Retraite : les trois raisons pour réformer et que le gouvernement n’a pas osé expliquer clairement<!-- --> | Atlantico.fr
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Le gouvernement a engagé une réforme qui doit reculer l’âge de départ à la retraite, ce qui nécessite un effort important dans toutes les strates de la population.
Le gouvernement a engagé une réforme qui doit reculer l’âge de départ à la retraite, ce qui nécessite un effort important dans toutes les strates de la population.
©Bertrand GUAY / POOL / AFP

Atlantico Business

Personne ne sait ce qu’il arrivera à la réforme des retraites à l’issue de cette journée de blocage. Ce que l’on sait, c’est qu’il y a des vraies raisons à réformer le système et que le gouvernement n’a pas osé, au départ, les expliquer clairement.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Personne ne peut croire quun gouvernement, quel quil soit, engage une réforme douloureuse pour « emmerder » les Français. Il peut y avoir des raisons politiques ou idéologiques mais si ces réformes vont à lencontre de la réalité, elles sont généralement abandonnées quand la preuve est faite quelle entraine plus de difficultés que davantages. Les exemples existent. Sur le nucléaire par exemple, on a mis une dizaine dannées à reconnaitre que la décision dabandonner lindustrie du nucléaire avait été une erreur stratégique par rapport aux besoins. Et plus grave, elle ne correspondait pas aux objectifs quon s’était donné pour « sauver la planète » en fonctionnant avec des énergies alternatives et décarbonées. Sur la décision dinterdire la vente de voitures thermiques à partir de 2035, on vient de sapercevoir que la mesure serait inapplicable et provoquerait une catastrophe industrielle et sociale si on imposait la voiture électrique.sultat: A limage de lAllemagne, tous les pays européens finiront par annuler cet impératif. 

Sur les retraites, on assiste au même phénomène. Depuis vingt ans, on se retrouve obligé de réformer le système de fonctionnement des retraites parce quon a rarement le courage de prendre en compte les réalités des raisons pour lesquelles le système est bancal. La réalité simpose et risque de démolir le système.

Aujourd’hui, le gouvernement a engagé une réforme qui doit reculer l’âge de départ à la retraite, ce qui nécessite un effort important dans toutes les strates de la population. Sans en expliquer les vraies raisons. Le mur de la réalité est incontournable comme souvent.

Il existe trois raisons pour lesquelles une réforme du système des retraites est incontournable.

La première est démographique. L’équilibre du système de retraite dépend du rapport  entre les actifs (ceux qui travaillent) et les inactifs (ceux qui sont à la retraite). Il y a de moins en moins dactifs pour de plus en plus dinactifs. Du coup, les recettes de cotisations ne sont pas suffisantes pour garantir le paiement des pensions.

Alors on a sans doute épuisé toutes les variables comptables pour ajuster le système. On ne peut plus augmenter les cotisations (parce quelles pèsent sur le coût du travail) ; on ne peut pas réduire les pensions parce que politiquement, ça revient à pénaliser ceux qui sont à la retraite.

La seule solution est donc dallonger la durée pendant laquelle on va travailler au prorata de lallongement de l’espérance de vie. Seul moyen daugmenter les moyens financiers à redistribuer. Alors, on peut, en marge, aménager des dispositifs spécifiques pour tenir compte de la pénibilité ou du travail des femmes. Mais cest un autre sujet. A priori, la retraite nest pas faite pour corriger les inégalités sociales ou professionnelles. Il y a dautres outils pour cela.

La deuxième raison, protéger la retraite par répartition. Question de principe politique mais pas que.  Le système qui est le nôtre est un système assuranciel conjugué par des éléments de solidarité. Cest un système qui est au cœur de lADN du modèle social français. Il existe dautres formules pour gérer la retraite et notamment des formules de capitalisation. Ces formules reposent sur un principe simple : chacun fabrique sa retraite selon ses moyens et ses objectifs. En bref, chacun constitue sa propre épargne-retraite. Alors la généralisation de la capitalisation serait compliquée parce que beaucoup de salariés nont pas les moyens de se constituer une épargne-retraite et donc un système par capitalisation serait générateur dinégalités. Cela dit, la retraite par capitalisation existe déjà en complément du régime de base par répartition. Les fonctionnaires ont mis en place une capitalisation. Les plus riches, pour leur part, peuvent aussi ouvrir une assurance-vie et compte tenu des montants drainés, ils ne sen privent pas. Nempêche que la capitalisation est portée par une logique dindividualisation du retraité, à lopposé de la logique d’équité ou de solidarité de la répartition.

La troisième raison de faire cette réforme porte sur la nécessité de rassurer les milieux financiers internationaux. La France est endettée pour son fonctionnement quotidien. La France emprunte tous les mois quelques 50 milliards d’euros auprès des épargnants étrangers pour faire ses fins de mois et payer ses fonctionnaires ou les frais de son modèle social.

La France emprunte cet argent dans des pays européens où les systèmes de retraites ont retardé l’âge de départ à plus de 65 ans, voir 67 ou 70 ans. Difficile dans ces conditions, de trouver des financements dans des pays qui font un effort d’équilibre que nous refuserons de faire.

Donc ça nest pas seulement le financement de la retraite qui en jeu dans cette réforme, cest le financement de tout le système économique français. Si on veut continuer demprunter de largent sur les marchés internationaux, nous devons apporter la preuve que nous serions capables de redresser nos finances publiques.

Cette 3e raison est la plus compliquée à avouer parce quelle souligne avec force notre problème global de financement.

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