Régis de Castelnau : "Même si ça peut être juridiquement fondé, Nicolas Sarkozy est traité de manière spécifique par les juges"<!-- --> | Atlantico.fr
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Nicolas Sarkozy lors d'une séance photo pour l'AFP. Le tribunal judiciaire de Paris a ordonné l'audition comme témoin de Nicolas Sarkozy dans le cadre du procès des sondages de l'Elysée. .
Nicolas Sarkozy lors d'une séance photo pour l'AFP. Le tribunal judiciaire de Paris a ordonné l'audition comme témoin de Nicolas Sarkozy dans le cadre du procès des sondages de l'Elysée. .
©JOEL SAGET / AFP

Sondages de l'Elysée

Le tribunal judiciaire de Paris a ordonné mardi l'audition comme témoin de Nicolas Sarkozy. Son témoignage est jugé "nécessaire" au procès des sondages de l'Elysée. Nicolas Sarkozy n'est pas poursuivi dans ce dossier en raison de son immunité présidentielle.

Régis de Castelnau

Régis de Castelnau

Avocat depuis 1972, Régis de Castelnau a fondé son cabinet, en se spécialisant en droit social et économie sociale.

Membre fondateur du Syndicat des Avocats de France, il a développé une importante activité au plan international. Président de l’ONG « France Amérique latine », Il a également occupé le poste de Secrétaire Général Adjoint de l’Association Internationale des Juristes Démocrates, organisation ayant statut consultatif auprès de l’ONU.

Régis de Castelnau est président de l’Institut Droit et Gestion Locale organisme de réflexion, de recherche et de formation dédié aux rapports entre l’Action Publique et le Droit.

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Atlantico : La justice ordonne laudition de Nicolas Sarkozy comme témoin au procès des sondages de lElysée. Le président pensait être couvert par son immunité présidentielle et avait refusé de venir témoigner. Comment la justice justifie-t-elle cette décision ? Quid de limmunité présidentielle ?

Régis de Castelnau : Cette question est relative à l’immunité du Président de la République sous la Vème République. L’immunité a donné lieu à de nombreux commentaires, de polémiques et elle a été réformée en 2005, l’article 68 de la Constitution est devenu l’article 67.

Aujourd’hui, à propos de Nicolas Sarkozy on doit répondre à l’interrogation suivante : est-il protégé par son immunité présidentielle ?

Il est protégé car l’article 67 de la Constitution prévoit explicitement qu’on ne peut pas demander de comptes à Nicolas Sarkozy pour des actes accomplis durant sa mandature et on ne peut pas non plus le convoquer à propos de cette période. Il y a une immunité et une inviolabilité. Cette inviolabilité persiste après son mandat et dans l’article 67 rien ne s’y oppose.

Le procès des sondages de l’Élysée qui se déroule actuellement porte sur des marchés portés par l’Élysée pendant le mandat de Nicolas Sarkozy. On considère qu’ils étaient illégaux et qu’ils n’obéissaient pas aux formalités de mise en concurrence.

Nicolas Sarkozy a été cité comme témoin de l’affaire or c’était le décideur à l’époque du choix de Buisson comme prestataire. L’article 67 de la Constitution prévoit explicitement qu’on ne peut pas demander de comptes à Nicolas Sarkozy pour les actes accomplis pendant qu’il était président de la République et on ne peut pas non plus le convoquer comme témoin pendant cette période. Nous sommes donc tenus par une inviolabilité.

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Cette inviolabilité persiste après son départ de l’Élysée et dans le texte rien ne s’y oppose. Sur le plan de la jurisprudence, il n’y a encore rien et aucun autre ancien président a été appelé d’une telle manière. Le problème qui se pose alors concerne l’audition. Si Nicolas Sarkozy y vient entre deux gendarmes il ne peut rien dire car il ne peut pas s’auto incriminer, il ne peut pas répondre donc il y a une réelle difficulté pratique. Quel intérêt alors de le convoquer si ce n’est pour lui faire subir une humiliation…

Quest-ce qui peut expliquer cet acharnement contre lancien président de la République ?

On voit ici la bataille entre une justice politisée et le pouvoir exécutif. Cette dernière convocation est un acharnement. Le juge d’instruction avait refusé de le convoquer, il y a eu un recours devant la Chambre dinstruction et cette dernière a confirmé le refus. Le président décide alors de la convoquer par la force publique si nécessaire.

Avec l’affaire Sarkozy, il y a une partie de bras de fer politique entre une justice qui s’est politisée depuis quelques années et qui entend faire valoir son point de vue et qui tient à rappeler que c’est elle qui tient le manche. Cela nous prépare à des choses amusantes pour la prochaine campagne présidentielle.

Vous avez écrit un livre, "Une justice politique" aux éditions de L'Artilleur. Nicolas Sarkozy nest pas le premier président à être impliqué dans des affaires. Ses prédécesseurs, Jacques Chirac et François Mitterrand ont-ils fait face aux mêmes défis ?

Absolument pas. Dans le cas de Mitterrand, il y aurait eu des possibilités, comme l’affaire des écoutes, qui auraient permis à quelques magistrats de lui causer du tort, mais il était protégé par ceux-ci. C’était le début du grand renversement judiciaire et François Mitterrand était encore sanctuarisé à cette époque. Des années plus tard, la gauche a peuplé la haute fonction judiciaire de compétences amies et s’est occupée du prochain président.

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Pour Jacques Chirac, la Cour de cassation a confirmé un certain nombre d’aspects de l’immunité du président et elle a néanmoins confirmé que les affaires pénales antérieures à ses mandats présidentiels pouvaient avoir lieu une fois le mandat fini. Si par exemple, Macron était battu en avril prochain, l’affaire Alstom pourrait redémarrer. Jacques Chirac après sa sortie de mandat s’est retrouvé poursuivi pour des affaires liées à la corruption politique de la ville de Paris. Il a été condamné à une peine de prison avec sursis.

Nicolas Sarkozy, lui, depuis qu’il a quitté le pouvoir a les pires ennuis… Cela ne s’arrête pas.

Régis de Castelnau a publié "Une justice politique, Des années Chirac au système Macron, histoire d'un dévoiement" aux éditions de L'Artilleur

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