Quelle campagne pour Éric Zemmour s’il perd son arme fatale ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Eric Zemmour est officiellement candidat à l'élection présidentielle de 2022. Parviendra-t-il à atteindre le second tour du scrutin ?
Eric Zemmour est officiellement candidat à l'élection présidentielle de 2022. Parviendra-t-il à atteindre le second tour du scrutin ?
©BERTRAND GUAY / PISCINE / AFP

Nouveau souffle

Alors que le phénomène politique de la rentrée a finalement déclaré sa candidature, le trou d’air qu’il rencontre dans les sondages le prive de la perspective d’un duel au sommet avec Emmanuel Macron lors de l’entre-deux-tours.

Arnaud Stephan

Arnaud Stephan

Arnaud Stephan est fondateur de lanotedecom.com et chroniqueur sur LCI.

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Atlantico : Cela fait plusieurs mois que le journaliste, essayiste et polémiste s’est lancé dans la campagne présidentielle provoquant une véritable percée dans les sondages d’intentions de votes. Pourtant sa campagne connaît un ralentissement avec une baisse dans les sondages. L’officialisation de sa candidature pourrait-elle donner un nouveau souffle à sa campagne ? 

Arnaud Stephan : C'est en tout cas l'effet recherché. Relancer une non-campagne par une campagne qui s'accepte comme telle. La non-campagne s'achève sur une impasse et une succession de mauvaises séquences, la campagne assumée lave en une nuit les défauts de l’autre, elle annule le négatif et garde le positif. C'est en tout cas ce que pensent les équipes d'Éric Zemmour. La croyance en une action magique n’est jamais loin en politique. C’est indubitablement la démonstration de la persistance d’une certaine naïveté dans les équipes du polémiste. En revanche, cette entrée en campagne a un avantage, c’est qu’elle fait sortir Zemmour de l’ambiguïté et de la double identité de son action ces derniers mois. Il est extrêmement compliqué de mobiliser avec un champion qui passe son temps à dire qu’il n’a pas encore décidé. Finasser ne fonctionne pas en politique et développer un message en contradiction avec les faits est une absurdité en communication. Depuis mardi midi les choses sont claires. Cela aura-t-il un impact sur les sondages ? Je pense que oui. Il n’y a pas d’effet mécanique mais cela peut rassurer des électeurs conservateurs qui commençaient à se lasser d’une séquence trop longue et qui a créé une banalité de ce qu’on souhaitait extraordinaire. C’est un péché d’orgueil qui aurait pu coûter cher à l’écrivain. 

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Que retenir de ses interventions sur le 20h de TF1 et de sa mise en scène dans sa vidéo d’officialisation de campagne ? Prend-il une nouvelle stature ?  

Je retiens du 20h de TF1 un sentiment de grande fébrilité d'Éric Zemmour. Un candidat pourtant rompu à l’exercice médiatique mais qui semble en tant que candidat perdre son aisance et sa facilité qui en avaient fait un redoutable et redouté "sniper" d’émissions de divertissement. Il est apparu nerveux, extrêmement sombre, méfiant alors qu’il aurait dû jouer la bienveillance et s’inscrire dans une responsabilité confiante. Là nous avions un personnage décharné, comme consumé par la charge qu’il semble s’imposer. Le seul moment où il retrouve de l’énergie c’est lors du petit accrochage à l’issue de l’entretien avec Gilles Bouleau. 

La vidéo, elle, est un patchwork d’influences, de petits et de grands clins d’œil au Général De Gaulle, à Mitterrand, au film "le discours d’un roi" et surement de beaucoup d’autres choses qui m’ont, pour le moment, échappées. C’est assez surprenant et je me pose encore la question de savoir si c’est raté ou si au contraire cela s’adresse à un public épris de ce genre d’exercice et qu’il a touché sa cible. Nous étions dans un curieux mélange entre Alain Decaux raconte et le discours du 18 juin depuis la bibliothèque de l’Elysée. Une sorte de Cluedo politique. 

La vidéo est destinée à un public, de réseaux sociaux, conquis qui va assurer une large audience à ce support et vous aviez ensuite le 20H de TF1 qui devait assurer de faire passer le message de cette candidature au plus grand nombre, au-delà de la fan base.  

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Attendu sur des sujets autres que l’immigration ou de société, le candidat Zemmour peine à convaincre une large partie de la population. Les nombreux trous d’air de sa campagne sont-ils surmontables ?  

Aujourd’hui, Éric Zemmour est tributaire de beaucoup d'évènements extérieurs et de faits de campagne sur lesquels il n’a absolument aucune prise. 

Qui sera le candidat désigné par les Républicains ? Marine Le Pen va-t-elle maintenir sa bonne conduite de campagne ? Emmanuel Macron va-t-il designer rapidement un adversaire principal, donnant à celui-ci un avantage comparatif indéniable ? 

La situation sanitaire va-telle peser sur l'organisation de la campagne ?

Éric Zemmour a perdu trop de plumes, trop vite, il lui a manqué quelques semaines de santé sondagière pour devenir l’adversaire parfait pour le Président de la République. Un combat projet de civilisation contre projet de société, une castagne que l’hôte de l’Elysée devait s’imaginer avec gourmandise. Aujourd'hui ce scénario n’est plus sur la table et le rêve d’un grand débat de second tour que le natif de Montreuil était certain de remporter s’est, pour l’instant, évaporé. L’arme principale d'Éric Zemmour est en train de s’émousser, s'il n’est pas en situation de promettre l’Armageddon au Président de la République que lui reste-t-il ? Citer Renan devant un réfrigérateur vide ne va pas aider les Français à le remplir et son logiciel personnel lui fait considérer les sujets hors régaliens comme triviaux. 

Éric Zemmour a mis trop d’espoir dans un talent qu’il a peut-être surévalué. 

Il y a une expression qui dit en politique "jamais mort, jamais fâché". Je me garderai donc bien d’annoncer la fin du candidat Zemmour surtout parce qu’il reste autour de 14% ce qui lui fait une base importante pour faire, encore, des choses. 

La seule question qui vaut est de savoir si le candidat Zemmour peut dépasser l’homme de lettre, l’intellectuel et se muter en animal politique ? L'autre interrogation est de savoir si sa campagne a les ressources internes pour équilibrer les failles du candidat par une action politique efficace ? 

La vague de sondages dans quinze jours, trois semaines, ne nous donnera pas une réponse définitive mais sera un bon indicateur. 

Il reste peu de temps à l’auteur du "Suicide français" pour réaliser sa mue et renoncer à l’idée que sa campagne serait une promenade de santé au milieu d’autres candidats qu’il méprise et qu’il considère comme des crétins illégitimes. 

Le sujet vous intéresse ?

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