonds ainsi obtenus pour verser des pensions satisfaisantes à leurs retraités et assurer l’équilibre à long terme du système. Qui dit bonne gestion dit réserves, réserves que la réforme prévoyait ni plus ni moins de s’approprier pour les fondre dans un système de plus en plus étatisé dont on sait au fil des comptes publics qu’il est mal géré et générateur de déficit perpétuel :

Dès lors, à quoi pourrait ressembler une bonne réforme des retraites ?

Au fond, la retraite, c’est très simple. Celui qui travaille a la « prévoyance » de mettre de côté un peu de son salaire chaque mois pour assurer sa subsistance dans ses vieux jours. S’il place les sommes ainsi mises de côté – et personne ne dit qu’il doive les placer en junk bonds ou en actions à très haut risque – il se retrouvera le moment voulu (choisi) avec un capital qu’il aura lui-même constitué.

Dans le système par répartition, les sommes versées en cotisations retraite par les actifs ne sont pas vraiment « mises de côté » ; elles sont payées immédiatement aux retraités. L’actif qui cotise n’a encore rien assuré pour sa retraite. Les sommes qui lui reviendront n’existent pas encore et il n’a d’autre choix que de faire confiance à l’administration pour qu’elle maintienne le système en état de marche jusqu’à sa mort.

Or ce qui fonctionnait quand l’âge de départ en retraite était de 65 ans et l’espérance de vie de 70 ans, ne fonctionne plus aujourd’hui. Entre déficits chroniques qui obligent à remettre une réforme sur la table à chaque quinquennat et décisions arbitraires des pouvoirs publics pour favoriser telle catégorie de citoyens aux dépens des autres dans le contexte de comptes publics non maîtrisés, une telle confiance n’est pas raisonnable.

Aussi, lorsque je parle de baisser les dépenses publiques, ce qui m’arrive assez souvent, je ne signifie nullement qu’il faudrait par exemple réduire arbitrairement les pensions – ce qu’a fait Macron. Je veux dire qu’il est temps de sortir ce domaine de la mainmise étatique et rendre aux Français la maîtrise et la responsabilité de leur retraite en cassant le monopole de l’État providence et en permettant à chacun d’inclure de la retraite par capitalisation dans son plan de retraite : 


Retraites : changer le système. Mais vraiment. (23 mars 2019)

Alors, la réforme des retraites, vous êtes POUR ou CONTRE ? (6 décembre 2019)
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RETRAITES : et si l’on sortait de la TUTELLE étouffante de l’ÉTAT ? (14 mars 2022)

Pour finir en beauté, n’oublions pas les valeureux politiciens engagés à fond sur cette réforme « si importante pour nos concitoyens ».

D’abord Jean-Paul Delevoye, Haut-commissaire aux retraites puis ministre en titre puis ex de tout cela car le pauvre chéri n’avait pas du tout l’idée qu’il fallait être rigoureux dans sa déclaration d’intérêts au moment d’entrer dans la sphère gouvernementale. Lui, le ministre qui prétendait nous gouverner, il aurait voulu que quelqu’un le prenne par la main et lui dise tout ce qu’il devait faire à ce sujet !

Bref, démission sans gloire, même si la Macronie s’est surpassée dans les trémolos hypocrites pour louer la « décision courageuse » de cet « habile négociateur » dont les couacs à répétition l’agaçait fort peu de temps auparavant.

Et puis finalement, Laurent Pietraszewski. Laurent qui ?


Delevoye ou la MÉDIOCRITÉ ordinaire du « modèle » français (17 décembre 2019)


Réforme des retraites : Pietraszewski ou la CONTINUITÉ (19 décembre 2019)

Voilà. Nous en sommes là. À partir de maintenant, le ministre du Travail Olivier Dussopt passe à la manœuvre.

Le parcours politique de ce dernier est particulièrement sinueux : proche de Martine Aubry à une époque, il avait ensuite rejoint Valls, avant de devenir le porte-parole de Benoît Hamon pour la primaire de gauche de 2016 et de se la jouer très anti-LREM jusqu’au jour bienheureux de son entrée dans le gouvernement d’Emmanuel Macron en novembre 2017 comme secrétaire d’État à la fonction publique auprès du ministre du budget Gérald Darmanin.

À noter qu’il avait voté contre le projet de loi de finances 2018 comme tous ses collègues socialistes seulement trois jours avant sa nomination ! C’est merveilleux de se sentir soudain aussi proche d’un gouvernement avec lequel on n’avait rien, mais alors vraiment rien en commun ! Une vraie renaissance, le macronisme ! Ça promet.

Cet article a été initialement publié sur le site de Nathalie MP : cliquez ICI

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